En 2016, le Parti Communiste Chinois (PCC) a franchi la barre des 90 millions de membres. Le PCC est la deuxième formation politique au monde, derrière le parti nationaliste indien (BJP). Mais depuis son arrivée au pouvoir en 2012, Xi Jinping, le 1er Secrétaire, tente d’inverser la courbe et de réduire le recrutement : dès 2016, les candidatures baissaient de 10%.
D’après The Economist, Xi Jinping entend favoriser une relève de « qualité plutôt que de volume » et ayant des valeurs. Un recruteur pékinois exprime la nouvelle priorité : « un gouvernement rempli de membres parasites, va à sa perte ».
Pour réduire des demandes, diverses méthodes ont été appliquées. Le PCC a d’abord remis en vigueur une règle négligée ces dernières années : le versement par les membres de Parti 2% de leur salaire. Des cellules en universités imposent en outre aux candidats un examen d’histoire et un autre sur la constitution. D’autres durcissent les règles en ne tolérant qu’une session—en cas d’échec, on perd toute chance d’entrer au Parti.
La plupart des centres imposent une lettre de motivation énergique et convaincue. Puis le candidat doit suivre des sessions de formation politique de week-end et rendre tous les deux mois pendant deux ans un essai sociétal ou philosophique.
S’inquiétant du recul de la condition physique de ses membres, certaines cellules remplacent les sessions d’étude par des tours de stade. Le principe rappelle la maxime latine « mens sana corpore sano » (un esprit sain dans un corps sain), mais il sert aussi la campagne anti-corruption – l’effort doit endurcir le candidat contre les tentations. Toutes ces règles ont permis en 2016 d’écarter 10 candidats sur 11 et de limiter les admissions à +0,8%, la plus faible croissance en des décennies.
Rapporté à la population adulte du pays, on compte un membre du PCC sur douze. Cet immense volume illustre le choix de renforcer la crédibilité d’un système politique où les urnes ne jouent qu’un rôle marginal. L’immense majorité des membres n’ont pas de fonction dirigeante—mais ils servent, sur le terrain, à identifier les dissidents, les conflits qui couvent. Ils sont aussi utiles pour véhiculer la campagne ou le slogan du moment. Tous les membres du PCC doivent être un soutien au « rêve de Chine », aider à la renaissance de la nation…
Après 20 ans d’âge d’or, le contingent des étudiants se retrouve à nouveau réduit à la portion congrue. En 1990, ils avaient été punis pour leur participation au « Printemps de Pékin » de mai-juin 1989, et n’avaient plus constitué que 2% des admis. Mais en 2012, les portes leur étaient grandes ouvertes : ils occupaient 40% des nouvelles entrées. Le beau sexe surtout, avait la part belle, avec 40% (aussi) des admissions. Le Parti tentait de rattraper des décennies de recrutement masculin, qui font qu’en 2016, malgré ces efforts, les femmes ne représentent que 25% des membres.
Dans une université non précisée par The Economist, un sondage de 2015 dévoile que la 1ère motivation des candidats est l’espoir, une fois membre, d’accéder aux emplois dans l’administration, notoirement réservés aux cadres du Parti. Seuls 17% des candidats justifient leur projet de devenir communiste par le désir de « servir le peuple » (为人民服务, wèi rénmín fúwù). Et seuls 25% tiennent « énormément » à voir leur candidature acceptée – les autres n’ont fait cette démarche que par opportunisme. Le même sondage suggère que ces étudiants ne se font pas d’illusion : ceux qui ont les meilleures notes aux examens seront recrutés, les autres n’étant pris qu’en complément, suivant le quota.
La réforme des admissions correspond donc, au fond, à une tentative de ranimer la foi parmi les membres d’un Parti qui se veut l’élite du peuple, et détacher la jeunesse de son matérialisme.
Toutefois, cette réduction des admissions de jeunes éduqués, risque de briser la démarche menée depuis Jiang Zemin, qui visait à rajeunir et diversifier le Parti (notamment en intégrant plus d’hommes d’affaires).
Ainsi lors du renouvellement du Comité Central en octobre 2017, l’âge moyen a augmenté (à 57 ans) pour atteindre un record depuis des décennies.
Alors pourquoi cet effort pour limiter les admissions ? La clé de l’énigme se trouve sans doute dans la donnée de départ, la masse existante des 90 millions de membres. Traditionnellement, les vieux camarades ne rendent jamais leur carte – par peur d’une critique de déviationnisme et de compromettre la carrière de leurs enfants. Mais en se maintenant dans l’appareil, ils constituent une masse conservatrice qui étouffe les appels des jeunes à la modernisation.
En 2013, un théoricien conscient du problème, avait proposé une solution : aiguiller les membres les plus âgées vers des « clubs émérites », honorifiques, qui pourraient accueillir jusqu’au tiers du nombre des membres. Après débat interne, la solution a été écartée : elle risquait de susciter un appel à une réforme politique à laquelle les leaders, notamment le club des grandes familles historiques n’était pas prêt.
Le Parti a donc opté pour une solution plus « naturelle » : réduire le nombre des membres par les décès, en remplaçant au minium les disparus. Une solution de « réduction » des effectifs, plutôt qu’une cure de jouvence.
1 Commentaire
severy
14 décembre 2017 à 17:55Peut-être qu’une augmentation sensible du montant des cotisations ferait refluer le nombre des candidats au PCC…