Le 5 septembre, sur la base de Jiuquan (Gansu), la PME iSpace (Pékin) lança sa SQX-1Z à propergol solide de 9,5m – première fusée privée commerciale. Dans la course avec des rivaux tels OneSpace ou LinkSpace, iSpace remportait ainsi la première manche.
Après 450 secondes, le lanceur largua à 108km du sol sur orbite basse 3 « cubesats » (micro-satellites) de 10 cm d’arête, 1,33 kg : deux destinés à des tests, le dernier à retourner sur Terre après freinage par parachute.
L’objectif était rempli : montrer la capacité d’iSpace à porter des satellites sur orbite, et sa maîtrise complète de l’opération depuis sa station au sol.
On ne s’en étonnera pas, l’armée (APL) soutient iSpace et ses rivaux, via la SASTIND, organe « civil » des industries de défense nationale. Peng Xiaobo, PDG d’iSpace fut directeur à l’Académie des technologies spatiale. C’était également la première fois que l’APL ouvrait à des groupes « privés » sa base de Jiuquan.
iSpace peut cependant se prévaloir d’un autre parrain, plus inattendu : Matrix Partners, le groupe californien de capital-risque qui assista à la naissance de nombre de groupes célèbres tel Google. MP organisa en juillet son appel de fonds pour 600 millions de yuans, couvert sans difficulté.
Fort de ce succès, iSpace poursuit désormais son agenda à vitesse « d’une fusée »: il passe à la production en chaîne de sa fusée SQX-1, pour débuter début 2019 les lancements commerciaux. Promettant de porter des charges de 300kg en orbite basse et 100kg en géostationnaire, il revendique déjà quatre commandes fermes.
Pour 2020, à l’en croire, son SQX-3 à 9 tuyères à propergol liquide, permettrait des charges utiles quadruplées. Il serait réutilisable – comme le Falcon-9 de SpaceX (d’Elon Musk) – et un modèle déjà testé de LinkSpace.
Avec le soutien de l’Etat, le marché local voit naître une foison de constructeurs, opérateurs et centres de recherche satellitaires, tous acheteurs potentiels de services orbitaux.
L’objectif de l’Etat est bien sûr d’émuler les groupes d’Outre Pacifique comme SpaceX. Mais il s’agit aussi de s’inspirer du même modèle pour générer la concurrence en Chine, baisser les coûts et stimuler l’innovation, y compris dans le domaine de l’Intelligence Artificielle (IA), présente à toutes les étapes de création des lanceurs et satellites.
Cela dit, on devine un tendon d’Achille à cette stratégie : dans le spatial privé chinois, les investissements spéculatifs dépassent probablement les besoins du marché. Ils laissent présager l’explosion d’une bulle de surcapacités à court terme.
Sommaire N° 29-30 (2018)