Agriculture : Le cannabis est d’origine chinoise !

Le cannabis est d’origine chinoise !

On a longtemps cru que le chanvre (Cannabis sativa) avait été domestiqué en Asie centrale. Faux !

En analysant des plantes de cette espèce en provenance du monde entier, des scientifiques viennent de démontrer que le chanvre a été domestiqué voici 12 000 ans en Chine.

L’étude, publiée mi-juillet, menée par une équipe internationale de chercheurs coordonnée par le Dr. Luca Fumagalli de l’Université de Lausanne, explique que, par rapport à d’autres cultures, celle du chanvre a largement été sous-étudiée, du fait des restrictions réglementaires appliquées à l’espèce par de nombreux pays.

Ces travaux ont consisté dans l’examen comparatif de 110 génomes de chanvre couvrant l’ensemble de la diversité génétique historique et moderne de l’espèce : types sauvages, à fibres, médicinaux et psychotropes, variétés cultivées et plantes férales.

Leurs analyses démontrent que tous les types actuels de cannabis dérivent d’un événement unique de domestication survenu en Asie de l’Est. D’ailleurs les chanvres sauvages que l’on trouve aujourd’hui en Chine sont les descendants les plus proches du pool génétique ancestral dont sont dérivés les types à fibres et ceux à marijuana.

Elles prouvent aussi que le cannabis a été cultivé pendant des millénaires par les paysans chinois comme une plante multifonctionnelle à la fois pour ses fibres textiles, pour son grain et son huile alimentaire, ses propriétés médicinales et récréationnelles (ces dernières ayant été, très tôt, intégrées dans divers rituels religieux), et cela surtout en Chine du Nord, la Chine du Sud cultivant une autre fibre végétale indigène, la ramie (Boehmaria nivea).

Ce n’est qu’il y a environ 4000 ans que des variétés spécialisées ont été sélectionnées, soit pour une production plus importante de fibres, soit pour une teneur accrue en cannabinoïdes ; les types à fibres sont alors devenus plus hauts et peu branchus, tandis que les types utilisés comme marijuana (大麻, ) ont été orientés vers des ports plus ramassés, branchus, aux hampes florales plus riches en fleurs afin d’augmenter la production de résine.

Ces résultats sont en cohérence avec les premières traces archéologiques de chanvre découvertes à ce jour en Chine dans le site néolithique de Xiarendong daté de 8000 av. J.-C., situé dans le Jiangxi. Ils expliquent que le Shénnóng běncǎo jīng (神农本草经), le Classique de la matière médicale du Laboureur Céleste, plus ancien ouvrage chinois traitant des drogues végétales, animales et minérales attribuée au légendaire empereur Shennong (circa 2800 av. J.-C,) cite le cannabis, et que Confucius (551-479 av. J.-C.) évoque l’espèce comme une des cinq principales cultures de la Chine à son époque dans son Classique des Rites ou Liji.

Aujourd’hui, la Chine produirait la moitié du chanvre mondial. Sa culture est officiellement autorisée dans trois provinces (Yunnan, Heilongjiang et Jilin) à des fins textiles, industrielles et de papeterie. Au total, le secteur pèserait 1,5 milliard de $, majoritairement tourné vers l’export (Europe et Amérique du Nord). 

Pour le reste, le cannabis est considéré par la Chine comme un dangereux narcotique depuis 1985, et son trafic peut être puni de la peine de mort. Une tolérance zéro héritée des guerres de l’opium (1839-1842 et 1856-1860) et des ravages causés par cette drogue au XIXème siècle.

Afin de prévenir toute attitude laxiste à l’égard des drogues chez les jeunes consommateurs chinois, mais également tout détournement de la chaîne d’approvisionnement, Pékin vient également d’interdire en juin tout dérivé du cannabis (dont le cannabidiol, CBD) dans les cosmétiques, et ce, malgré le boom des produits de beauté issus d’ingrédients naturels, en Chine et dans le reste du monde. Les huiles et crèmes à base de CBD vivent donc leurs dernières heures sur les plateformes de e-commerce (cf capture d’écran) !

Par Alain P.  Bonjean

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