L’accord qui s’esquissait en janvier entre le Vatican et Pékin, n’a pas eu lieu. Le concordat annoncé par les deux parties reposait sur un rapport personnel entre Xi Jinping et le Pape François, qui cultivait cette relation depuis son élection en mars 2013. Mais des résistances de part et d’autre, ont fait reporter le deal.
Côté église de l’ombre, soutenue par le cardinal Joseph Zen de Hong Kong, on redoute que l’accord n’aboutisse à une mise au pas, approuvée par Rome : les églises au foyer refusant toujours la mainmise du Parti sur leur vie spirituelle.
Côté église officielle, la structure mise en place à partir de 1949 (l’Association patriotique des catholiques chinois) n’est nullement prête à céder quelque assouplissement que ce soit à ses privilèges et prérogatives, sur les 12 millions de fidèles estimés, dont 30% à 50% « officiels ».
Signe parlant, fin mars, Vincent Guo Xijin, évêque de Mindong (Fujian, église de l’ombre), disparaissait 24h, au moment où il devait se retirer sur demande du Pape, dans le cadre d’un accord projeté avec Pékin sur la quinzaine de prélats nommés par un bord et non reconnus par l’autre…
Cui Tai, évêque de Xuanshua (Hebei) a été enlevé mi-avril, et n’est pas ressorti. Depuis 2018, une nouvelle loi punit les paroisses organisant messes, processions, repas publics, sans permis, ou acceptant les dons de l’étranger. Le Henan bannit les moins de 18 ans dans les églises, et depuis 5 ans, à travers le pays, des milliers de croix ont été arrachées de lieux de cultes pas en règle…
En dépit de ces contraintes, le Pape fait contre mauvaise fortune bon cœur, et tente de reprendre la main : en interview, il déclare les pourparlers « en bonne voie », et les palabres « suivent le temps de Dieu» (fin mars, une équipe de diplomates chinois était signalée au Vatican). Conscient de la tendance dure qui règne dans un Parti aujourd’hui hostile aux concessions, le Pape « préfère prendre le risque du dialogue, à la certitude de défaite liée à son absence »…
En réalité, remarque l’ecclésiastique belge Jeroom Heyndrickx, fin connaisseur de la Chine, « le pape a dû composer avec son opposition interne, pour ne pas risquer la déchirure. D’autre part, l’accord visé est très limité, ne portant que sur la nomination des évêques », et non sur des questions aussi essentielles de la restitution des biens d’église, de la catéchèse, ou des lettres pastorales lues en chaire. « Pour arriver à une réconciliation complète, estime J. Heyndrickx, ce ne sont pas 1 à 2 ans qu’il faudra, mais 50 à 70 au bas mot » !
Sommaire N° 25 (2018)