Le Vent de la Chine Numéro 27-28 (XX)
Tandis que le 7 juillet les regards du monde étaient rivés sur la Grèce, la Chine haussait les épaules : en trois semaines, ses places de
Shanghai et Shenzhen venaient de griller 3250 milliards de $, l’équivalent de 12 PIB grecs. Shanghai vivait un cauchemar, voyant sa bourse perdre 32%, depuis le 11 juin (et Shenzhen, 41%).Ce qui frappe est l’attitude de l’Etat : comme lors de la crise de 2008, il choisit (4 juillet) d’intervenir et de renflouer ses groupes publics, en faisant soutenir leurs titres au moyen de 19,4 milliards de $ « prêtés » à 21 maisons de courtage. Le plan de sauvetage était complété par le gel d’introduction de toute nouvelle valeur. Et les acteurs financiers gelaient toute revente, en dessous d’un indice de 4500 points. L’Etat donc se déjugeait par rapport à sa promesse de novembre 2013, lors du 3ème Plenum, de « laisser un rôle décisif aux forces du marché ».
Ainsi, en début de semaine, les titres publics avaient un peu remonté. Pour cause, les 19,4 milliards de $ les soutenait presque seuls, laissant les compagnies moyennes et privées, et les petits actionnaires « boire la tasse ».
Ce qui n’a empêché, cette semaine, le plan de sauvetage de faire long feu : les ventes sauvages continuaient, impossibles à arrêter. Encore le 8 juillet, Shanghai perdait 6% et Shenzhen 3%.
Cette crise semble avoir pour origine la pratique dite « d’emprunt sur marge », où le (gros) joueur hypothèque ses parts, pour pouvoir en acquérir plus. Cela marche tant que la bourse monte. Mais dès qu’elle descend, le prêteur réclame un complément de parts, pour compenser la baisse de valeur de l’hypothèque. En face, comme parade, propriétaire et émetteur du titre s’entendent pour le « geler », le rendant incessible. Cette pratique existe dans toutes les bourses, mais alors qu’à New York elle concernait 3,5% des parts en circulation, à Shanghai début juin, elle en touchait 12% .
Aussi le 8 juillet, par réaction, 51% des 2800 titres des places de Shanghai et Shenzhen étaient gelés—toute la bourse chinoise était paralysée. Et le soi-même, l’Etat jouait le tout pour le tout, en injectant plus de 100 milliards de $ en bourse et hors bourse : en rachats de parts, stimulus et projets d’infrastructures…
Ce que cette crise dévoile, est la vulnérabilité d’un marché toujours faussé par l’intervention du régime.
En théorie, la finance chinoise est supervisée par les tutelles de la CSCR (bourse), CBRC (banques) et la Banque Centrale (monnaie). Mais ces dernières sont rigides, non commerciales, et sans indépendance, obéissant aux ordres du PCC. Elles sont aussi en proie à des luttes internes permanentes, conflits personnels et de privilèges de maison, se paralysant mutuellement. Et leurs consignes sont en permanence inspirées des intérêts des lobbies « rouges ». C’est ainsi que les entrées en bourse, en 2014, avaient été rétablies sans réforme : les nouvelles valeurs obtenaient leur feu vert, non en respectant une liste de critères comme à Hong Kong, mais en suivant le libre-arbitre du Président de la CSRC.
Finalement les 9-10 juillet, l’intervention accrue de l’Etat, allant jusqu’à dépêcher des policiers dans les travées de la bourse pour décourager les vendeurs « à la sauvette », obtenait des résultats : l’indice remontait de 13% en deux jours. Mais pour cette place meurtrie et ces millions de petits porteurs empêchés de vendre, la messe est tout sauf dite.
Depuis début 2014, le Français Alain Perrin, 58 ans, est à la barre d’un navire de tous les dangers, recruté (parmi 40 candidats) en tant que sélectionneur et entraineur de l’équipe nationale chinoise masculine de football. Plus d’un an de travail porte déjà ses fruits, ayant conduit le « onze » national jusqu’en quarts de finale de la Coupe d’Asie 2015 (ce qui ne s’était plus vu depuis 2004). Le Vent de la Chine est allé à sa rencontre.
Comment êtes-vous arrivé en Chine ?
Depuis 10 ans, je rêvais d’Asie, mais ce n’est qu’en novembre 2013, à l’issue de mon contrat au Qatar que j’ai pu réaliser cette envie. J’avais plusieurs offres, en Tunisie notamment, mais c’est la Chine qui m’attirait. Avec l’aide d’intermédiaires, je me suis présenté à la China Football Association (CFA) qui cherchait à remplacer l’espagnol José Camacho. D’abord interviewé avec les autres Européens à Francfort, puis à Pékin un mois plus tard, j’étais officiellement nommé fin février 2014.
