Comme chaque été, les crues sont au rendez-vous. Mais cette année, un effet el Niño exceptionnel augmente de 50 à 80% les précipitations sur le moyen cours du Yangtzé, faisant craindre la catastrophe. Au 6 juillet, des dizaines de millions de personnes étaient affectées dans 11 provinces du Centre et du Sud entre Anhui, Hubei, Jiangsu et Guangxi, qui recensaient 186 morts, 45 disparus, 56.000 maisons et 300.000 hectares d’emblavures détruits, 1,9 million d’ha endommagés. Par millions, poulets, bœufs ou porcs (cf photo) sont noyés. Au total, les dégâts s’élevaient à 38 milliards de yuans. A Wuhan, le 6 juillet, le niveau d’alerte de 27,3m était dépassée de 20cm – il devait atteindre 27,8m le 8 juillet, sous l’effet de Nepartak, 1er typhon de l’été. 43 rivières avaient également atteint le seuil d’alerte.
Cette tension rappelle le précédent de 1998 où les inondations avaient fait « 3000 » morts — plus probablement bien plus, l’Etat ayant volontairement minimisé les pertes. 240 millions de personnes avaient été touchées, dont 15 millions restées sans feu ni lieu. Les crues avaient causé pour 30 milliards de $ de dommages. Suite aux ruptures de digues de terre (dont les arbres avaient été coupés par les paysans), Shanghai avait été menacée durant trois jours. Le Premier ministre Zhu Rongji par la suite, avait tonné contre le mauvais travail des administrations locales, et contre leurs digues « de tofu ».
Paradoxe : à 341 mm en moyenne nationale depuis janvier, les précipitations sont 21% plus fortes qu’en 2015 à même époque, et 5% de plus que lors du désastre de 1998. Pourtant, les dégâts seront bien moindres. C’est en partie dû à la chance : ces pluies sont mieux réparties dans le temps (débutée plus tôt, et plus courtes), et étalées sur de plus larges surfaces. Surtout, la Chine s’est mobilisée depuis mars, sous les ordres de Wang Yang, le vice 1er ministre commandant en chef du contrôle des crues. Wang a fait préparer dans chaque district à risque les engins de levage, les sacs de sable, et multiplier les simulations d’alerte.
En outre de 1998 à 2002, l’Etat central a placé 2,5 milliards de $ dans le renforcement des digues, qui ont été reboisées. Et les réservoirs, de construction récente, sont efficaces contre les crues : celui des Trois Gorges peut à lui seul retenir 200.000 milliards de m3.
Pour autant, la leçon de 1998 n’a pas été retenue à 100% : à Wuhan, plusieurs banlieues inondées, datant de moins de 10 ans, ont été bâties sur d’anciens lacs qui ont été drainés, privant la nature de ses réservoirs naturels. Sur les 127 lacs recensés dans les années ‘80 à Wuhan, il n’en reste plus que 38. Signe clair que l’âpreté au gain, dans cette ville, a primé sur la sécurité.
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Sommaire N° 25-26 (2016)