Economie : Chine-USA : La première salve

Les 3 et 4 mai à Pékin, le vice 1er ministre Liu He et son équipe affrontaient sept pointures de l’économie américaine, dont le Secrétaire au Trésor S. Mnuchin et P. Navarro et L. Kudlow, les conseillers de la Maison Blanche. Ils arrivaient avec une longue liste de demandes pour « rééquilibrer la relation commerciale ». Si acceptées, ce serait une rupture, un changement de paradigme à 40 ans d’échanges entre Chine et le reste du monde.

Exigeant le recul du déficit commercial, Washington attend que la Chine gonfle ses commandes made in USA de 200 milliards de $ avant 2020. La Chine devrait éliminer ses subventions aux industries du plan Made in China 2025 « menant à des excédents », et stopper « l’encouragement de l’espionnage industriel par le hacking ». Elle devrait renoncer à toute pression sur les firmes américaines sur son sol pour obtenir leurs secrets technologiques. Elle devrait baisser tout tarif douanier en tout secteur « non critique » à un niveau « non supérieur » à ceux des douanes américaines. Il lui faudrait également retirer ses plaintes à l’OMC contre les rétorsions commerciales américaines, et promettre de ne pas émettre de contre-rétorsions. Si la Chine rejetait l’un ou l’autre terme de cet ultimatum, elle s’exposerait à des hausses douanières sur le marché américain, pour un total pouvant atteindre 150 milliards de $.

Disons-le d’emblée, les deux délégations se sont séparées « avec de profondes divergences ». Mais les Américains ont été écoutés cinq sur cinq, et en Chine, une réflexion a déjà commencé, au-delà des vociférations va-t-en-guerre, sur l’opportunité pour le pays de changer de politique.

Jin Keyu, fille du président de la AIIB (la nouvelle banque des routes de la soie) et professeur d’économie à la prestigieuse école LSE de Londres, écrit que cette liste paradoxalement pourrait aider le leadership chinois à imposer les réformes face auxquelles il achoppe depuis 20 ans sous l’opposition de ses lobbies. Citant le philosophe antique Mencius, elle rappelle que « en vivant sans souci, on accélère sa perte, tandis que l’adversité renforce et endurcit ».
En attendant, rendez-vous est pris par Liu He et S. Mnuchin, voire peut-être par D. Trump et Xi Jinping en personne, pour le prochain round des négociations, qui s’avèrent déjà annonciatrice d’une époque nouvelle, et éloignent les perspectives d’affrontement.

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