Sur quels critères, la CFA vous a-t-elle choisi ?
À mon profil d’éducateur-formateur, passé de petits clubs tels Troyes ou Nancy, à de grands tels Marseille ou Lyon. Je crois que la CFA a été sensible à ma capacité à faire progresser les joueurs. Car ce onze chinois a un très riche potentiel, dynamique, discipliné, volontaire, enthousiaste dans l’attaque.
Et qu’est ce qui leur manque ?
Leur handicap majeur est l’absence de formation dès l’enfance, d’années d’entraînement, de compétitions et même de formation physique. Ils ont aussi le culte du héros de kung-fu, « du grand raid individuel ». Ils ont une carence en jeu collectif et en défense.
Comment avez-vous sélectionné vos joueurs ?
J’ai beaucoup pris l’avion pour suivre 80 matchs de Super League chinoise avec un regard neuf, sans a priori. J’ai changé la moitié des joueurs, en pensant à une alchimie : comment associer tel et tel pour qu’ensemble ils se fondent en une équipe. Car on ne compose pas un « 11 » national comme un club. Pour jouer à l’international, il faut à la fois un physique hors pair et la rage de vaincre.
Et votre staff ?
A l’inverse de mon prédécesseur, j’ai opté pour une équipe binationale. En plus d’un assistant interprète, j’ai à mes côtés deux entraineurs français et deux Chinois dont un ex-international, aux plus de 80 sélections – pour les joueurs, il est le « grand frère ». Je planifie la programmation des entraînements, mais ce sont mes adjoints qui animent, même si je suis tout le temps sur le terrain. Je ne me considère pas comme un entraineur sévère, mais plutôt directif.
Que pensez-vous de vos joueurs ?
Il ne s’agit pas de les rendre « deux fois meilleurs », mais d’apporter les 5% de « réglages » en plus, qui feront la différence. Je dois compenser le fait qu’à l’inverse des Japonais ou Coréens du Sud déjà beaucoup plus mondialisés, aucun de mes joueurs ne joue hors frontières, ni n’a d’expérience internationale. Je dois leur apprendre à compter les uns sur les autres, à encourager la créativité sur le terrain, et les réflexes de prise de responsabilité collective.
Le foot chinois a souffert de nombreux scandales : matchs truqués, corruption…
Oui, les 15 dernières années ont été houleuses pour la CFA, avec arbitres vendus et petits arrangements entre amis, et du coup, le public s’est détourné des stades. Mais le grand nettoyage a été fait, et les contrôles sont là.
Comment se passent vos rapports avec l’administration ?
Plutôt bien, et en confiance. Malgré une certaine lenteur et lourdeur administrative, la nouvelle équipe dirigeante a conscience de ses faiblesses et a une véritable volonté de changer les choses. A ma demande, pour la première fois, l’entraineur a un bureau à la CFA. Depuis janvier, la CFA doit devenir indépendante de la Commission Nationale des Sports. Dès à présent, elle recrute librement des professionnels du football. Et puis, il y a le programme, lancé sous l’impulsion du Président Xi Jinping, de formation au football dans 20 000 écoles d’ici 2017. Les résultats seront là dans 10 ans. Mais l’équipe nationale sera la meilleure locomotive du changement !
Comment vivez-vous le poids qui pèse sur vos épaules ?
Ma mission est de décrocher le billet pour la Coupe du Monde 2018 en Russie. Les adversaires dans notre poule (Hong Kong, Bhoutan, Maldives, Qatar) sont à notre portée. Mais je relativise : je travaille comme si j’allais rester dix ans, tout en sachant que je peux plier bagages dans quelques mois. C’est le jeu.
Que penser de l’engouement des magnats chinois pour les clubs européens (Wanda achète 20% de l’Atlético Madrid*, Ledus, 100% du FC Sochaux) ? Je pense que ce sera positif pour ces clubs. De plus, cela favorisera les échanges (formations, joueurs) entre Europe et Chine.
Un commentaire sur le onze féminin, qui s’est hissée en quart de finale de la Coupe du Monde 2015 ?
Le résultat force l’admiration. Le fossé de niveau avec l’équipe masculine peut s’expliquer par l’intérêt assez récent des nations pour le foot féminin, le niveau est donc plus homogène.
Merci Alain !
Prochains matchs amicaux de l’équipe nationale contre la Corée du Sud (2 août), Corée du Nord (5 août) et contre le Japon le 9 août à Wuhan.
*Le 4 août à Shanghai, match amical entre Atlético de Madrid et le Shanghai SIPG
Après deux ans, quelle méprise de penser que la campagne anti-corruption puisse s’essouffler. La voilà plus vigoureuse que jamais !
