Editorial : XIX Congrès, c’est parti !

Suite à la mise sous cloche policière de Pékin ce dernier mois, le XIX ème Congrès s’annonçait porteur d’un vent «révolutionnaire»: le discours du Président Xi Jinping a confirmé la tendance, mais aussi surpris le monde par un nombre d’ouvertures et mains tendues.
Certes, d’entrée, Xi donne fièrement le ton : la Chine serait un « Etat socialiste de dictature démocratique populaire, dirigé par la classe ouvrière, fondé sur l’alliance des ouvriers et des paysans ». C’est du Marx dans le texte —quoique cette société ait depuis 30 ans largement cédé aux sirènes capitalistes. Dans la même veine, le 1er Secrétaire annonce un raidissement sans précédent des contrôles sociaux, appuyé sur les big data : « nous instituerons un système de surveillance en tous domaines, sous la supervision unique du Parti, assurant le contrôle interne du Parti, la supervision démocratique, le contrôle judiciaire et la surveillance par les masses et l’opinion publique ».
Dans sa lutte sans merci contre la corruption, Xi ne semble souffrir d’aucun doute, jusqu’à pousser une boutade, rarissime lors de cet exercice devant 2300 édiles du Parti : que les cadres aux mœurs douteuses « se regardent dans leur miroir, rectifient leur tenue, prennent une douche et se soignent » ! Xi rappelle donc que la vaste et puissante campagne anticorruption va se poursuivre : à son bestiaire des fonctionnaires punis , aux « mouches » (les petits) et aux « tigres » (les grands), il ajoute le « renard », le cadre intermédiaire. Il prévient d’une lutte sans merci contre « sectarisme, culture du cercle, mœurs de quai et double jeu », et rappelle : « les problèmes criants d’impureté idéologique, d’organisation et de style de travail ne sont pas encore résolus ».

Pour autant, avec son retour à Mao, Xi Jinping tend la main à de multiples milieux, et annonce d’audacieuses réformes économiques et sociétales.
Aux paysans, il promet une réforme du droit du sol, pour renforcer leurs droits sur leurs terres.
Aux provinces, il promet l’intégration interrégionale comme moyen de briser les frontières internes et libérer les énergies enclavées. Priorité à « Jing-jin-ji », projet entre Pékin, Tianjin et Hebei, et au delta des Perles entre Guangdong, Shenzhen, Hong Kong et Macao.
Aux étrangers, il offre une ouverture sans précédent, d’accès au marché et d’égalité de traitement entre acteurs privés, publics et étrangers. Une ouverture qui va en parallèle avec la création de cellules du Parti dans ces firmes expatriées, mais cette « sinisation » accélérée des structures étrangères, va de pair avec la fin des discriminations, vieille demande jusqu’à présent insatisfaite des investisseurs extérieurs.
En protection de l’environnement, Xi promet d’accélérer décarbonisation, recyclage, et la coopération mondiale contre le réchauffement climatique.
Pour Taiwan, qui agace depuis 2016 avec l’arrivée aux affaires de l’indépendantiste Tsai Ing-wen, le ton a été modéré. Après une inévitable allusion au « combat ferme du Parti contre les forces sécessionnistes pour l’indépendance », Xi propose la paix des braves: « nous sommes du même sang… prêts à partager avec Taiwan d’abord nos opportunités de développement ».
Xi fait appel à la jeunesse : « nous ferons un grand effort dans la détection et constitution d’une réserve de jeunes cadres, sans oublier les femmes, les ethnies minoritaires et les non-communistes ». La tendance n’est pas nouvelle : le régime met de longue date grand soin pour attirer les cerveaux, de manière à pouvoir compter sur une équipe de brillants administrateurs. 

Pour conclure, Xi prévient que tels projets n’iront pas sans forte résistance : « le grand rajeunissement de la nation n’est pas une promenade au parc, ni une sérénade de gongs et de tambours. Pour réaliser le grand rêve, il faudra une grande bataille ». Un propos qui fait écho à celui de Mao, un demi-siècle en arrière : « la révolution n’est pas une partie de thé ».

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1 Commentaire
  1. severy

    En effet, Mao a prouvé que la révolution, c’était plutôt un jeu de massacre.

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