« French Insiders » est une initiative de la nouvelle équipe de French Tech Beijing, présidée par Jean Dominique Séval, qui consiste à donner la parole à ces Français qui travaillent pour des entreprises de la tech chinoise, pour apprendre de leur expérience, de leur plongée au cœur des entreprises les plus innovantes, comme de leur témoignage sur le management interculturel. Jean-Baptiste Carpentier, directeur marketing de DSers et ex-responsable marketing et communication de Qihoo 360, s’est prêté à l’exercice, interviewé par Héléna Javitte, vice-présidente de French Tech Beijing.
Jean-Baptiste, votre carrière a commencé et se déroule exclusivement en Chine et avec des entreprises chinoises. Est-ce un choix ou les hasards de la vie ?
Un peu de hasard au début, certainement. Je suis venu en Chine très jeune dans le cadre d’un échange linguistique. Comme je souhaitais rester, j’ai trouvé un premier job de traducteur pour une société chinoise développant des jeux vidéo pour Facebook. Deux ans plus tard, j’ai intégré une filiale de jeux de Qihoo 360, firme pékinoise fondée par Zhou Hongyi en 2005 qui s’est fait connaitre pour son logiciel antivirus. C’est à l’occasion d’une pause cigarette que des employés de Qihoo m’ont convaincu de postuler pour rejoindre l’équipe marketing. Et c’est comme ça que je me suis retrouvé, à 27 ans et sans être spécialisé dans ce domaine, à participer à une campagne de 1 million de $ avec pour mission de donner une nouvelle image au célèbre navigateur web norvégien « Opera », racheté par la firme en 2016.
Comment décririez-vous les spécificités du travail et du management dans les entreprises chinoises dans lesquelles vous avez travaillé ? Qu’est-ce qui vous a surpris le plus ?
Je travaille depuis trop longtemps ici pour être surpris par tel ou tel comportement. Bien sûr, au début, comme beaucoup, je trouvais très étonnant de voir mes collègues faire leur sieste de midi ! Plus sérieusement, j’ai très vite compris que, pour mes supérieurs, c’est le résultat qui compte. Et que pour travailler avec un maximum de libertés, je devais gagner leur confiance. Cela demande de travailler dur, mais à mes yeux c’était normal, puisque je découvrais le marketing pour lequel je n’avais pas été formé. Par exemple, dans un grand groupe comme Qihoo 360, un de mes principaux challenges était de franchir les différents niveaux hiérarchiques pour obtenir une validation dans un délai raisonnable.
Qu’est qui vous motive aujourd’hui pour continuer à travailler pour des firmes chinoises ?
Comme au premier jour, je suis conquis par la sensation qu’ici « tout est possible ». Depuis bientôt trois ans, je pilote le département marketing de DSers, une plateforme logistique innovante créée en 2018, qui a pour partenaire AliExpress. Nous sommes une petite structure de 40 personnes, ce qui me permet de travailler en direct avec le fondateur. Grâce à un travail d’équipe, nous avons pu faire de DSers le numéro 2 de son secteur en très peu de temps. Maintenant, j’encadre une équipe de collaborateurs chinois, loin des clichés qui parfois collent encore à la Chine : avec eux, pas de micro-management, mais je fixe des objectifs clairs, je les encourage et, le plus important, je leur donne des responsabilités et la liberté d’agir.
Sommaire N° 10-11 (2021)