Les Chinois seraient-ils les plus heureux du monde ? C’est ce que semble indiquer une récente étude menée par l’institut de sondage français Ipsos auprès de 22 000 personnes à travers 32 pays fin 2022 (post-« zéro-Covid » donc).
En Chine, 91% des sondés se déclaraient « heureux », plaçant ainsi leur pays en tête du classement devant l’Arabie Saoudite et les Pays-Bas. Les Etats-Unis arrivent 14ème, suivis de la France (15ème), du Canada (18ème), puis de la Belgique (26ème). Ferment la marche : les Polonais, les Coréens du Sud et les Hongrois.
De manière générale, l’étude rapporte que le niveau de bonheur serait déclinant dans les pays occidentaux, mais en hausse dans les pays à revenu intermédiaire. En Chine, ce pourcentage a augmenté de 12 points ces dix dernières années, c’est-à-dire sous la gouverne de Xi Jinping.
La clé du bonheur, selon les Chinois ? Passer des moments en famille, avec leur(s) enfant(s) et avoir des amis sur lesquels ils peuvent compter. Ces résultats tranchent avec les réponses des habitants du reste du monde qui citent en premier lieu « le sentiment que leur vie a un sens » et « la sensation de maîtriser leur vie ».
Les résultats démontrent également un fort lien de corrélation entre bonheur et pouvoir d’achat. En d’autres termes, plus les Chinois ont les moyens de consommer, plus ils se sentent heureux – une tendance qui n’est pas propre au Céleste Empire.
Globalement, 78% des Chinois interrogés se disent satisfaits de la situation économique de leur pays, se classant ainsi juste derrière l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis, pays connus pour leurs ressources pétrolières.
Questionnés au sujet de la situation politique et sociale de leur pays, 83% des Chinois s’en déclarent satisfaits, prenant ainsi la première place du classement, devant les Indiens et les Singapouriens. A l’inverse, seulement 32% des Français partagent ce sentiment.
Plus étonnant peut-être aux yeux d’un observateur étranger : le fait que 86% des Chinois « se sentent libres de faire et de dire ce qu’ils veulent » en Chine.
Sonder l’opinion chinoise s’est toujours révélé être un exercice difficile, l’auto-censure étant monnaie courante dans le pays, par crainte d’éventuelles répercussions. L’omniprésence de la propagande dans la vie courante ainsi que l’absence d’une presse indépendante sont d’autres limites. Sans parler des difficultés pour constituer un échantillon représentatif à l’échelle d’un pays de 1,4 milliard d’habitants, du berger tibétain à l’avocat d’affaires shanghaien…
Malgré cela, ce sondage Ipsos vient conforter les résultats d’autres études réalisées ces dernières années, concluant que globalement, les Chinois se déclarent satisfaits de leur gouvernement.
Cela n’a bien sûr pas échappé au principal intéressé. Dans une série de tweets le 1er avril, Mme Hua Chunying, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, mettait justement en avant une série de sondages menés par des instituts étrangers (Ipsos, Gallup, Edelman…), révélant que 89% des Chinois ont confiance en leur gouvernement contre seulement 42% des Américains ou encore que 83% d’entre eux trouvent leur pays « démocratique » contre seulement 49% des Américains.
Qu’une diplomate chinoise mette en avant de tels résultats alors que le gouvernement chinois ne sonde jamais sa propre population, peut paraître quelque peu ironique. On aurait cependant tort de croire que Pékin ne s’intéresse pas à l’opinion de ses citoyens, bien au contraire. Le Parti y accorde une importance toute particulière et surveille notamment les réseaux sociaux comme le lait sur le feu, de manière à prévenir tout mouvement de contestation qui puisse remettre en cause sa crédibilité et surtout sa légitimité.
Cela ne marche pas à tous les coups. Ainsi, les autorités se sont retrouvées prises de court face aux manifestations populaires qui ont vu le jour fin novembre dernier dans différentes villes du pays pour protester contre la politique « zéro Covid ». Quelques mois plus tôt, plusieurs études rapportaient qu’une écrasante majorité de Chinois étaient satisfaits de la réponse épidémique de leur gouvernement face au Covid-19. Comme quoi, même le meilleur des sondages est à prendre avec des pincettes lorsqu’il s’agit de jauger l’opinion chinoise, qui est beaucoup plus complexe et moins monolithique qu’on ne l’imagine.
1 Commentaire
severy
17 avril 2023 à 18:36Bref, si je comprends bien, tout va pour le mieux dans le pire des mondes.