<p>Le 25 juin, la CCID, police du Parti, arrêtait en pleine réunion Xiao Tian, n°3 national des Sports, en charge de la candidature de Pékin aux JO d’hiver de 2022. Ceci pourrait améliorer les chances de Pékin (face à Almaty), avant le vote du 31 juillet. Fin juin, la CCID arrêtait Li Zhiling de la CSRC (tutelle boursière), et le 6 juillet, elle jurait d’épingler tous les cadres boursiers aux mains sales.L’audit national pour sa part, vise les deux branches de la loterie pour avoir détourné 2,7 milliards de $ de 2012 à 2014. Nulle arrestation pour l’heure, mais des conséquences sont inévitables.
La campagne se ramifie dans les territoires lointains et de minorités –les autorités locales ont ordre de présenter des résultats. Au Guangxi, Yu Yuanhui, ex-secrétaire du Parti pour Nanning, est une prise de choix, débusqué comme proche de Ling Jihua, l’ex-homme fort (aujourd’hui en disgrâce) de l’ancien Président Hu Jintao. Au Xinjiang, plonge Alimjan Maimaitiming, Secrétaire général du gouvernement local, peu après Li Zhi (cf photo) qui fut de 2006 à 2009 Secrétaire d’Urumqi. Au Tibet, c’est au tour de Le Dake, ex-vice Président du Parlement local, mais surtout grand patron des services de sécurité de 2004 à 2013.
Un peu plus bas dans l’échelle : 38 secrétaires de district ont été révoqués en 14 mois, pour « sérieuses violations de la discipline du Parti et de la loi ». Et le 3 juillet, Xi Jinping recevait 102 d’entre eux au Grand Palais du Peuple comme « travailleurs modèles », tout en les priant de tenter, les années à venir, à conserver cette qualité de probité.
Plus largement, sont visées les compagnies pétrolières, notamment la CNOOC (Wu Zhenfang), Petrochina (Liao Yongyuan) – ce groupe étant déjà cible des premières salves fin 2013—et Sinopec, avec six de ses filiales, qui se trouve en inspection rapprochée. L’audit pointe aussi du doigt 14 consortia, tels State Grid (électricité) et COSCO (maritime) pour falsification des comptes.
Et pour bien montrer que cette campagne de nettoyage et de vertu est tout sauf finie, la CCID lance une application et une plateforme sur son site internet, pour permettre aux citoyens de dénoncer 11 types de corruption, y compris les luxueuses fêtes familiales et les cultes religieux « de l’ombre » – films et photos bienvenues, anonymat garanti.
En fin de compte, ce que cette hyperactivité suggère, au cœur d’une crise financière sans précédent, est que l’Etat –avec nervosité– cherche des solutions à des problèmes sur lesquels il a de moins en moins prise.
Fin février 2014, le Président Xi Jinping sortait des cartons le projet Jing-Jin-Ji (京津冀) d’intégration de Pékin, Tianjin et le Hebei en une région unique : 130 millions d’habitants sur 216 000 km² à grand renfort de « ceintures » et radiales. Décrétant Jing-Jin-Ji « priorité nationale » sous le Conseil d’Etat, il en confiait la réalisation à Zhang Gaoli, vice-1er ministre. Les 10 et 11 juillet, le 7ème Plenum du 11ème Congrès de la marie de Pékin, devrait permettre d’y voir plus clair sur ce chantier pharaonique, qui doit connaître 3 phases :
(1) en 2017, la mairie de Pékin sera installée à Lucheng, Sud-Est de Tongzhou (cf photo). Plus proche de Tianjin et du Hebei, cela facilitera les décisions et la naissance de la nouvelle entité. Pour faire place au chantier, la démolition de 17 villages débutera à l’automne, et la construction cet hiver.
(2) Dès 2020 suivront d’autres arrivants, consortia municipaux ou nationaux, écoles ou universités (telle celle Renmin), hôpitaux, et même un parc à thème d’Universal Studio.
Ce déménagement entraînera le départ de dizaines de milliers d’emplois de service, soit 15% de la population pékinoise. Comme en rêvait déjà dans les années 1950 l’urbaniste Liang Sicheng (en vain, face aux ordres de Mao), ce projet sera bon pour la décongestion de Pékin, devant permettre une amélioration générale de la qualité de la vie et plafonner la capitale à ses actuels 23 millions de résidents.
