L’Etat a franchi le Rubicon en faisant adopter au Parlement (28 avril), en 3ème lecture, sa loi sur les ONG étrangères. Sur ce dossier brûlant, l’Etat a fait preuve de prudence en prolongeant le débat d’un an pour réfléchir aux critiques étrangères. En effet, 7000 ONG étrangères sont visées : Chambres de commerce sino-étrangères, associations humanitaires telle Save the Children, lobbies comme Greenpeace….Ne sont pas concernés par la nouvelle loi : les hôpitaux, écoles et instituts de recherche internationaux.
Certes, cette nouvelle loi reconnait l’existence juridique de (certaines) ONG étrangères, ce qui n’avait jamais été fait avant. Elle met donc un terme à la « zone grise », qui permettait à l’Etat de pouvoir les fermer à son bon vouloir.
Ainsi, après une procédure complexe, les ONG jugées « approuvables » pourront demander l’autorisation d’ouvrir plusieurs bureaux en Chine, et n’auront plus à demander le renouvellement de leurs licences tous les 5 ans. Elles pourront recruter plus facilement employés et volontaires. En contrepartie, elles devront émettre des rapports d’exercice explicitant le montant et l’origine de toutes leurs ressources, liste de leurs projets et activités. La police aura aussi le droit d’interroger à tout moment les employés. Pour les ONG suspectes de sympathies avec des milieux subversifs ou « considérées comme politiquement sensibles » (comme la religion, les droits des travailleurs…), elles seront fermées et mises sur liste noire.
Mais le véritable tour de vis réside dans le changement de l’autorité de tutelle légale des ONG étrangères : elles dépendront de la Sécurité publique, tandis que les autres ONG chinoises, resteront sous la coupe du ministère des Affaires civiles. Ainsi, une structure charitable étrangère s’occupant d’enfants des rues, dépendra donc du travail et du jugement de la police. Cette ségrégation est un signe de méfiance envers le bénévolat étranger, suspecté de diffuser des idées nouvelles, non-chinoises et démocratiques.
Autre innovation, au 1er mai, la taxe sur le chiffre d’affaires vole aux orties, remplacée par la TVA. Introduite en 1979, elle avait enregistré un début d’activité en 1994 sous Zhu Rongji, soucieux de regarnir les coffres de l’Etat central. En 2012, le « plan d’action TVA» était lancé, couvrant dès lors les industries. À présent, elle s’applique aux quatre secteurs encore non couverts : 11% pour la construction et l’immobilier (dont ventes et location avec des entreprises), et 6% dans la finance et services au consommateur. 10 millions de firmes sont concernées, et la TVA se substituant à la taxe d’affaires, leur fera économiser 500 milliards d’impôts.
Les plus chanceuses seront les PME au chiffre d’affaires de moins de 500.000¥, qui verront leur taxation baisser de 5% à 3%. Les consortia gagneront aussi, en exemptant de TVA la plupart de leurs transactions internes. L’immobilier de même sera bénéficiaire, en déduisant ses achats de terrain. Mais il perdra aussi, du fait de l’impossibilité de déduire les salaires, une partie importante de ses dépenses.
Les perdants seront les provinces, qui touchaient 40% de la taxe d’affaires et auraient dès lors 125 à 250 milliards de ¥ de manque à gagner annuel, sans la compensation promise par Pékin, un emprunt public supplémentaire de 560 milliards de ¥ cette année. Les industriels eux, bénéficieront de baisses d’impôt au titre de leur recherche et développement et d’investissements de modernisation.
Il s’agit clairement d’un instrument à long terme pour lever une discrimination à l’encontre des PME et des services (la priorité des priorités pour le régime), qui assuraient déjà plus de la moitié du PIB brut l’an dernier. « Puissant soutien à la croissance immédiate, commente Li Keqiang, 1er Ministre, la réforme nourrira aussi la croissance à l’avenir ». Ainsi, la Chine s’éloigne un peu plus d’un mode de fonctionnement socialiste planifié, pour évoluer vers la pratique internationale.
1 Commentaire
severy
6 mai 2016 à 15:51Crébonsoir! Même plus moyen d’investir son oseille dans les fermes d’Etat! Le goulag n’est plus ce qu’il était, camrade!