Le Vent de la Chine Numéro 22-23 (2021)
Alors que 10,8 millions de lycéens ont planché les 7 et 8 juin sur l’examen d’entrée à l’université, mieux connu sous le nom de Gaokao (高考), la jeunesse chinoise montre des signes de mal-être, frustrée de voir l’ascenseur social bloqué malgré ses efforts.
Cette situation a un nom : « l’involution » (内卷, nèi juǎn). Appliqué à la Chine d’aujourd’hui, ce terme désigne une société qui devient excessivement concurrentielle en raison de ressources limitées, qu’il s’agisse de places à l’université ou d’offres d’emploi. Ce concept est devenu populaire sur internet parmi les jeunes qui ont l’impression de devoir travailler ou étudier toujours plus dur pour obtenir le même emploi ou le même salaire. Un sentiment accentué par le ralentissement économique provoqué par la pandémie.
Lassés par cette « perpétuelle course sur place », certains jeunes issus de la génération Z (ceux nés entre 1995 et 2010) se révoltent silencieusement en « s’allongeant » (躺平, tǎng píng), nouveau terme à la mode. Sans se retirer complètement de la société, ils se contentent de faire le strict minimum, non pas par paresse ni par manque de qualifications, mais par refus d’être broyés par cette folle compétition qui les oppresse depuis leur plus jeune âge.
Ces jeunes « qui font la planche » renoncent donc à l’idée de trouver un travail (ou n’acceptent qu’un emploi à temps partiel ou des missions ponctuelles), de faire des heures supplémentaires, de prétendre à une promotion, de devenir entrepreneur, de faire du shopping, d’acheter une voiture ou un appartement, de se marier, et d’avoir des enfants. Ce faisant, ils privilégient leur santé mentale et leur tranquillité d’esprit, au détriment des attentes de la société.
C’est une manière indirecte de s’insurger contre les inégalités croissantes entre les classes sociales, les perspectives économiques moroses, un rythme de travail extrêmement soutenu (comme le « 996 »), une pression grandissante pour faire preuve de conformité idéologique, la censure médiatique, ou encore l’absence de syndicats indépendants…
Le mouvement trouve ses origines dans le témoignage d’un internaute ayant adopté un style de vie minimaliste, travaillant deux mois par an, vivant avec 200 yuans par mois et faisant deux repas par jour. Le récit de ce « Diogène des temps modernes » a fait mouche auprès de milliers d’étudiants et de jeunes actifs, qui y ont vu un échappatoire.
Même si le post original, publié en avril, a été supprimé par les censeurs, des copies de ce « Manifeste du ‘tangping-isme’ » ont fleuri sur la toile et ont alimenté de nombreuses discussions. Emblèmes de ce nouveau style de vie, des photos de chats endormis, de phoques couchés sur le dos, le personnage de BD « Pepe la grenouille », ou encore l’acteur Ge You, qui incarnait un simplet qui passe ses journées allongé sur son canapé, dans une série TV des années 90 (cf photo) … Selon un sondage publié sur Weibo, 61% des 241 000 répondants ont déclaré envisager de « s’allonger » à leur tour.
Cette forme de résistance passive inquiète l’élite chinoise – politiciens, milliardaires, intellectuels, personnalités publiques – qui perçoit cette philosophie comme une menace à ses intérêts et au grand rêve de « réjuvénation de la nation ». En effet, sur le long terme, cette attitude a le potentiel d’impacter négativement le pays, sa natalité, sa productivité, son niveau de consommation, sa croissance et l’entrainer dans le « piège du revenu intermédiaire »…
Sans surprise, la presse officielle est montée au créneau. Le Nanfang Daily a qualifié cette nouvelle philosophie de « honteuse », ajoutant que « la seule vie heureuse est celle où l’on travaille dur ». « C’est une attitude tout à fait irresponsable, qui déçoit non seulement les parents, mais aussi des centaines de millions de contribuables », a tonné Li Fengliang, professeur de la prestigieuse université Tsinghua (Pékin). Interrogé par un étudiant lors d’un show TV, l’un des présentateurs vedettes de la CCTV, Bai Yansong, a déclaré : « ma génération a davantage souffert que la vôtre, vos préoccupations sont plus ou moins une bénédiction (…) Peut-être que votre anxiété est tout simplement provoquée par votre oisiveté ? ». Des commentaires qui lui ont valu un torrent de critiques de la part des internautes. Volant à son secours, le rédacteur en chef du Global Times, Hu Xijin, a invoqué un fossé générationnel : les plus âgés considèrent que les jeunes d’aujourd’hui ont la belle vie comparée à la misère qu’ils ont connu sous Mao, et que leurs plaintes sont celles d’enfants gâtés…
Même s’il est difficile d’évaluer l’ampleur du phénomène et sa capacité à perdurer, le leadership aurait tort de considérer ce mouvement comme l’expression éphémère d’un ras-le-bol de quelques marginaux. Une chose est sûre : censurer et dénigrer cette jeunesse désillusionnée ne va pas résoudre le problème d’une société toute entière.
