Editorial : Le Buffle retourne à l’étable, le Tigre rugit !

Le Buffle retourne à l’étable, le Tigre rugit !

Après deux « dures » années placées sous l’élément « Métal » (Rat et Buffle), l’heure est venue de célébrer le passage le 1er février à l’année du Tigre d’Eau.

Troisième signe du zodiaque chinois, les natifs du Tigre (nés en 1926, 1938, 1950, 1962, 1974, 1986, 1998 et en 2010) sont souvent considérés comme courageux, travailleurs, bienveillants, charismatiques, avec une grande confiance en eux. En revanche, il leur arrive de se montrer irritables, imprévisibles, impulsifs, voire autoritaires.

Son caractère chinois (虎 ; hǔ), dont la graphie représente les rayures de la peau du Tigre, est employé dans de nombreuses expressions, telles que « 虎子 » (hǔzǐ) qui désigne un vaillant jeune homme ; « 马马虎虎 » (mǎma hūhū), « ni Cheval, ni Tigre », qui veut dire « comme ci comme ça » ; « 骑虎难下 » (qíhǔ nánxià), « il est ardu de descendre [du dos] d’un Tigre », ce qui signifie qu’il est difficile d’abandonner en cours de route ; ou encore « 纸老虎 » (zhǐ lǎohǔ), littéralement un « Tigre de papier », terme popularisé en Occident par Mao en 1956, lorsqu’il a qualifié Tchang Kaï-chek et les États-Unis de menaçants, mais en réalité inoffensifs. Le Tigre est également souvent associé à son ami Dragon dans des proverbes, tel que « 卧虎藏龙 » (wòhǔ cánglóng), qui désigne des personnes aux talents cachés. C’est d’ailleurs le titre du très populaire film d’action « Tigre et Dragon » du réalisateur taïwanais Ang Lee.

Parmi les célèbres natifs du Tigre, on trouve le premier empereur Qin Shi Huang, qui a unifié la Chine ; l’astronome Zhang Heng, qui a inventé le sismoscope il y a 2000 ans ; Li Shizhen, médecin, herboriste à l’origine du « Compendium of Materia Medica », ouvrage qui recense toutes les plantes médicinales utilisées en médecine traditionnelle chinoise ; Karl Marx, l’auteur du ‘Manifeste du Parti communiste’ (1818) ; Sun Yat-sen, le « père fondateur » de la République de Chine (1866) ; le « petit père des peuples » Joseph Staline (1878) ; le Général de Gaulle (1890), qui a reconnu diplomatiquement la Chine en 1964 ; le Président de la RPC entre 1993 et 2003, Jiang Zemin (1926) ; le fondateur de (l’ex) leader du soutien scolaire New Oriental, Yu Minhong (1962) ; le directeur du bureau général du Comité Central du Parti (centre névralgique du PCC) et membre du Politburo Ding Xuexiang (1962) ; l’acteur Wu Jing (1974), connu pour son rôle dans le film patriotique « Wolf Warrior II » ; ou encore la comédienne Yang Mi (1986)…

Mais ce sont d’autres genres de « tigres » qui sont paradés sur les écrans ces temps-ci. Dans un mini-documentaire de 5 épisodes, prénommé « tolérance zéro » (零容忍) (à ne pas confondre avec la stratégie « zéro Covid » dynamique), on retrouve au casting : Sun Lijun, ancien vice-ministre de la sécurité publique, Fu Zhenghua, ex-ministre de la justice, Zhou Jiangyong, ex-secrétaire de Hangzhou, ou encore Hu Huaibang, ex-président de la China Development Bank

Tous sont des hauts dirigeants qui ont été arrêtés pour « corruption », une accusation « fourre-tout » qui cache souvent des « fautes » politiques. Il n’empêche, les révélations ne manquent pas de piment : 300 000 dollars cachés dans des boîtes de fruits de mer, un jardin privé de 3000 m², des dépenses astronomiques dans des jeux vidéo…

Cependant, les prestations des cadres lors de leurs confessions filmées n’ont pas été à la hauteur des attentes du public : pas de pleurs spontanés ni de tremblements dans la voix comme lors de la première saison en 2016 ! Au contraire, les corrompus auraient conservé un air arrogant malgré leurs lourdes sentences. « Regardez comme ils ont l’air heureux… On ne dirait pas les confessions de criminels, mais une interview télévisée des hommes les plus prospères », écrit un internaute, soupçonnant un traitement de faveur en prison. Un autre s’interroge sur l’objectif de ce « documentaire » : n’est-il pas censé décourager la corruption plutôt que l’encourager en étalant en détail les magouilles et le train de vie des cadres corrompus ?

Si ces réactions du public ne sont pas exactement celles espérées par la commission centrale d’inspection de la discipline (CCID), cela ne viendra pas gâcher le 10ème anniversaire de la campagne anti-corruption. Le tableau de chasse est impressionnant : en une décennie, 4,4 millions de cadres (environ 5% des membres du Parti) ont été mis sous enquête, dont 484 dirigeants du gouvernement central. « Peu importe qui vous êtes, nous serons sans merci », a déclaré le Président Xi Jinping lors du 6ème Plenum du 19ème Congrès de la CCID (18 au 20 janvier). Néanmoins, « il reste un long chemin à parcourir avant d’éradiquer complètement la corruption », a reconnu le leader chinois. De là à conclure que la corruption est endémique ?

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