Synutra, laiterie chinoise (Qingdao), n’a pas fait son beurre en France. Ce n’est pas faute d’avoir mis le prix, 170 millions d’€ à Carhaix (Finistère) en 2016 pour la plus grande usine d’Europe de poudre de lait maternisé – 38.000m², d’une capacité de 100.000 tonnes. Sodiaal, troisième coopérative européenne devait fournir le lait frais (28.8000 tonnes par an).
Hélas, Carhaix n’a pas tenu ses promesses. Tout d’abord, le procédé complexe –par craquage moléculaire– n’ayant jamais été appliqué à telle échelle, la mise au point a tardé. Devenu plus cher qu’escompté, le produit s’est mal vendu en Chine, où la concurrence (notamment néo-zélandaise) s’était entre temps multipliée.
Depuis septembre 2017, Synutra prenait à peine la moitié des volumes contractés, et ne payait plus Sodiaal qu’irrégulièrement. Fin août, ses dettes atteignaient 38 millions d’€, forçant le partenaire français à faire procéder par voie d’huissiers à des saisies conservatoires. Enfin, Synutra aggravait son cas en ne dialoguant pas avec son personnel,qui ne manqua pas de critiquer ses entorses au droit du travail.
Aujourd’hui, les deux groupes négocient la reprise par Sodiaal des unités productives, ne laissant plus à Synutra que le mélange et l’emballage. Pour Sodiaal en fait, l’affaire a tout l’air d’un marché en or : il hérite d’une unité prête à l’emploi, gagnant « 3 à 4 ans » sur ses plans d’expansion. Et il le fait à bon compte, convertissant ses créances en parts d’usine.
300 km plus loin, à Méautis dans la Manche, Synutra mettait un terme le 31 août au contrat de livraison qui le liait pour 11 ans avec MLC (Maîtres Laitiers du Cotentin). Le groupe normand avait investi 114 millions d’euros dans cette usine, ouverte en juin 2017 et consacrée à l’emballage de lait UHL en briquettes pour le marché chinois.
Cependant, tout laitier chinois en France, ne va forcément pas mal : en témoigne la coopérative Isigny-Sainte-Mère (Calvados) et son partenaire H&H (anciennement Biostime) dont l’unité de lait maternisé, inaugurée en juin 2015 pour 65 millions d’euros, sature.
Une seconde usine devrait sortir de terre d’ici 2020, d’une capacité de 25.000 tonnes par an. Alors que la Chine s’apprête à mettre un terme au contrôle des naissances, le lait infantile en poudre semble avoir de beaux jours devant lui !
1 Commentaire
severy
14 septembre 2018 à 13:27Avec le réchauffement climatique, on ne peut plus guère espérer que des mammelles débridées de la production industrielle franco-chinoise ne sorte que du lait en poudre.