Au détour d’une rue piétonne au cœur de l’ancienne concession française de Shanghai, une foule se bouscule devant une « shikumen », maison traditionnelle en brique datant du début du XXème siècle.
C’est ici qu’un certain Mao Zedong se serait réuni avec douze autres protagonistes le 23 juillet 1921 pour tenir le premier Congrès national du Parti Communiste Chinois (PCC). Une réunion clandestine qui s’est finalement terminée une dizaine de jours plus tard sur un bateau, au Lac du Sud à Jiaxing dans le Zhejiang…
Après plusieurs mois de rénovation, le site du 1er Congrès du PCC a rouvert ses portes le 3 juin, en présence de Li Qiang, secrétaire du Parti de Shanghai. Chaque jour, 10 000 visiteurs s’y pressent pour découvrir 1 168 reliques historiques et photos d’époque relatant la fondation du PCC. Clou de la visite : les premières éditions traduites en chinois du « Manifeste du Parti communiste ».
À l’extérieur, les badauds font la queue pour se faire prendre en photo devant la plaque commémorative de l’évènement, déployant drapeau chinois et banderoles à la gloire du Parti, sous l’œil attentif de plusieurs policiers, prêts à intervenir au moindre débordement… Aucun incident ne doit venir troubler les célébrations du centenaire du PCC, dernière étape majeure avant le XXème Congrès du Parti à l’automne 2022, qui devrait avaliser un troisième mandat de cinq ans pour le Président Xi Jinping.
Cet engouement pour le « tourisme rouge » ne se limite pas à la ville qui a vu naître le Parti. À travers la Chine entière, les visiteurs convergent en masse vers ces « lieux sacrés », comme Yan’an (Shaanxi), base de repli de l’Armée Rouge après sa Longue Marche, Zunyi (Guizhou) site de la célèbre conférence de 1935 au cours de laquelle Mao a établi son autorité, Jinggangshan (Jiangxi), ville de 200 000 habitants célébrée comme le « berceau de la révolution », ou encore Shaoshan (Hunan), lieu de naissance du Grand Timonier.
À en croire les statistiques officielles, le nombre de touristes « rouges » aurait été multiplié par dix en quinze ans, surtout depuis l’arrivée au pouvoir fin 2012 de Xi Jinping, leader prônant un nationalisme décomplexé. Pour la seule année 2019, ces hauts lieux du communisme auraient reçu 1,41 milliard de visiteurs, c’est-à-dire l’équivalent de la population chinoise ! Et à l’approche du 100ème anniversaire du Parti, qui sera célébré le 1er juillet (et non pas le 23 juillet, car Mao ne se rappelait plus de la date précise vingt ans plus tard), plusieurs sites touristiques ont vu leur fréquentation tripler.
Parmi les visiteurs, des membres du Parti qui profitent de l’excursion pour jurer à nouveau fidélité au PCC, des retraités « mao-nostalgiques », des employés de firmes d’État et d’entreprises privées, ou encore des groupes d’élèves emmenés par leurs professeurs en « formation patriotique ». Même l’équipe nationale de football a dû effectuer un « pèlerinage rouge », en préparation des qualifications au Mondial 2022…
Même si les touristes affluent sur ces sites « rouges », c’est bien dans la capitale chinoise que se dérouleront les festivités le jour J. Dans un format rappelant les 70 ans de la République Populaire de Chine en 2019 – sans la parade militaire – Xi Jinping devrait prononcer un discours « majeur », décerner des médailles aux membres du Parti les plus méritants (héros de guerre, martyrs, scientifiques, diplomates, ouïghours…) avant qu’un défilé-spectacle n’ait lieu. Il a déjà été annoncé que les abords de la place Tiananmen seront inaccessibles une semaine avant… Surtout, ce 100ème anniversaire est l’occasion pour l’actuel Secrétaire général d’accentuer sa mainmise sur le Parti, de mettre en valeur ses succès personnels (victoire contre le virus, éradication de la grande pauvreté…), tout en reprenant à son compte l’incroyable transformation en un siècle d’un pays qui n’était que l’ombre de lui-même, à une superpuissance qui ambitionne de reprendre, coûte que coûte, la place qui lui revient sur la scène internationale.
