Apple avait jeté l’éponge, Xiaomi l’a fait. Trois ans seulement après avoir annoncé se lancer sur le créneau très convoité des véhicules électriques, le n°3 mondial des smartphones, Xiaomi, a débuté en grande pompe le 28 mars la commercialisation de son tout premier véhicule, baptisé « SU7 ».
Cette berline, aux lignes rappelant fortement celles de la Porsche Taycan, affiche sur le papier des performances surpassant celles de la Tesla Model 3, notamment en termes de capacité d’accélération et d’autonomie. La SU7, pour l’instant réservée au marché chinois, serait également dotée d’un système de recharge rapide performant même en cas de grand froid, habituel l’hiver dans le pays. Cerise sur le capot, la SU7 en version standard coûte 215 900 yuans (environ 26 600 euros), soit 30 000 yuans de moins que la Model 3, qui reste n°1 des ventes sur ce segment très concurrentiel.
L’engouement a été instantané : en 24h, le géant chinois de l’électronique a enregistré pas moins de 88 898 pré-commandes. Même si environ 40% d’entre elles ont ensuite été annulées, notamment à cause des délais de livraison affichés (jusqu’à 6 mois), cela reste un très bon démarrage, qui n’est pas étranger à la popularité du fondateur de Xiaomi, Lei Jun, personnellement impliqué dans ce projet. Parfois surnommé le « Steve Jobs chinois », l’homme fait partie de ces entrepreneurs, souvent partis de rien, idolâtrés en Chine par une cohorte de fans.
Fondé en 2010, Xiaomi a connu un essor fulgurant en proposant des smartphones haut de gamme à prix abordable, mais aussi tout un tas d’objets connectés (tablettes, trottinettes, purificateurs d’air etc…). Si le groupe se lance aujourd’hui sur le marché des véhicules électriques, c’est qu’il espère diversifier ses sources de revenus, face au ralentissement de ses autres marchés. Et il se donne les moyens de son ambition : le département R&D dédié aux projets automobiles au sein de Xiaomi rassemble quelque 3 400 personnes et a investi pas moins de 10 milliards de yuans en trois ans pour le développement de la SU7. « L’objectif est de devenir l’un des cinq premiers fabricants au monde, au prix de 15-20 ans de durs efforts », déclarait Lei Jun à la presse en décembre. Xiaomi a par ailleurs déjà annoncé le lancement de son SUV d’ici la fin de l’année, suivi par un modèle hybride.
Mais les défis ne manqueront pas : passé l’effet d’annonce, Xiaomi devra se battre pour conserver l’attention des consommateurs et se différencier sur un marché saturé qui compte aujourd’hui des centaines de modèles de dizaines de marques.
En outre, ces derniers mois, la guerre des prix entre Tesla et les groupes locaux (Geely, Aion, Changan, Leapmotor, NIO, Xpeng ou encore BYD, le n°1 mondial) s’est intensifiée, ce qui pèse sur les marges. L’arrivée de la SU7 sur le marché a d’ailleurs poussé certains d’entre eux à casser un peu plus les prix… Xiaomi peut donc dire adieu à l’idée d’engranger le moindre bénéfice, du moins dans un premier temps !
L’autre point faible de la SU7 tient à sa production, sous-traitée au constructeur étatique BAIC, qui assemblera ces modèles dans une usine à Pékin à la capacité de 200 000 véhicules par an. Or, comme l’a montré Tesla et ses « mega-factories », produire soi-même permet non seulement de faire évoluer le produit plus vite mais aussi d’en abaisser le coût de revient.
A savoir que le grand rival de Xiaomi, Huawei, s’est lui aussi lancé sur le marché des véhicules électriques pour pallier une baisse de ses ventes de smartphones (exception faite de son dernier Mate 60 Pro), mais a choisi une stratégie différente en s’associant avec différents grands constructeurs automobiles (BAIC, Chery, Dongfeng, Seres…) à qui il fournit ses technologies, puis touche une commission pour chaque véhicule vendu dans l’un de ses 60 000 points de vente à travers le pays…
Au final, alors que les premières SU7 commencent à peine à être livrées aux clients, le véritable challenge pour Xiaomi sera de s’assurer de la qualité constante de ses véhicules (déjà les premières plaintes émergent) et à déployer un service après-vente qui est quasi-inexistant pour l’instant. La messe est donc loin d’être dite.
1 Commentaire
severy
18 avril 2024 à 20:36La Chine, du char à bœufs au bolide électronique en quarante ans. On ne peut que lui tirer son chapeau (de roue).