(3) Le réseau interrégional est en chemin : une ligne ferroviaire rapide entre les deux aéroports (l’actuel, et celui qui se construit à Daxing), autoroutes, métros et trains « intercités »… L’appel d’offres ira surtout aux firmes d’Etat, telle cette Beijing-Tianjin-Hebei Intercity Railway Invest Co. fondée par les chemins de fer et les trois gouvernements locaux. Le budget global d’ici 2020 sera de 42 trillions de ¥ et d’1,5 trillion pour le budget « transports ». Fin des travaux prévue pour 2030.
Enfin, chaque entité (Jing- Jin- et Ji) se verra confirmer la vocation de ses atouts naturels : Pékin, phare politico-culturel (conservant ministères et organes du Parti), gardera les échanges internationaux, sciences et innovation. Tianjin se renforcera en R&D avancée, transport maritime et finance innovante. Le Hebei fera ses choux gras du commerce, de la logistique, et des industries nouvelles à bas carbone.
Le concept suscite des critiques. À la CASS, Sheng Guangyao craint que 15% de relogement ne changeront pas grand-chose aux embarras de Pékin. Pang Shihui, son collègue, estime qu’il est trop tard : « Tongzhou compte déjà 1 million d’âmes, et faute d’un bon plan de transports, on va droit à des embouteillages inextricables ». Quant aux ronds-de-cuir, ils traînent des pieds à s’y installer, d’autant que sur place, les prix au m² explosent (à Lucheng, +5000¥ en un mois). Une problématique de refus des provinces de se voir dominer par la capitale—qui n’est pas spécifique à la Chine.
En 2015 l’ agriculture chinoise change de visage et se métamorphose sous le triple effet de l’ effort public, de l’exode rural, de la mécanisation.
Les chiffres sont éloquents : avec 561 millions de tonnes de légumes en 2011, les fermiers de l’Empire du Ciel assurent 52% de la récolte mondiale de concombres, oignons, tomates ou d’ail. En culture fruitière, ils produisent 47% des pommes, 66% des poires, 51% des prunes – résultat d’une main d’œuvre abondante, habile… et peu payée. L’aquaculture (poissons et crustacés) est une autre de leurs forces avec 48% du volume. En céréales, sous les efforts constants du gouvernement, voici 10 ans qu’en dépit des crues, grêles et sécheresses, la Chine bat son record en blé, maïs, riz, orge, seigle ou sorgho.
Sous Hu Jintao, l’Etat mettait l’accent sur la technologie, les semences, les prix garantis. Il encourageait aussi le rattrapage des régions rurales pauvres de l’Ouest et du Dongbei, par la scolarisation : repas, fournitures et frais étaient pris en charge par Pékin pour 10 millions d’enfants.
À présent sous Xi Jinping, c’est l’heure du « nouveau normal », qui privilégie la qualité sur le volume. Li Keqiang, architecte de la réforme, vise la création de fermes « familiales » de 5 ha : compromis entre la fermette de 3 « mu » ( 2000m²) et l’exploitation capitaliste de milliers d’ha.
Parmi les nouveaux plans qui vont inspirer l’agriculture, comptent les « Routes de la soie », projet d’export de technologies et de capitaux. C’est qu’entre la pollution et l’extension irrésistible des villes, le pays voit s’effriter son terroir –déjà trop étriqué, à 7% des sols cultivables sur Terre. Dans ses directives agricoles pour 2020, (27 mai), le ministère vise un terroir de « pas moins de 104 millions d’hectares ». Au passage, c’est 14% de moins que l’objectif en vigueur en 2014 (120 millions) – et l’aveu implicite des pertes des dernières années. L’Etat tente de compenser par ses achats de terres hors frontières.
En tête du peloton, la COFCO, consortium public des huiles et céréales, en 2014, a racheté 51% du trader hongkongais Noble, autant du néerlandais Nidera (voire au moins 15% de plus, en négociations). Elle possède en 60 pays des silos pour 15 millions de tonnes de grains, et veut se renforcer autour de la mer Noire et en Amérique latine—greniers à blé de la planète.
En Chine et hors de Chine, d’énormes fermes se développent avec participation chinoise, tel l’élevage de 100.000 vaches près de Mudanjiang, destiné en partie à sustenter en lait la Russie, en dépit de l’embargo occidental. À Ma’anshan (Anhui), une JV entre Hanswine et le français Grimaud va produire 3 millions de porcs de haute qualité par an, sous 5 ans.
Pour 500 millions de dollars, le thaï Charoen Pokphand, soutenu par Temasek (bras financier de Singapour) veut produire dans le Jilin 300.000 porcs par an pour export. En Sibérie transbaïkale, Hua Xiban reprend pour 49 ans 115.000 hectares, moyennant 390 millions d’investissements. La récolte (colza, luzerne, viande) ira aux marchés locaux. En cas de succès en 2018, il recevra 85.000ha supplémentaires – à la grande inquiétude de l’opinion russe qui voit la Chine surpeuplée loucher sur sa Sibérie déserte…
Autre axe de réforme verte : l’environnement et le plan de l’ONU de baisse de l’empreinte carbone, contre le réchauffement global. Dans cette perspective, la Chine a remis ses offres, lesquelles ont d’évidentes conséquences pour l’agriculture.
