Finance : Grognement chez Moody’s

Patatras le 23 mai, quand l’agence Moody’s, rétrograda la note de crédit de la dette souveraine chinoise d’un cran, de Aa3 à A1 (avec une perspective stable)—une première depuis 1989. Cet indice compromettait l’espoir de la Banque Centrale de relancer sur son sol la finance étrangère. Aussi le ministère des Finances réagissait-il mal, criant à la « méthode inappropriée » et à l’« incompréhension des lois et règlements chinois » chez le géant américain de la notation. Comme par démenti, le yuan remontait au marché off-shore à Hong Kong à un niveau plus vu depuis mars, et l’agence chinoise Chengxin (dont Moody’s détient 49%) maintenait son A+.

La cause alléguée à l’abaissement est l’endettement public, et une économie publique toujours gavée à la planche à billets, sans regard sur la rentabilité. Il y a aussi la timidité à démanteler les surcapacités d’acier et d’énergie. Pour Moody’s, la croissance va se stabiliser, de 6,7% l’an passé, à 5% sous 5 ans, ce qui peut rendre délicat à l’avenir une poursuite de ces subventions à fonds perdu. 
Autre signe d’essoufflement de la croissance : l’endettement de la jeunesse urbaine, séduite par un accès facile et rapide au crédit bancaire à  taux attractifs. Ainsi, les jeunes empruntent en millions de yuans pour  acheter un appartement ou une voiture plus puissante. L’hypothèque des ménages grimpe vite—mais en cas de panne de croissance, pourront-ils rembourser ?
 Pour contrer l’affolement de l’emprunt, l’Etat compte sur le désendettement des consortia et des provinces par échange de dette contre des participations, l’entrée aux projets des capitaux privés et étrangers, et le frein aux investissements. Mais pour Moody’s, cela ne suffit pas à refroidir la poussée spéculative. Il en veut pour preuve la masse toujours importante, quoiqu’illégale, de sortie de fonds vers Hong Kong – lequel, au passage, rétrograde la note du « Rocher »  pour la même raison. Si la Chine tousse, Hong Kong s’enrhume !

Pour serrer les rênes de sa croissance, Pékin ajoute deux mesures : un « facteur contre-cyclique » dans la fixation du taux de référence quotidien du yuan (mais ce levier manque de transparence, et s’éloigne d’un objectif de contrôle de la monnaie par le marché) ; et une promesse de déréguler l’investissement étranger dans l’automobile, la batterie, les services et la mine.
Qu’on se rassure enfin : nul expert, chinois ou non, n’envisage une crise financière sérieuse en ce pays, vu sa puissance industrielle et sa note nationale qui même rétrogradée, demeure la cinquième mondiale.

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1 Commentaire
  1. severy

    Scénario fictionnel. Chine 2022. Catastrophe naturelle majeure. Des centaines de milliards de yuan/euros de dégats, d’importantes conséquences humaines (des millions de victimes) dues au dérèglement climatique. La Chine tient les États-Unis responsables de ce cataclysme. Que s’en suivra-t-il?

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