Politique : L’anti-corruption repart de plus belle

L’anti-corruption repart de plus belle

« Même si l’anti-corruption a marqué plusieurs victoires en 2020, la corruption reste la plus grande menace à la gouvernance du Parti ». C’est en ces termes que le Président Xi Jinping s’est adressé à 130 cadres lors de l’assemblée plénière de la Commission centrale de l’inspection de la discipline (CCID) le 22 janvier à l’hôtel Jingxi (Pékin). Signe de l’importance de l’évènement, les six autres membres du Comité permanent ont également assisté à la réunion. La veille, la CCTV lançait un programme en quatre épisodes, retraçant les parcours de 16 grands corrompus et détaillant leurs vices.

De fait, 2020 a été un bon cru pour l’anti-corruption : la CCID se targue d’avoir attrapé dans ses filets 32 cadres de niveau provincial ou ministériel, ramené 1 229 fugitifs de l’étranger, récupéré 2,4 milliards de yuans de fonds détournés, et sanctionné 197.761 cadres pour avoir violé les règles de frugalité.

Entrant dans sa neuvième année, la croisade anti-corruption de Xi Jinping n’a plus tellement comme objectif premier de purger ses rivaux pour consolider son pouvoir, mais plutôt d’éviter que des scandales de corruption ne viennent menacer la sacro-sainte « sécurité nationale ». Cette année, la CCID devra redoubler d’efforts pour s’assurer que les cadres « n’osent, ne peuvent, et n’aient pas de désir de commettre des actes de corruption » (不敢腐、不能腐、不想腐), précise le communiqué.

Pour s’en assurer, trois cibles ont été désignées pour 2021 : les services de maintien de l’ordre et la justice (la fameuse campagne de « rectification » annoncée au printemps dernier) ; les entreprises d’État et les projets d’infrastructures ; ainsi que le secteur de la finance. « Nous devons nous concentrer sur les cas de corruption où les problèmes politiques et économiques sont liés », ajoute le communiqué.

C’est donc sous cette lumière qu’il faut voir la condamnation à mort le 5 janvier de Lai Xiaomin (cf photo), ancien président de l’une des grandes sociétés de gestion d’actifs contrôlées par l’Etat, China Huarong Asset Management. Qualifié « d’ennemi au sein du système financier », il aurait accepté pour 1,8 milliard de yuans de pots-de-vin et entretenu plus de 100 maitresses. La rumeur voudrait que pour éviter la peine capitale, les enquêteurs aient exigé de Lai Xiaomin sa pleine coopération et qu’il dénonce tous ses complices. Mal lui en a pris, puisqu’il a tout de même été exécuté le 29 janvier, un peu plus de trois semaines après sa condamnation… Pour éviter de tels scandales à l’avenir, le gouvernement envisagerait d’ailleurs de créer une « holding » dirigée par un cadre au rang de vice-ministre, pour superviser les quatre structures de défaisance (China Orient Asset Management, China Cinda Asset Management, China Great Wall Asset Management et China Huarong Asset Management) créées en 1999 pour soulager les plus grandes banques d’État (« les quatre sœurs ») de leurs actifs faillis. C’est également le sort réservé à Ant Group, filiale d’Alibaba, qui devrait être transformé en « holding financière » supervisée par la Banque Centrale.

Le 7 janvier, c’est Hu Huaibang, ancien président de la China Development Bankl’une des trois banques de développement du pays, qui finance notamment nombre de projets de l’initiative Ceinture et Route (BRI)– qui écopait de la prison à vie pour avoir « seulement » empoché 85,5 millions de yuans.

Si les punitions sont si sévères, c’est pour faire d’eux des exemples pour tous les dirigeants à la tête d’entités publiques financières. Pourtant, ce n’est pas nécessairement cette « corruption de haut vol », de certains bureaucrates mal intentionnés, qui empoisonne la vie de la population, mais plutôt la « corruption ordinaire », tel ce cadre d’un village qui détourne les fonds dédiés à la lutte contre la pauvreté, ou encore ce proviseur qui se fait corrompre par des familles influentes… Pas aussi médiatisée, elle est tout aussi nocive. 

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