Jusqu’à hier encore, « l’Empire du Milieu » aurait pu être surnommé « l’Empire des cryptos ». Fin 2016, 99% des transactions mondiales en bitcoin (比特币, bǐ
C’était avant que Pékin ne décide de bannir toute plateforme d’échanges et levées de fonds sur son territoire en 2017, préoccupé par le risque de blanchiment d’argent et de fuite des capitaux. Le gouvernement chinois n’est pourtant pas allé jusqu’à interdire la possession de crypto-devises, ni leur extraction. C’est en train de changer à vitesse grand V.
Le 18 mai, trois fédérations bancaires soutenues par le gouvernement, ont rappelé aux institutions financières qu’elles ont interdiction depuis 2013 de proposer à leurs clients tout service lié aux crypto-devises, qualifiées d’actifs « très spéculatifs ».
En réaction au krach mondial des cryptos mi-mai, en partie provoqué par le volte-face du fondateur de Tesla, Elon Musk, le vice-premier ministre Liu He s’est inquiété de la volatilité du bitcoin et consorts. Dans un communiqué conjoint avec le Conseil d’État, le dirigeant a déclaré le 21 mai qu’il faut « limiter la transmission de risques individuels à l’échelle de la société », préconisant de réprimer « échanges et activités de minage ».
Seul hic : la Chine réalise 65% du minage de bitcoins dans le monde. Cette activité, qui consiste à valider les transactions sur un réseau « blockchain » par un calcul mathématique, est extrêmement gourmande en électricité. Elle engloutirait déjà 1% de la production électrique chinoise. Le minage de cryptos est donc incompatible avec les ambitieux objectifs de neutralité carbone du pays, dont l’énergie provient encore majoritairement du charbon.
Dernière de la classe en matière environnementale et à nouveau ciblée par la campagne anti-corruption, la Mongolie-Intérieure tente de se rattraper en interdisant depuis fin avril le minage sur son sol, couplé à une promesse de sévères sanctions (mise sur liste noire, révocation de licence, voire de la prison…) à tous ceux qui viendraient contrevenir à cette interdiction, qu’ils soient des parcs industriels, des compagnies télécoms, des firmes internet, des cyber-cafés ou de simples « geeks »… Dans la ville de Baotou, une hotline a même été mise en place pour permettre aux habitants de dénoncer toute « ferme » clandestine ou déguisée en « data center ».
Au Sichuan, seconde terre d’accueil des fermes à bitcoin en Chine, les autorités sont plus mitigées… La province est plébiscitée par les mineurs qui y rachètent à bon prix le surplus électrique des barrages de la région, particulièrement abondant durant la saison des pluies. Après concertation avec les fournisseurs d’électricité début juin, le gouvernement provincial s’est simplement contenté de demander aux mineurs de faire leurs valises en septembre, après avoir profité une dernière fois de l’été…
Le Yunnan, autre province riche en énergie hydroélectrique et 4ème région préférée des mineurs chinois, n’a pas été aussi clément et leur a laissé jusqu’à la fin juin pour plier bagages.
Quelques jours plus tôt, le Qinghai, 9ème région chinoise pour le minage de cryptos, a également interdit cette activité, en guise de preuve de sa bonne volonté au lendemain de la visite d’inspection du Président Xi Jinping, fan de la technologie « blockchain », mais beaucoup moins des cryptos…
À présent, tous les regards se tournent vers le Xinjiang, région riche en charbon et qui héberge 36% de la puissance mondiale de calcul (le « hashrate »). Avec six autres provinces, le « Far-Est » chinois a été réprimandé par Pékin pour ne pas avoir réussi à atteindre ses objectifs de réduction de son intensité énergétique – un avertissement similaire à celui adressé à la Mongolie-Intérieure l’an passé… Si Urumqi adopte des mesures aussi strictes que Hohhot, les mineurs chinois n’auront nulle part où aller en « saison sèche » et n’auront d’autre choix que de délocaliser à l’étranger. Parmi les destinations envisagées, l’Amérique du Nord, l’Asie Centrale ou encore l’Europe de l’Est.
