Vous souhaitez réaliser un placement immobilier ? Vous avez 2,25 milliards de yuans à investir ? Devenez sans plus attendre le nouveau propriétaire de cet hôtel hors du commun , l’Intercontinental Wonderland, situé à 30km au sud-ouest de l’aéroport de Hongqiao à Shanghai.
Inauguré en novembre 2018 et conçu par la multinationale britannique d’ingénierie Atkins, l’édifice a été construit dans une ancienne carrière profonde de 88 mètres et a été nommé parmi les 10 merveilles architecturales du monde, avec deux étages immergés et deux autres au-dessus du niveau du sol.
D’après China Business News, son propriétaire, le promoteur immobilier Shimao, souhaiterait s’en séparer – une rumeur réfutée par l’intéressé. Cependant, fin janvier, le groupe a déjà cédé son hôtel Hyatt on the Bund au groupe Shanghai Real Estate, détenu par la municipalité, pour un montant de 4,5 milliards de yuans (708 millions de $).
Et cela ne sera pas la dernière transaction du genre : Shimao envisage de vendre 36 de ses propriétés d’une valeur de 77 milliards de yuans (12,2 milliards de $), dont 9 rien qu’à Shanghai. Parmi celles-là, la Shanghai Shimao Tower, qui abrite le siège régional du groupe, le Shimao International Plaza et le complexe résidentiel de Pucheng. Le parc « indoor » des Schtroumpfs, qui a ouvert ses portes en mai 2020, devrait être épargné…
Après s’être acquitté de ses dettes, le promoteur hongkongais pourrait ainsi récupérer 23, 6 milliards de yuans de liquidités. Fin décembre, le groupe a fait défaut sur une échéance de 645 millions de yuans (101 millions de $), ce qui a conduit l’agence de notation S&P à rétrograder sa note à BB+. Le passif total du promoteur s’éléverait à 4700 miliards de yuans.
Ces cessions en série sont la conséquence directe des « trois lignes rouges » imposées par l’État en 2020 pour limiter le taux d’endettement galopant des promoteurs. Si Evergrande en est la victime la plus médiatisée, d’autres promoteurs moins connus, tels que Shimao, sont également à la peine et cherchent à se délester rapidement de leurs actifs. Mais si les cessions se multiplient ces dernières semaines, c’est parce que l’Etat a promis d’assouplir l’accès au crédit pour les promoteurs « bons élèves ».
Dans la plupart des cas, les repreneurs sont des conglomérats publics, appelés à la rescousse par l’État pour stabiliser le marché immobilier, rassurer les investisseurs et renforcer son contrôle sur ce secteur qui représente un quart de l’économie chinoise. Cette « nationalisation » du secteur immobilier est la réponse apportée par l’État à une crise qu’il a lui-même provoquée.
Mais il y a tellement d’actifs dévalorisés sur le marché, les mastodontes d’Etat pourront-ils tout absorber ? Actuellement, parmi les 30 premiers promoteurs du pays, les actifs détenus par les firmes publiques, généralement moins endettées que leurs concurrents du privé, représentent 6200 milliards de yuans, soit seulement 48% de ceux des développeurs privés. Pékin a-t-il vu trop gros ?
Sommaire N° 7 (2022)