Une réforme de fond s’ébranle touchant aux statuts des Chinois comme des étrangers.
La mairie de Pékin vient d’abolir la classification de ses 2,9 millions de résidents entre « ruraux » ou « urbains » : d’ici fin 2017, il n’y aura plus sur le territoire de la capitale qu’une seule caisse de retraite, d’assurance sociale et qu’un seul tarif d’accès aux écoles.
Par ailleurs, le cadre des visas de travail pour étrangers va être refondu. Dès octobre, avec période transitoire jusqu’au 1er avril 2017, un seul type de permis de travail sera délivré (« experts » y compris). Pour le renouvellement, les expatriés recevront une note selon une série de critères : salaire, diplôme, ancienneté de résidence, aisance en mandarin, âge et lieu de travail – ici, les points sont supérieurs dans les régions pauvres, pour encourager les départs vers celles-ci.
Résultat : 85 points = groupe « A » (experts ou talents créatifs), à encourager. 60 points = « B » (secteurs prioritaires, management et ingénieurs), à limiter. Moins de 60 = « C » (basse qualification ou employés dans le secteur des services), à restreindre !
Cette mesure marque le retour (après sa disparition dans les années ‘90) du permis de résidence (居留证 jūliúzhèng). A part sa valeur de pièce d’identité à travers le pays, ce document n’ouvre aucun droit nouveau au résident étranger. Il apparaît plutôt lié à la volonté de plus en plus transparente du pouvoir de mieux contrôler sa communauté étrangère, pourtant en pourcentage très faible : selon Foreign HR, en 2015, en rajoutant 300.000 travailleurs illégaux sur visa de tourisme, aux 2 millions en situation légale, les étrangers représentent 0,17% de la population locale !
Néanmoins, à cette classification, bien des ombres demeurent : comment y situer les métiers ? Quelle note pour un cuisinier, un enseignant, un banquier ? Qu’adviendra-t-il aux travailleurs classés C, « à restreindre » ? Et si les « services » sont à « restreindre », comment satisfaire les besoins incompressibles de ce secteur en pleine croissance, nullement prête, selon bien des professionnels, à pouvoir se passer de l’expertise étrangère ?
En parallèle, ce système peut être en lien avec un mécanisme en cours de mise en place, visant à octroyer à chaque Chinois d’ici 2020, une « note morale » à partir de toutes les traces laissées par ce dernier sur internet, à la banque, à la police…
NB : Ce projet prolonge étrangement un rêve antique, taoïste d’évaluation de tout individu selon son comportement vertueux.
Sommaire N° 30-31