Dans ses directives du 27 mai, le ministère prétend éliminer toute pollution agricole d’ici 2030, et ceci moyennant de forts progrès en agronomie et mécanisation. Pour 2015, 4238 projets de culture, d’élevage et de transformation agroalimentaire se partageront 806 millions de $, complétés par 2,2 milliards des provinces et surtout, des banques et du privé.
Dès 2020, l’irrigation doit gagner 5% en efficacité et se plafonner à 372 milliards de m2 ; engrais et pesticides chimiques doivent céder la place à des substituts biologiques. En 2014, la Chine épandait 59 millions de tonnes d’engrais chimiques, à une intensité quadruple de l’Europe. Un fort programme de jachère et de reforestation est aussi en route, accompagné de primes, pour laisser des sols épuisés, se reconstituer.
Enfin, un intéressant axe de développement est l’internet. Sur 700 millions d’habitants de la Chine verte, 200 millions sont connectés à l’internet, y compris au Yunnan, les producteurs de café directement branchés sur la bourse de Chicago qui détermine leurs prix de vente. En 2014, les ventes agricoles en ligne ne faisaient que 16 milliards de dollars et 3% du marché. Toutefois, elles seront amenées à exploser les prochaines années grâce aux 4000 sites chinois de vente directe, 31 000 compagnies de services (dont Alibaba qui prépare un site spécialisé à 1,2 milliard de dollars). De même, en levant des fonds sur internet, des groupes mondiaux comme Carlyle ou Blackstone financent de grosses fermes en Chine (600 millions de $ par Blackstone sur une exploitation dans le Shandong).
L’internet est aussi de plus en plus puissant et présent dans la formation, ainsi que la fourniture de solutions aux éleveurs et producteurs spéculatifs : c’est pour le paysan chinois l’évidente imminente chance d’un nouveau départ.
Après le Club Med et Fosun, Accor et Huazhu, Louvre Hotels et Jinjiang, Pierres et Vacances et BCL & HNA, un nouveau mariage franco-chinois a été célébré.
Après 6 mois de travail, la Chuanshan Academy à Pékin (cf photo) ouvrait ses portes en juin, dans les murs d’une maison à cour carrée (« siheyuan ») du 13ème siècle pouvant héberger 90 hôtes. C’est le fruit du partenariat entre Legend of Tourism et Châteauform’, fondé en 1996 par l’expert mondial de la stratégie de service, Jacques Horovitz qui se lamentait de l’inadéquation de l’offre de séminaires, trop souvent organisés sur des sites inadaptés et impersonnels.
Effectivement commence à émerger en Chine le besoin d’une offre à mi-chemin entre hôtel de charme et salle de conférence, d’un espace dédié aux professionnels dans une ambiance chaleureuse et relaxante.
D’autres occupent déjà le créneau, tel le Club Med (en marge de ses formules touristiques), ou la champêtre Schoolhouse au pied de la Grande Muraille à Mutianyu (à 80km de Pékin). Mais « Châteauform’ » en Chine affiche sa différence par la précision du concept.
Comme le précise Philippe Roye, responsable du déploiement en Chine, chaque maison a pour but exclusif l’accueil de séminaires, comités d’entreprises, formations, teambuilding, conférences de presse. A cet effet, elle est équipée des dernières technologies (micros, rétroprojecteurs, imprimantes…), tout en respectant une ambiance « comme à la maison », avec une touche française d’hospitalité.
Tout site est sélectionné pour sa beauté architecturale, un aspect d’originalité, d’histoire (château, monastère, ou village célèbre… ). A ce décor, le groupe s’efforce de revisiter espaces et jardins, apporter modernité et confort, privilégiant la lumière naturelle, en quête permanen-te du sentiment d’aise pour faciliter échanges et travail.
Les séjours sont créés « à façon » par une équipe de « conseillers séminaire » multilingues. Les participants sont accueillis par un « couple d’hôtes » , l’organisation prise en charge par une « nounou », le site entretenu par une « maîtresse de maison », tandis que des activités proposées par des « facilitateurs » (sport collectif, musique, cours de cuisine…) assurent de bons souvenirs d’équipe, renforçant ainsi l’esprit d’entreprise.
En plus des repas traditionnels, on y sert aussi le « casse-croûte » de 10h, le « goûter » de 16 heures, avant le dîner composé par le chef-maison avec des ingrédients exclusivement bio.
