Politique : Quatre dossiers brûlants

Corée du Nord  

Sujet diplomatiques du moment, le Pays du Matin Calme fut évoqué en marge de la session (7 mars) par Wang Yi, ministre des Affaires étrangères, suite aux lourdes sanctions de l’ONU dont il est frappé (à l’initiative sino-américaine) en rétorsion de ses récents essais nucléaires. Pékin applique pour l’instant ces sanctions destinées à forcer son voisin à revenir à la table des négociations.

Depuis mars, la Chine a cessé ses importations de charbon et ses transferts bancaires vers la Corée du Nord, et a déjà refoulé au moins trois cargos nord-coréens (dont le « Grand Karo » à Rizhao, Shandong). Mais Wang Yi le réaffirme, la manière forte voulue par Washington ne marchera pas. Pyongyang est trop immergée dans sa vision autiste d’elle-même pour reculer, et n’a rien à perdre. Si la situation devient incontrôlable, la Chine « ne restera pas les bras croisés ». Son souci s’est renforcé suite aux manœuvres USA-Corée du Sud (7 mars, 315.000 hommes), et au projet d’installation anti-missile américaine THAAD en Corée du Sud. Quoique d’accord avec B. Obama sur l’objectif de dénucléarisation de la péninsule, Pékin est en désaccord avec les méthodes, s’inquiète et ne contrôle rien.

Libérations discrètes ! 

L’Assemblée bruissait de la rumeur : Chen Taihe, l’avocat arrêté en juillet 2015 (avec 200 collègues de son cabinet) pour avoir réclamé la création d’un jury d’assises, a été libéré, envoyé rejoindre sa femme à San Francisco. Ainsi se concluait un incident de l’an passé.

Deux des cinq libraires hongkongais disparus depuis des mois, sont réapparus sur le Rocher. Mais c’était seulement pour repasser chez eux dire que « tout allait bien », puis à la police, lui demander de lever l’enquête sur leur disparition, avant de refranchir la frontière chinoise… En dépit de leurs dénégations, il apparaît toujours aussi invraisemblable que la saga dont ils font l’objet, se déroule de leur plein gré. D’autant qu’un des cinq libraires (qui lui, n’est pas retourné au pays) est passible d’une sérieuse peine d’emprisonnement.
Cette crise n’apparaît donc pas prête à se dénouer. Quelle que soit son issue future, le principe gérant les relations entre Hong Kong et sa maison-mère, « un pays, deux systèmes », risque d’en sortir assombri de brume…

Mer de Chine du Sud 

Réponse des Etats-Unis à l’installation chinoise de radars de défense (après celle d’aérodromes) sur au moins un atoll de la zone : un porte-avion, deux croiseurs, deux destroyers… cette armada de l’US-Navy traversa début mars la mer de Chine du Sud.Voilà qui met les deux pays d’accord sur un point au moins : cette mer se militarise vite. L’Inde et le Japon vont d’ailleurs se livrer à des manœuvres conjointes d’ici l’été. 

Ainsi, Luo Baoming, secrétaire du Parti de Hainan, à 300km des Paracels et 1000km des Spratleys, déclarait à l’ANP, subventionner les pêcheurs et leur gazole, pour leur permettre d’opérer autour de ces archipels, et de profiter d’une ressource halieutique qu’ils ne trouvent plus dans leurs propres eaux. Le gouvernement peut ainsi justifier d’une occupation « civile » et « coutumière » de ces eaux.

A la CCPPC, Han Fangming, propose de donner à l’île Woody (Yongxing en chinois) et à sa ville Sansha (créée en 2012), le statut de paradis fiscal, à la façon des Iles Vierges britanniques. Subtile, cette action attirerait des aventuriers chinois mais aussi étrangers, et les métiers liés à la finance – hôtels, banques, cabinet d’avocats… Seul obstacle : la géographie. Cette île de 1000 habitants, la plus grande des Paracels, ne fait que 2,13km². Mais une extension par dragage est sans doute possible… 

Budget militaire

Sous quels arguments Pékin a-t-il pu limiter la dotation de l’APL en 2016 à +7,6% (154 milliards de $) ? Mystère. De 2011 à 2015, l’armée n’avait jamais reçu moins de 10%. Le maintien de l’effort avait été réclamé au nom de la modernisation accélérée (balistique, aviation, marine, infanterie), du déploiement maritime, et de la mise en solde de 300.000 personnels, souvent gradés, que l’APL doit recaser ou compenser. 

Trois arguments ont pu jouer pour convaincre le Bureau Politique de tailler dans l’enveloppe kaki : 

– Xi Jinping n’a pas oublié qu’une part de l’armée a hésité à le soutenir en 2012, lors de la tentative de coup par Bo Xilai et Zhou Yongkang, 

– Trop dotée, l’APL est un foyer de corruption notoire. Wang Wu, contre-amiral (à la logistique de la flotte du Sud) et député, vient de quitter l’ANP, accusé de concussion.

– D’autres secteurs ont besoin d’argent : des pans entiers du PIB doivent être réaffectés en priorité à la relance, à la dotation de 200 millions de nouveaux citadins… 

La réaction des militaires à l’ANP est édifiante : suite à l’annonce de la hausse affaiblie, ils ont clamé leur mécontentement, donnant ainsi l’image d’une armée sûre de ses droits historiques, et finalement tout, sauf « grande Muette ».

Enfin, par amendement de l’ANP à la loi de défense, la police armée (武警, 650.000 hommes) aura plus de travail à l’avenir, et sera dirigée directement par la CMC (Commission Militaire Centrale), à savoir par Xi Jinping. Grande perdante : l’APL. Signe possible de doutes sur la loyauté de l’armée conventionnelle vis-à-vis du Chef de l’Etat…

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