■ Quoique sans ambassades depuis 1951, Pékin et le Vatican vont échanger en 2018 des expositions : 40 pièces de la Renaissance partiront du Musée Pontifical Anima Mundi, qui lui recevra 40 pièces du Trésor de la Cité Interdite. Chaque expo inclura aussi un tableau signé Zhang Yan, offerts en mai par Xi Jinping au pape François. Qu’on ne s’y trompe pas, ces expositions n’annoncent pas la reconnaissance réciproque des ces deux piliers idéologiques et spirituels. Elles sont programmées faute pouvoir conclure les négociations. Pas prête, paralysée par ses contradictions internes, la Chine de Xi prie l’église catholique de prendre son mal en patience…
■ Turbulences pour le milliardaire Wang Jianlin, fondateur du groupe Wanda. Après avoir conclu une promesse de vente de 73 de ses hôtels en Chine à Guangzhou R&F (Fuli) et 13 de ses parcs à thème à Sunac, pour un total de 9,6 milliards de $, Wanda se déclare prêt à étudier « toute offre commerciale » pour sa branche hôtelière à l’étranger (R-U, USA et Australie). Cela fait suite à l’interdiction bancaire édictée par Xi en juin 2017, marquant ainsi la fin du flirt entre le régime et ses grands tycoons—pas seulement celui de Wanda, mais aussi ceux de HNA, Fosun et Anbang. Lentement étranglé, Wanda pourrait vendre ses hôtels, supermarchés, parcs à thèmes et cinémas. Le geste esquisse aussi la fin d’une ère du crédit facile. Wanda doit se recentrer sur son corps de métier : la construction.
■ En Corée du Nord du 17 au 20 novembre, l’émissaire chinois Song Tao, président du département international du PCC, n’a pas été reçu par Kim Jong-un, le jeune Père Ubu du petit régime enclavé. Pour Pékin, la rebuffade est d’autant plus choquante que le climat semblait s’alléger. La Chine reste un des rares pays à tenter de calmer l’humeur va-t-en-guerre de Trump. Refusant de traiter Pyongyang de « sponsor du terrorisme », la Chine prêche dans le désert ses appels au dialogue. Mais d’un autre côté, elle a accepté la dernière salve de sanctions contre le Pays du matin calme, ce qui pourrait être une raison du refus de Kim de recevoir Song Tao. Peut-être aussi ce pays très secret pâtit-il sous une chancellerie byzantine, aux procédures internes compliquées, comme d’un minuscule pays qui se voit grand…
En tout cas, un Song Tao stoïque a souligné à Choe Ryong-hae, vice-président du Parti des travailleurs, le besoin de « renforcer l’amitié traditionnelle ». Puis Pékin a critiqué Washington pour avoir sanctionné des firmes chinoises et nord-coréennes ayant commercé entre elles, en contravention aux dernières sanctions. Et si Air China suspend sa liaison Pékin-Pyongyang (22/11), ce n’est pas par représailles, mais par manque de clients—c’est l’hiver !
■ Voici enfin un homme dont on ne pleurera pas la chute : Lu Wei (cf photo, avec Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook) le flamboyant patron de l’administration de l’internet, chargé depuis 2013 des grands ciseaux du monde virtuel, de ce que les 731 millions d’internautes avaient le droit de voir, de dire ou de suivre sur la toile chinoise. Lu Wei, 57 ans, est accusé de « graves violations à la discipline » – de corruption. Côté cour, cet ancien chef de l’agence Xinhua énonçait en 2015 son crédo « la liberté sans ordre n’existe pas ». Mais côté jardin, cet homme très courtisé a dû avoir du mal à refuser les offres alléchantes des riches compagnies du web. Lu est remplacé par le très discret, Xu Lin, 54 ans, un allié de Xi Jinping. Cela dit, le filet de la censure n’est pas prêt de se desserrer : le 23 novembre voyait la disparition de Skype, fournisseur de téléphonie par internet, des portails de téléchargements en Chine. En 2017, l’App Store (Apple) a rayé de ses listes 674 VPN (virtual private network) jusqu’alors tolérés, qui eussent permis aux internautes de la « grande muraille virtuelle »…
Sommaire N° 38 (2017)