Au sein du partenariat, suivant un type de répartition des responsabilités très classique en Chine, Châteauform’ prend en charge style et management, tandis que Legend of Tourism assure la finance et le site.
Pour la suite de son développement, Châteauform’ vise dans l’Empire du Milieu 15 sites d’ici 2020 –en diversifiant les partenaires.
En sus de l’adresse pékinoise, il prépare avec Legend of Tourism l’ouverture en 2016 d’un centre à Badaling, au pied de la Grande Muraille (50 à 80 chambres avec spa) ainsi qu’une « Maison du Séminaire » au cœur de Suzhou (Jiangsu), avec un autre investisseur (50 chambres installées dans des villas signées de l’emblématique architecte I. M. Pei) pour une clientèle locale et shanghaienne.
Comment attirer le client ? « Depuis notre création, commente Roye, nous ne faisons pas de publicité. Le bouche-à-oreille suffit, avec les 228.000 participants en 2014 dans nos maisons en France, ainsi qu’en Suisse, Allemagne, Espagne, Belgique et Italie ». Pour autant, les premiers groupes accueillis à la Chuanshan Academy, générés par le partenaire, sont tous Chinois.
Enfin, le principal challenge a été de contourner les difficultés potentielles de la vive campagne anti-corruption, où tout luxe est vu avec suspicion, et où les sites de prestige sont considérés comme « sensibles ». Mais Châteauform’ a su tirer partie de son savoir-faire respectueux du patrimoine et du réseau de contacts du partenaire chinois.
Une situation de « gagnant-gagnant » à l’heure où l’offre hôtelière et touristique est une priorité du gouvernement chinois.
www.chateauform.cn
Face à cette révolution verte en route, se profilent dans l’ombre plusieurs zones de retard. On ne s’étonnera pas de voir que ces blocages sont ceux où se mêle le plus d’idéologie agraire issue de l’ère de Mao :
– Trop de subventions. En 2012, la Chine versait 165 milliards de $ de subventions, et 2,3% de son PIB—un chiffre en hausse, tandis que ceux des pays de l’OCDE baissent (0,9% en 2010-2012). Dans son obsession d’autosuffisance, la Chine crée des distorsions de concurrence, obstacle potentiel aux accords de libre-échange (ALE) qu’elle vise pour l’avenir avec Etats Unis ou l’UE. Ainsi, de l’ALE avec la Suisse, l’agriculture est exclue : le fermier suisse touche 50% de subventions, le fermier chinois 17%, primes qui sont incompatibles avec le « libre échange ».
– Une mécanisation « low-cost ». L’an passé, la Chine versa 3 milliards de $ pour du matériel de faible qualité, dont presque 30% en subventions directes. Ainsi le paysan perd l’occasion d’un saut technologique, ne bénéficiant pas d’un matériel plus sûr, multifonctions, ni moins polluant. Ce choix politique décourage aussi l’émergence d’une industrie de pointe : les constructeurs sont trop souvent des amateurs opportunistes, tels le fabricant automobile Chery, qui sortait son premier tracteur en 2010.
– Enfin, Pékin est conscient de devoir démanteler son stockage public des grains, cause de milliards de $ de fraudes par an. Mais provinces et cadres corrompus opposent une résistance farouche. Au moins, un pas a été franchi, avec la fermeture cette année du stockage public du coton.
Le grand problème en définitive, risque d’être comment ressusciter la vocation paysanne. En 2015, les campagnes continuent à se vider de 10 millions de jeunes vers les villes. Comment inverser la tendance ? Peut-être par la sécurité sociale et par le tourisme rural, qui connait un développement rapide et rémunérateur. Mais il y a du pain sur la planche…
Le 7 juillet, le ministère des Affaires civiles publiait son bilan des divorces. Surprise : en 1979, les couples en divorce représentaient 4,7% du total. En 2014, le chiffre était de 26% (3,6 millions), soit 3,9% de plus qu’en 2013 –dans les métropoles, le pourcentage s’envolait, à plus de 30%.
Psychologues et conseillers conjugaux relèvent une cause inattendue à la séparation des couples : les réseaux sociaux online tels WeChat, QQ ou Momo. Le nombre de maîtresses, dites « petite 3ème » (小三) a grimpé de 20% en 5 ans, selon yihunyin.com, le site de thérapie conjugale, sachant que de tout temps, 40 à 50% des séparations sont liées à l’infidélité. La nouveauté vient de ces réseaux sociaux qui facilitent les rencontres extra-conjugales. Avec WeChat (468 millions d’abonnés), il suffit d’agiter son téléphone portable pour voir apparaitre les profils d’inconnus à proximité.