Tous ces signaux laissent entrevoir un consensus au sein de l’État pour mettre à la porte les mineurs de bitcoin, laissant l’initiative aux provinces, du moins pour l’instant… Pékin pourrait être tenté de faire place nette avant la mise en circulation de sa propre monnaie numérique souveraine, sur laquelle travaille la Banque Centrale chinoise depuis 2014. Même si aucune date officielle de lancement n’a été donnée, le yuan digital est déjà testé dans plusieurs villes depuis près d’un an, et devrait être mis à l’épreuve pendant les Jeux olympiques d’hiver de Pékin en février 2022.
Après avoir pourchassé « tigres » comme « mouches », hauts dirigeants comme simples fonctionnaires, les inspecteurs de l’anticorruption se mettent à remonter le temps en rouvrant de vieux dossiers.
Depuis son arrivée au pouvoir fin 2012, Xi Jinping n’a cessé d’étendre le spectre de sa campagne anticorruption, à la fois pour lutter contre ce fléau qui nuit à la légitimité du Parti, mais aussi pour consolider son propre pouvoir.
Lors de la session du Parlement en mars dernier, le Président a prévenu que « le Parti a fait preuve d’une tolérance zéro à l’égard des nouveaux cas de corruption [depuis 2012]. Aujourd’hui, nous ne tolérerons plus les anciens cas [avant 2012]. Le combat contre la corruption ne s’arrête jamais ».
C’est un tournant dans cette campagne anticorruption puisque, jusqu’à présent, elle ne ciblait que les méfaits commis sous Xi Jinping.
Première victime : la Mongolie-Intérieure, région autonome réputée pour sa production de charbon. Là-bas, les inspecteurs ont rouvert des affaires remontant jusqu’à « 20 ans en arrière », impliquant près d’un millier de cadres. Sur le banc des accusés, 34 cadres à la retraite et un décédé…
Fin avril, l’agence Xinhua a publié une vidéo de l’un d’entre eux. Il s’agit de Guo Chengxin, 66 ans (cf photo), qui a quitté son poste de directeur du bureau du charbon à Ordos en 2015, en espérant passer à travers les mailles du filet de l’anticorruption. Sous pression, Guo raconte avoir envisagé de s’autodénoncer, avant de changer d’avis… Il a finalement été incarcéré en mai 2020. « Cette campagne remontant 20 ans en arrière est nécessaire, toute une cohorte de cadres était pourrie à cette époque », affirme-t-il.
Ces enquêtes rétrospectives ne devraient pas se limiter à la Mongolie-Intérieure. Déjà, le Gansu lui emboîte le pas…
Cependant, en rendant les cadres responsables à vie de leurs agissements, Xi Jinping augmente encore d’un cran la pression, ce qui peut avoir comme conséquence d’exacerber chez eux la peur de prendre des initiatives ou la tentation de dissimuler certaines informations par crainte d’être sanctionnés… La gestion de l’épidémie de la Covid-19 à ses débuts à Wuhan en est un parfait exemple.
Autre changement de stratégie dans la campagne anticorruption : inciter les cadres corrompus à se rendre, en leur promettant de faire preuve de clémence. En 2020, plus de 16 000 cadres se seraient dénoncés d’eux-mêmes. Un chiffre en augmentation de 54%, se targue la Commission centrale d’inspection de la discipline (CCID).
Cette statistique, largement reprise par les médias officiels, est censée prouver au public les capacités de gouvernance du Parti, mais surtout la faculté de Xi Jinping à exercer son autorité sur tous les niveaux hiérarchiques, voire même à travers le temps ! Un atout de poids pour l’actuel Président qui espère sécuriser son troisième mandat lors XXème Congrès du Parti, à l’automne 2022.
15 éléphants sauvages se sont échappés de leur réserve naturelle de Mengyangzi dans le Xishuangbanna (Yunnan) pour migrer 500 km plus au Nord, créant de sérieux dégâts sur leur passage (6,8 millions de yuans et 56 hectares de cultures saccagées jusqu’à présent).
Ils se sont fait la belle début mars 2020, puis, après une pause de plusieurs mois, le troupeau a repris sa route pour arriver début juin en périphérie de Kunming, la capitale provinciale qui devrait accueillir la conférence des Nations Unies sur la biodiversité en octobre prochain.
Une grande épopée qui tient en haleine des millions d’internautes chinois, tandis que les scientifiques imputent cet exode à la déforestation. Espèce en voie de disparition, les éléphants d’Asie sont strictement protégés en Chine, où ils seraient environ 300.
