Monde de l'entreprise : Wal-Mart, McDonald’s — demi-tour à 180°

Wal-Mart, McDonald’s — demi-tour à 180°

Après 7 ans de conjoncture à marée basse, deux géants américains de l’alimentaire, marquent un tournant à 180° dans leurs stratégies sur le marché chinois.

-McDonald’s en mars 2016, voulait inonder la Chine de nouveaux 1300 restaurants en 5 ans, soit 250 de plus par an, et avoir renforcé son parc de 50% en 2020.

Or, selon Reuters le 21 juin, le groupe aux arches d’or, vend ses 2800 enseignes en Chine, à Hong Kong et en Corée, et a reçu « plus de 6 offres » de groupes étrangers, tels Bain Capital, TPG et Carlyle (qui visent un rachat en JV), ou locaux tels Beijing Capital Agribusiness, Beijing Tourism ou ChemChina. Ce dernier reprend par ailleurs, pour le compte de la nation, le semencier suisse Syngenta pour 40 milliards de $.

D’une valeur de 3 milliards de dollars, la vente des 2800 restaurants comprend un contrat de franchise de 20 ans, offrant le droit d’exploitation des recettes, du logo, des locaux…

Ainsi, contrairement à ce que McDonald’s prétendait il y a encore trois mois, le groupe semble désormais vouloir réaliser son capital.

Mais quelles sont les raisons de ce revirement ? Peut-être suite à un retour d’hélice conjoncturel. Après 25 ans de présence chinoise, le n°1 mondial du fast-food a perdu l’attrait du neuf. Une concurrence locale l’a rejoint, aux produits similaires à prix cassés. Pour rester dans la course, McDonald’s réinvente de nouveaux produits, tels ces hamburgers colorés en rouge ou vert, selon les personnages du jeu vidéo « Angry birds » (cf photo).

De plus, la conjoncture pèse sur le budget des ménages, pouvant décourager le client.

Enfin, en 2014, le scandale du poulet gavé d’antibiotiques, que fournissait le partenaire chinois à McDo, lui a coûté pendant 20 mois, 30% de ses ventes

Mais la raison première ayant incité McDo à vendre ses avoirs asiatiques, semble bien être une réévaluation du modèle commercial. De notoriété publique, le groupe gagne plus comme franchiseur, qu’en exploitant en propre ses restaurants.

Mais la question sera de savoir si le repreneur saura rentabiliser son investissement. D’autant que le ministère de la Santé chinois lance un plan national pour inciter la population à manger, d’ici 2050, 2 fois moins de viande, et seulement 40 à 75 gr/jour…

walmart

Titulaire de 400 hypermarchés en Chine, Walmart surprend aussi en cédant pour 1,5 milliard de $, son site de ventes en ligne Yihaodian, à JD.com, le n°2 du e-commerce chinois, qui détient 20,1% du marché local.

Première anomalie : Walmart voyait en cette filière en ligne, son fer de lance d’avenir en Chine. Il avait racheté en 2011 la majorité d’Yihaodian (51%), et avait repris le reste en 2015, pour 760 millions de $.

Autre bizarrerie : il se fait payer non en cash, mais en parts de JD.com (5%) pour une valeur de 1,5 milliard de $. Ceci s’explique par les mauvaises affaires de JD.com en 2015, ayant subi 10 milliards de yuans de pertes (l’équivalent du rachat d’Yihaodian). Mais pourquoi avoir choisi ce repreneur, plutôt qu’Alibaba ou Hainan Airlines qui étaient tous deux aussi sur les rangs, et offraient du liquide?

Quelle que soit la raison, Wal-Mart se livre à un changement majeur de stratégie commerciale, qui reflète l’inconfort du groupe américain, face à cet l’outil de ventes par canal virtuel.

Wal-Mart n’avait commencé à s’intéresser au e-commerce qu’en 2007, en lançant sa première étude de faisabilité d’un site marchand sur internet. Il avait dès lors 10 ans de retard sur Alibaba, qui  écoulait déjà pour 6,56 milliards de $ sur le net, plus que Wal-Mart et Carrefour réunis.

En 2011, Wal-Mart sautait le pas, rachetant 51% de Yihaodian (Shang-hai). Mais bientôt, un désaccord surgissait entre les fondateurs de Yihaodian, persuadés du besoin d’investir à perte quelques années, et Walmart décidé à viser une profitabilité immédiate. Le différend causa le départ des fondateurs et le rachat en 2015 par Walmart de Yihaodian, qui périclitait rapidement, de 2,3% du marché en 2013 à 0,3% en 2015.

Ceci semble avoir contraint le groupe américain à « laisser aux locaux  les complications de l’internet chinois ». JD.com va intégrer les  250 centres de livraison de Yihaodian à ses 6000 propres points dans 2500 cantons du pays. JD.com va aussi bénéficier d’un savoir-faire en alimentaire, et étoffera son offre en produits importés, pour répondre à la demande en produits de meilleure qualité. Le partenariat va s’étendre aux Sam’s Clubs de Wal-Mart, enseigne réservée aux membres, dont JD.com proposera les produits en ligne.

Ainsi, Wal-Mart et JD.com espèrent une synergie pour mieux résister au géant Alibaba, qui truste 46,9% du marché (chiffre d’Euromonitor International)…

En tout cas, par ce deal encore difficile à décrypter, le groupe américain semble avoir mis deux fers au feu : si le commerce virtuel de l’alimentaire s’avère un modèle viable, il sera présent, avec un partenaire fort. Et dans le cas inverse, il se sera débarrassé à temps d’une infrastructure coûteuse et non profitable, faute d’économie d’échelle.

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