D’après Liu Mingsheng, sociologue du mariage, ces excès brisent l’union par deux insidieux chemins. 1° entre époux, on ne se parle plus. 2° derrière l’écran, on cultive une part de mystère qui comble de nombreux jeunes époux trouvant leur vie de couple « ennuyeuse à en pleurer », pour reprendre le mot d’une jeune chatteuse. Avec 100 ans d’écart, c’est le syndrome de « Mme Bovary » de Gustave Flaubert, qui refait surface en l’Empire du Ciel.
Le ministère se hâte d’ajouter qu’il y a d’autres causes : le long trajet quotidien pour aller travailler, les « faux divorces » où les époux se séparent pour pouvoir acheter un second appartement (puis se remarient). C’est le cas pour 33% des divorces enregistrés à Canton l’an passé. Autre cas de figure : épouser un titulaire d’un hukou afin de pouvoir placer l’enfant dans une bonne école—puis, on divorce. Une autre cause est le contrat de mariage devenu trop complexe et matérialiste : on se sépare, au cas où la promesse de tel ou tel signe extérieur de standing n’a pas été tenue.
Un consensus entre experts semble se dégager sur la question du mariage en Chine : en 30 ans, avec l’enrichissement et l’apparition de la notion de choix, il a perdu sa valeur sacrée, pour se banaliser et devenir un moyen de bonheur (parmi d’autres), voire un bien de consommation.
Ce matin de janvier 2015, à Kaihua, (Zhejiang) dans le mur de la bicoque que Zhan Xinlong avait achetée en 2009 à Wang Shima pour une bouchée de « mantou », les maçons trouvèrent 128 pièces d’argent.
L’apparition du trésor fit l’effet d’une bombe dans le village. Une fois la cassette dégagée des moellons du mur, il n’avait pas fallu 5 minutes à Zhan pour venir récupérer son bien.
Sur sa balance, l’apothicaire les avait pesées à 26 grammes, à 0,89% de pureté. Mais leur valeur était très supérieure au numéraire : ces rares « dollars grosse tête », éphémère monnaie de Yuan Shikai, disparue de la circulation presque aussi vite qu’elle était apparue en 1915, allaient chercher jusqu’à 2000 yuans pièce—soit 250.000 yuans au total.
Comme on le sait, les nouvelles vont vite ! Cinq heures plus tard, déboulait de Ningbo, à 364 kms de là, Wang Guiye, la furieuse épouse de Wang Shima. Tambourinant à la porte d’un Zhan abasourdi, elle s’engouffra chez lui pour lui rappeler qu’il n’avait acquis, en 2009, que la maison, les murs et le sol, mais rien d’autre ! Le trésor dans le linteau appartenait donc aux Wang, et il y resterait. Zhan devait lui restituer tout le butin et s’éviter ainsi bien des tracas : les rigueurs de la loi, frais de justice et d’avocat…
Zhan bien sûr, ne l’entendait pas de cette oreille. Les murs, les trésors, tout ce qui figurait sur place au moment de la cession, était à lui dès conclusion de la transaction d’achat. Il était poliment désolé, mais non, tout était à lui, et « bonsoir madame ».
Mais la tigresse continua de s’époumoner. Il était tard. Simple cultivateur, Zhan n’était pas coutumier des grandes phrases : de guerre lasse, la mort dans l’âme, il laissa la femme repartir triomphante, avec 14 de ses précieuses rondelles d’argent. Par pusillanimité, il oublia de réclamer en échange, une promesse écrite que son geste enterrerait le litige !
De toute manière, dans Kaihua, la mèche du tonnelet de poudre continuait à brûler : le comité du village se réveillait. Dame, c’était bien lui, l’allocataire de tout bien sur la commune, au nom du droit foncier issu de la Révolution, qu’avait du passé fait table rase ! C’était bien lui qui avait payé il y a 20 ans pour les vieux jours de Wang Xiaopeng (le veuf qui habitait la baraque jusqu’à sa mort en 1999). Et c’était bien lui qui avait ensuite réalloué la maison, en l’absence d’héritier direct, au neveu Wang Shima, installé à Ningbo et qui avait délaissé son oncle à son sort. Après tout cela, le maître du trésor, n’était pas Zhan, ni Wang mais le Comité, lequel saurait quoi en faire, pour ses projets au village !
L’affaire, on l’aura compris, avait réveillé une vieille souffrance, née du démantèlement du rêve d’égalitarisme par Deng Xiaoping, avec sa formule célèbre, « il est légitime que certains s’enrichissent avant les autres » !