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120 m² : c’est la surface moyenne que devraient atteindre les appartements de trois ou quatre chambres, pour accueillir une famille avec trois enfants et parfois les grands-parents. Actuellement, les logements de moins de 90 m² représentent 70% du bâti. Aux promoteurs immobiliers de saisir la balle au bond, ou non…
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213,6 milliards de yuans : c’est le montant des subventions industrielles consenties par l’État chinois à ses entreprises en 2020. Un chiffre en hausse de 14%, alors que le pays s’est engagé dans une course technologique sans merci avec les États-Unis.
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5 musées sont inaugurés en moyenne chaque semaine en Chine. À ce rythme frénétique, le pays devrait avoir construit 10 000 musées d’ici 2035, contre près de 6000 fin 2020. D’ici là, la Chine ambitionne d’héberger entre 10 et 15 musées de niveau international.
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266 millions de colis sont envoyés en moyenne chaque jour en Chine, un chiffre qui devrait bondir à l’occasion du « 618 » (18 juin), énième festival du e-commerce en Chine.
Une fois sa décision prise, en août 2008, Fu Daxin réfléchit. Aller en tôle, se faire prendre en charge par l’État, c’était tentant. Mais pour que cela fonctionne, il fallait choisir un endroit où l’on prenait la loi au sérieux, pour être sûr d’être bien traité par la police : il lui fallait Pékin, rien de moins. Il ne s’agissait pas de se laisser « attraper dans la nasse du ciel ou de la terre » (天罗地网, tiān luó dì wǎng), et de sacrifier sa liberté sans nul bénéfice !
Mais là-bas, la vie était chère ! Un simple repas, même frugal, y coûterait un mois de sa survie ici au village. Une fois sur place, il conviendrait donc de ne pas perdre une journée et de se mettre sans retard à l’ouvrage. Et puis, à Pékin, comment y arriver ? Le billet depuis Changsha, pour 1800km de chemin de fer, coûterait 210 yuans, dont il n’avait pas le premier sou vaillant. Il n’avait que de quoi atteindre Wuhan : il prit l’omnibus en 3ème classe, 360km en 7 heures, avec pour tout bagage un vieux caddie.
Dès son arrivée dans cette capitale du Hubei, il arpenta les rues, guettant les sorties de bars en quête de cannettes vides, qu’il écrasait et stockait dans son caddie. Après quelques heures, le caddie plein, il s’en allait vendre cet aluminium au récupérateur, à un « mao » la boîte. De la sorte en deux jours, il avait suffisamment dans son escarcelle pour poursuivre sur Hefei (Anhui). Poursuivant son manège, il récoltait là le prix du billet pour Shijiazhuang (Hebei) à 900km. Il dormait sous les alcôves ou dans les terrains vagues, et se nourrissait des rebuts des restaurants – peu appétissants, mais plus nutritifs que son ordinaire à Qidong… C’est ainsi que le 23 août 2008, il arriva en gare centrale de Pékin, ayant bouclé son périple en 10 jours.
À l’entrée de la gare, il extirpa de sa poche un grossier couteau et se mit à suivre un policier ferroviaire, s’apprêtant à le menacer de la voix et de la main. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Dans la force de l’âge, l’homme marchait plus vite que lui ! Après 50 mètres, Fu Daxin dut s’arrêter hors d’haleine, semé.
Cherchant du regard une autre victime autour de lui, il vit une voyageuse plutôt bien mise, sortant de son sac copie Vuitton trois billets de 100 yuans, évidemment pour faire quelques achats. C’était elle qu’il lui fallait. Mais novice dans l’art du brigandage, il se fit immédiatement repérer par son regard anormal. Elle s’enfuit à pas rapide : encore raté !
Perdant la tête, il dévisagea alors une étudiante en survêtement pourtant évidemment désargentée, une cible donc bien improbable. Il se jeta sur elle, mais elle se dégagea sans effort, observant, médusée, ce vieillard à bout de souffle, incapable de faire du mal à une mouche. C’est alors qu’en haletant, il lui avoua tout : « écoute, petite sœur, je dois aller en prison, me faire arrêter… je t’en supplie, crie ‘au voleur’ ! ». Et c’est presque par charité qu’elle se prêta au jeu, hurlant l’appel en souriant.
Enfin, il avait gagné ! Alertés par les cris, une demi-douzaine de sbires déboulèrent, lui passèrent les menottes. Suivit au bloc l’interrogatoire. Sa chance fut que leur quota d’arrestation n’était pas atteint : contre toute vraisemblance, ils confirmèrent qu’il était un pickpocket écumant la gare !
