Il est rare de voir le GPS rendu obligatoire. C’est pourtant le cas à Bayingol (Xinjiang). D’ici le 30 juin, tout véhicule devra être connecté au réseau Beidou – le système chinois- pour permettre à la police de localiser tout véhicule dans ce district. L’étrange règlement intervient au milieu d’une sévère dégradation sécuritaire au Xinjiang, territoire ouighour cramponné à ses rêves de sécession et pour certains, de « Califat » sur l’Asie Centrale. En décembre à Karakax, un attentat au couteau faisait 5 morts, dont les 3 assaillants. Le 14 février sur le district de Pishan, un assaut à l’aveugle sur une foule Han (chinoise) faisait 8 morts, dont les 3 kamikazes. Sans attendre, une répression sans état d’âme suivait. Des appels à délation promettaient jusqu’à 5 millions de ¥ pour la « neutralisation » de terroristes, 2000 ¥ pour la dénonciation de femmes voilées et d’hommes portant longue barbe. Depuis le 28 février, 10.000 soldats sillonnent Urumqi, Hotan, Kashgar et Aksu, appuyés par blindés, camions et 18 avions ou hélicoptères. « Noyez les corps des terroristes et des gangsters dans la vaste mer de la guerre populaire», adjure Chen Quanguo, Secrétaire du Parti au Xinjiang, sur le site officiel Tianshan.net.
Suivant une analyse plus fine, ces excès semblent perpétuer une spirale de violences. Plus que son prédécesseur, Chen pratique la tolérance zéro, convaincu de la justesse de ce choix. En juin 2016, juste avant le début du Ramadan, tout Ouighour désirant un passeport, devait se soumettre à un test ADN. En octobre, Chen ordonnait aux citoyens de l’ethnie de rendre ces passeports « pour examen » et de signaler les parents envoyant leurs enfants à la mosquée en cours du soir. En janvier, il faisait resserrer les contrôles aux frontières. Il faut dire que le Xinjiang, immense territoire, jouxte avec 8 pays dont 6 islamiques. Des centaines de Ouighours ont notoirement émigré pour s’enrôler sous la bannière noire de l’Etat islamique.
Ces vexations, cependant, risquent de révolter ces populations fières de leur identité. Le 27 février, une vidéo d’une demi-heure apparaissait sur internet, en ouighour, faisant allégeance à Daesh, et menaçant de « retourner (au Xinjiang) verser le sang comme rivière ».
Pourquoi ce raidissement côté chinois ? D’abord parce que par héritage historique révolutionnaire, le Parti apprécie chez ses leaders une fermeté sans faille dans leurs opérations de pacification. Cette sensibilité politique n’est jamais remise en cause. Il se peut-même qu’elle se trouve exacerbée par l’imminence du XIX Congrès d’octobre. Chen Quanguo est en tout cas signalé comme en bonne position pour décrocher un siège très convoité parmi les 25 du Bureau Politique.
Sommaire N° 9 (2017) Spécial Deux Assemblées