Fin avril 2015, le contentieux prit un nouveau tournant : deux plaintes furent simultanément déposées, et une retirée. L’épouse de Wang réclamait les 114 pièces que Zhan avait omis de lui rendre. Le fermier réclamait la restitution des 14 pièces inconsidérément cédées, et le comité du village lui, après vérification de ses arguments juridiques, préférait – non sans un soupir – renoncer à ses droits, vu la faiblesse de ses arguments. A ce que lui assurait son avocat, son argumentation reposant sur base morale et idéologique, ne tenait pas la route, face à l’article de la loi.
Aussi le 16 mai, tout ce beau monde se retrouva dans la salle du village, invité par un tribunal détaché de la Cour intermédiaire de Ningbo. Le cœur battant, les plaideurs affûtaient depuis des mois leurs arguments, consultaient, lisaient leur code juridique, sans se rendre compte du danger autrement plus insidieux qui rampait vers eux.
Car le juge et les experts, l’avocat général, toute cette magistrature ambulante, fit très bientôt découvrir une argumentation totalement nouvelle, insolite et inattendue, contre laquelle nul ne pouvait rien. Le propriétaire des pièces était celui qui les avait cachées, ou ses descendants. L’équation de la propriété légitime se résolvait donc à l’identité du déposant—et aux pièces à soumettre à titre de preuve. Or, à défaut de cette preuve, la propriété devenait celle de l’Etat—autrement dit, du tribunal qui, à titre conservatoire, fit saisir séance tenante 90 pièces.
On pourra se demander pourquoi 90, et non pas toutes ? Au village, la rumeur court que Zhan, en payant davantage le juge que Mme Wang, aurait pu ainsi conserver une petite partie de son trésor. En attendant, le verdict n’est pas tombé, le procès se poursuit.
A Kaihua, la fièvre une fois retombée, il se dit—mais un peu tard– que Zhan et Wang eussent cent fois mieux fait de s’entendre discrètement, plutôt que d’en appeler à l’autorité. Comme dit le proverbe, « quand le héron et l’huître se disputent, c’est le pêcheur qui ramasse la mise » (yùbàng xiāng zhēng, yúwēngdélì – 鹬蚌相争,渔翁得利) !
A l’occasion de son 94ème anniversaire (1er juillet), le PCC révéla son nombre de membres en 2014 : 87, 8 millions (dont 24,7% de femmes), 1,1 million de plus qu’en 2013 (2,06 millions de nouveaux membres). C’est plus que la population allemande !
Malgré la campagne anti-corruption et la chasse aux « mauvaises pratiques » des cadres (mahjong, golf…), ce nombre ne cesse d’augmenter depuis 4 ans, attirant 1,7 million de jeunes communistes (moins de 35 ans) dont
Bloomberg s’amusa à comparer ce chiffre avec le nombre de Chinois possédant des actions en Bourse : 90 millions, avec 40 millions de comptes en bourse créés les 12 derniers mois, et 7 millions de Chinois se mettant à la Bourse pour le seul mois de juin ! Une véritable frénésie qui aurait profité à la plupart des 1 million de nouveaux millionnaires l’an dernier seulement en Chine ! Pour un total de 4 millions de millionnaires (source : Boston Consulting Group).
La dernière étude de la Commission Nationale de Santé et du Planning Familial (NHFPC) se réjouit de voir que la population chinoise grandit (en moyenne 167,1 cm pour les hommes, 155,8 cm pour les femmes – 1 cm en plus qu’en 2002). Les Chinois les plus grands se trouveraient donc principalement dans le Nord, avec un top 5 : Shandong, Pékin, Heilongjiang, Liaoning et Mongolie Intérieure.
Naturellement, la population grossit aussi :(respectivement 66,2 kgs, 3,5 kgs en plus, et 57,3 kgs, 2,9 kgs en plus). Ces deux évolutions sont les signes d’une meilleure
nutrition mais aussi de deux problèmes menaçants : le
surpoids et l’obésité. En effet, 30,1% des adultes seraient en surpoids, et 11,9% obèses. Des chiffres en hausse également chez les enfants entre 6 et 17 ans, avec 9,6% et 6,4% d’obèses.
Côté alcool, en moyenne, un adulte consommait en 2012,
3 litres d’alcool pur par an.
51% des collégiens et lycéens ont déjà une fois goûté à une boisson alcoolisée(dont 28% leur première gorgée avant 10 ans), et
15% ont déjà été
saouls. Des chiffres en hausse mais tout de même moins élevés qu’en Europe (69,5% ont déjà bu de l’alcool). (
source : China National Institute for Nutrition and Health)
Le géant chinois du taxi et chauffeur privé sur commande Didi Kuaidi vient de lever 2 milliards de $ auprès de ses investisseurs en deux semaines. Uber, le concurrent américain, a du souci à se faire…