15 jours plus tard, un juge surmené lui colla à l’aveuglette 24 mois fermes, à Fengtai, taule spécialisée en petits délits.
Enfin à pied d’œuvre à son nouveau home sweet home, Fu Daxin nullement déçu par son paradis réinventé, prit du bon temps : à 70 ans, pour la première fois de sa vie, il goûtait trois repas chauds par jour, servis en cellule. Ayant passé la limite d’âge, il était exempté de travail. Toute la journée, il était libre pour lire, s’exercer à la calligraphie dans les couloirs (avec le balai-serpillière) ou jouer aux échecs chinois. 18 mois plus tard, son bonheur fut obscurci par une libération anticipée, due à son comportement exemplaire de prisonnier modèle.
Allait-il replonger dans la disette ? Non ! Car entre-temps, son cas avait fait parler de lui. À sa sortie, l’attendait une prime annuelle de 9360 yuans (soit 1500 euros). Et surtout, sa famille lointaine, montrée du doigt, s’était tardivement décidée à le soutenir afin de faire taire les critiques. Son neveu, fils de sa sœur Yiji, allait lui bâtir une maison grossière, mais efficace, avec 26.000 yuans de matériaux payés par l’État et 70.000 yuans par les siens. Avec l’argent qui lui reste, il vit presque bien.
Il ne lui reste qu’un souci, celui de ses funérailles. L’État lui garantit certes une crémation décente, mais ce qu’il voudrait, c’est un artiste pour composer un opéra chinois, sur l’aventure de sa vie, à jouer une fois par an sur la scène antique de son village. Pour la population, ce serait un renouvellement du répertoire, et pour une fois, une véritable histoire de chez nous. Et pour Fu Daxin, ce serait une consécration : la postérité locale découvrirait son courage et son imagination, pour rappeler comment il s’y est pris pour flouer le destin. Et vu sa notoriété, son histoire venant de faire le tour du pays, Fu Daxin pourrait fort bien voir son rêve se réaliser !
14 juin, dans toute la Chine : la Fête des Bateaux-Dragons (端午節 , duānwǔ jié ) le 5ème jour du 5ème mois lunaire, qui marque l’entrée dans les chaleurs de l’été. Outre les fameuses courses de bateaux, c’est aussi l’occasion de déguster des zòngzi (粽子), boulettes de riz gluant, farcies de différents ingrédients, et enveloppées dans des feuilles de bambou.
12-20 juin, Chongqing : AUTO CHONGQING 2022, Salon international de l’industrie automobile en Chine
22-24 juin, Shanghai : FSHOW 2021, Salon international des engrais de Chine
22-24 juin, Shanghai : CAC, Salon international chinois de l’agrochimie et de la protection des cultures
23-25 juin, Shanghai : HNC, Salon international des équipements et appareils de soins de santé, des thérapies de soins de la vie
24-26 juin, Canton : CINHOE, Salon international de l’alimentation et des produits issus de l’agriculture biologique
25-26 juin, Shanghai : SG – CHINA INTERNATIONAL SMART GARMENTS INDUSTRY FORUM & EXHIBITION 2021, Salon international et forum de l’industrie des vêtements « intelligents » en Chine. Textiles fonctionnalisés : imperméables, ignifugés, antibactériens, antistatiques…
25-27 juin, Pékin : LPS BEIJING, Salon de l’immobilier en Chine
25-27 juin, Nanjing : ASIA OUTDOOR TRADE SHOW 2021, Salon chinois des loisirs de plein air
29 juin – 1er juillet, Shenzhen : INDUSTRIAL AUTOMATION SHENZHEN 2021, Salon international pour l’automatisation des procédés
2-4 juillet, Shanghai : ISPO SHANGHAI 2021, Salon professionnel international des sports, de la mode et des marques de vêtements à Shanghai
7-9 juillet, Pékin : AIAE, Salon international de l’automation industrielle
7-10 juillet, Shanghai : PHOTO & IMAGING SHANGHAI 2021, Salon de la photo et de l’image numérique
8-9 juillet, Guangzhou : CBD GUANGZHOU 2021, Salon international du bâtiment et de la décoration
8-10 juillet, Chengdu : IE EXPO CHENGDU 2021, Salon professionnel international de la gestion et traitement de l’eau, du recyclage, du contrôle de la pollution atmosphérique et des économies d’énergie