Le traité climatique de la COP21 a été adopté samedi 12 décembre à Paris par 195 pays : à faire ratifier d’ici 2020, il sera applicable en 2025. On s’y attendait, vu le ralliement de la Chine et des Etats Unis -les puissances jusqu’à hier hostiles- et l’infatigable travail préparatoire de la France, hôte du meeting. Une page nouvelle d’histoire s’ouvre, avec cet engagement des pays à démanteler avant 2050 ces énergies fossiles (charbon/pétrole) qui nous faisaient vivre depuis deux siècles.
La Chine contribua au succès, en aidant à marginaliser d’irréductibles partisans du charbon ou du pétrole, tels l’ Inde et l’ Arabie Saoudite. A l’issue de la COP 21, le négociateur Xie Zhenhua promettait que son pays assumerait « des obligations internationales conformes à son développement et à ses moyens ». C’est un virage à 90°, par rapport à la COP15 de Copenhague en 2009, où ce même Xie, rejetait toute demande de l’Ouest de partage de l’effort, au nom de la responsabilité historique des pays « riches ». Cela dit, gardons la tête froide pour éplucher le traité.
Les limites ne tardent pas à apparaître, et la Chine, tout du long, se trouve conserver la position avantageuse qu’elle avait depuis le début de ces palabres il y a 30 ans :- Les pays riches « doivent » payer, en aide aux actions climatiques, aux pays en développement, 100 milliards de $ par an d’ici 2020, davantage d’ici 2025. Mais les autres (Chine en tête) « peuvent » contribuer – s’ils le veulent.
– Par des efforts nationaux de coupe des émissions de CO2, on veut contenir le réchauffement planétaire à +1,5°C en 2100, mais le traité évite toute mention de quotas nationaux, de dates, ou d’objectif de « neutralité-carbone ». Il ne fait que réclamer l’arrivée au plus tôt au « pic des émissions ». Et pour bien maintenir le principe de « responsabilités différenciées », les pays riches « doivent se fixer des objectifs absolus de coupe d’émissions », mais les autres sont invités à « poursuivre leurs efforts selon leur situation nationale ».
– La révision obligatoire des efforts des nations sera quinquennale, mais débutera en 2025 et non 2020. La plupart de ces dispositions ont été introduites pour éviter le véto de pays tel l’Inde—au profit de la Chine.
– Enfin, un chapitre exclut la possibilité d’action en justice, de pays lésés par le dérèglement climatique, contre d’autres Etats gros émetteurs de C02 – ceci pour prévenir un à veto à l’avenir du Congrès américain, ce qui convient bien à Pékin… Fait notable, tout au long de la COP21, la Chine se maintint hors de la coalition de 99 pays en demande d’un accord plus « pointu ». Car à ce jour, les promesses de coupe de CO2 des pays d’ici 2030, reviennent à une réduction 55 gigatonnes de gaz à effet de serre, ce qui se traduira, d’ici 2100, par un réchauffement de +3°C. Pour parvenir à l’objectif d’un réchauffement limité à 1,5°C, il faudrait encore poursuivre les coupes d’émission à 40 gigatonnes supplémentaires. Si la Chine s’est maintenue hors de ce club « de tête », c’est du à des oppositions internes, celles de ses provinces moins avancées du centre et du nord. C’est aussi au nom d’un principe qui lui est cher, celui de gradualité dans sa transition énergétique.
Enfin, rien de tout ceci n’a empêché le résultat final, véritable « cadeau de Noël » de la planète à elle-même. Xie Zhenhua salua cet accord « à nous tous, équitable, équilibré, ambitieux et durable ». Suite à quoi Miguel Cañete, Commissaire européen lui donna l’accolade (cf photo), décrivant la Chine comme un « partenaire dur, mais loyal ». Là encore, c’est une relation inédite qui se profile, marquée par un ingrédient qu’on croyait à jamais absent jusqu’alors : la confiance.
Sommaire N° 40 (XX)