(Lire le début) À Hong Kong, la jeunesse se braque au refus sourd de Pékin d’honorer sa promesse, inscrite dans le traité de dévolution, de leur octroyer le suffrage universel direct. Mais leur rébellion suscite une volonté de renforcement d’autoritarisme, et une dynamique de collision. C’était cette « bombe » que le Président Xi Jinping tentait de désamorcer par son comportement ambivalent, sourires d’une part, avertissements sans frais de l’autre, lors des festivités du 20ème anniversaire.
Xi Jinping était venu pour « tracer l’avenir de la cité », avec parfois de bons arguments. Une synergie apparaît plausible, dans la stratégie d’équipement de l’Asie du Sud-Est par le plan « une ceinture, une route – yī dài yī lù 一带一路 » (OBOR).
Pour réussir des investissements lourds d’équipement des pays de l’ASEAN, la Chine devra disposer d’une « connectivité » culturelle et technique, et d’une connaissance de ces pays, ce dont elle manque. Hong Kong au contraire s’y trouve bien implanté, y investissant depuis des décennies. Il faudra à la Chine une maîtrise des lois nationales, une familiarité avec les fournisseurs, contracteurs, banques et usagers de toutes ces régions, mosaïque d’ethnies et de religions. Hong Kong a donc la chance de s’imposer en maîtresse d’œuvre de ce « plan Marshall » chinois dans la région—à condition d’accepter de jouer les règles du jeu chinoises.
Aussi, la visite de Xi avait-t-elle été dessinée comme chance d’un nouveau départ, pour une réconciliation et la création de cette nécessaire synergie.
La crise de confiance entre la Chine et sa RAS reposait sur deux obstacles, l’un politique et l’autre administratif. Pour remettre la relation sur ses rails, Xi Jinping doit traiter l’un et l’autre :
– Zhang Dejiang, « patron » de Hong Kong au Comité Permanent et adversaire politique de Xi, est un ultraconservateur. Il a donc la sensibilité pour bloquer tout compromis de type libéral, et a un intérêt politique à exacerber l’affrontement. Mais Zhang partira à la retraite après le XIX. Congrès d’octobre ;
– d’autre part, Hong Kong, à plus de 2000km de Pékin, est ressenti, au sommet du pouvoir, comme « terre étrangère », et de ce fait, la RAS y manque d’interlocuteurs. Ainsi, bien des problèmes qui pourraient se régler par un simple rendez-vous ou coup de téléphone, ne le sont pas.
Clairement, la durée de ce séjour, trois jours, l’équivalent d’un voyage en Allemagne ou en France, a été calculée pour permettre d’entendre et prendre langue, notamment avec Carrie Lam, la nouvelle patronne de Hong Kong.
Ceci peut jeter les bases d’un rapport nouveau, avec pragmatisme, afin de sortir la relation de son actuel couloir d’échec. Mais est-ce possible, sans faire de compromis ? Toute l’ambiguïté de cette mission est là.
D’ailleurs, la population l’a bien compris : le 1er juillet, dès 15h, à peine Xi Jinping remonté dans son avion, 60.000 manifestants convergeaient, munis d’ombrelles, pour entamer leur marche traditionnelle à travers la ville, du parc Victoria vers Causeway Bay— histoire de faire passer leur propre message.
Sommaire N° 25 (2017)