Quel point commun peut-on trouver aujourd’hui entre la Syrie, le Nicaragua et les Etats-Unis ? Après la sortie des USA du Traité de Paris (COP21) contre le dérèglement climatique, décidée par Donald Trump le 1er juin, ils sont désormais les trois seuls pays non-signataires du pacte. Un choix qui, s’il devient effectif, rehaussera selon les experts à l’horizon 2100 la température du globe de 0,3°C supplémentaire. Cette décision très personnelle et très contestée du Président américain a émis des ondes de choc à travers toute la géopolitique mondiale, bien au-delà du domaine de la climatologie. Dans les heures suivant l’annonce du pensionnaire de la Maison Blanche, les grands signataires se sont élevés pour affirmer qu’eux-mêmes respecteraient les engagements du pacte : Union Européenne, mais aussi Russie, Inde, et Chine.
Tandis que Trump attend de ce retrait la « restauration de la grandeur des Etats-Unis », il vient en fait d’offrir son troisième gigantesque cadeau à la Chine en trois mois, après le torpillage en mars du TPP (accord commercial de la zone pacifique qui visait à intégrer 16 pays entre Asie et Amériques tout en isolant la Chine) et le refus la semaine passée de garantir aux alliés atlantiques la sécurité de l’OTAN à long terme. L’ Accord de Paris ratifié ou confirmé par 147 pays (dont les USA), représentait plus de 80% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. C’était un des acquis majeurs du dernier mandat de Barack Obama, sous l’angle diplomatique et de la coopération avec la Chine.
Mais ce désengagement prendra quatre ans de palabres. Parler de sortie immédiate de la COP21 est donc exagéré. De plus, fin 2020, de nouvelles élections auront lieu, pouvant aboutir à la nomination d’un autre Président et d’un « repentir » sur la question de l’adhésion du Pacte de Paris. Trump lui-même n’exclut pas la possibilité d’adhérer à un nouvel accord, « plus favorable aux Etats-Unis » Son secrétaire d’Etat Rex Tillerson ajoute même que son administration poursuivra les efforts actuels de baisse des émissions.
Quelles sont les chances de survie du pacte de Paris sans les Etats-Unis ? Les 146 pays signataires totalisent 65% des émissions du globe : taux inconfortable (au vu des 35% non assujettis aux règles communes), mais reste viable.
Le risque majeur, tiendra à la réaction des membres, constatant à terme que les 28% de baisse d’émissions promis par Obama d’ici 2025 (par rapport à 2005), ne seront pas tenus… Certains pays comme Inde ou Russie pourraient en tirer prétexte pour renoncer à brider leurs émissions.
Par contre, la sortie des Etats-Unis ne comporte pas que des aspects négatifs. Lors des renégociations obligatoires chaque cinq ans, les pays membres n’auront alors pas à leurs côtés une délégation américaine climatosceptique pour contrecarrer tous leurs efforts. Ils auront plus de latitude pour consolider, approfondir le Traité. Ceci donne la chance à la Chine, par ses moyens exceptionnels, de s’imposer comme la locomotive verte d’une économie mondiale décarbonisée – c’est ce qu’elle veut, et c’est ce à quoi elle se prépare depuis des années.
Elle compte apparemment sur six chantiers majeurs, ou stratégies pour y parvenir :
– La Chine peut coopérer avec les villes et Etats des USA opposés à l’isolationnisme de Trump. Un exemple immédiat apparaît : la Californie entame des négociations pour relier sa bourse des crédits carbone au réseau des bourses chinoises. Elle peut aussi poursuivre ses efforts d’équipement en de lignes de TGV à travers les Etats- Unis … Lire la suite
Sommaire N° 22 (2017)