Fin février 2014, le Président Xi Jinping sortait des cartons le projet Jing-Jin-Ji (京津冀) d’intégration de Pékin, Tianjin et le Hebei en une région unique : 130 millions d’habitants sur 216 000 km² à grand renfort de « ceintures » et radiales. Décrétant Jing-Jin-Ji « priorité nationale » sous le Conseil d’Etat, il en confiait la réalisation à Zhang Gaoli, vice-1er ministre. Les 10 et 11 juillet, le 7ème Plenum du 11ème Congrès de la marie de Pékin, devrait permettre d’y voir plus clair sur ce chantier pharaonique, qui doit connaître 3 phases :
(1) en 2017, la mairie de Pékin sera installée à Lucheng, Sud-Est de Tongzhou (cf photo). Plus proche de Tianjin et du Hebei, cela facilitera les décisions et la naissance de la nouvelle entité. Pour faire place au chantier, la démolition de 17 villages débutera à l’automne, et la construction cet hiver.
(2) Dès 2020 suivront d’autres arrivants, consortia municipaux ou nationaux, écoles ou universités (telle celle Renmin), hôpitaux, et même un parc à thème d’Universal Studio.
Ce déménagement entraînera le départ de dizaines de milliers d’emplois de service, soit 15% de la population pékinoise. Comme en rêvait déjà dans les années 1950 l’urbaniste Liang Sicheng (en vain, face aux ordres de Mao), ce projet sera bon pour la décongestion de Pékin, devant permettre une amélioration générale de la qualité de la vie et plafonner la capitale à ses actuels 23 millions de résidents.
(3) Le réseau interrégional est en chemin : une ligne ferroviaire rapide entre les deux aéroports (l’actuel, et celui qui se construit à Daxing), autoroutes, métros et trains « intercités »… L’appel d’offres ira surtout aux firmes d’Etat, telle cette Beijing-Tianjin-Hebei Intercity Railway Invest Co. fondée par les chemins de fer et les trois gouvernements locaux. Le budget global d’ici 2020 sera de 42 trillions de ¥ et d’1,5 trillion pour le budget « transports ». Fin des travaux prévue pour 2030.
Enfin, chaque entité (Jing- Jin- et Ji) se verra confirmer la vocation de ses atouts naturels : Pékin, phare politico-culturel (conservant ministères et organes du Parti), gardera les échanges internationaux, sciences et innovation. Tianjin se renforcera en R&D avancée, transport maritime et finance innovante. Le Hebei fera ses choux gras du commerce, de la logistique, et des industries nouvelles à bas carbone.
Le concept suscite des critiques. À la CASS, Sheng Guangyao craint que 15% de relogement ne changeront pas grand-chose aux embarras de Pékin. Pang Shihui, son collègue, estime qu’il est trop tard : « Tongzhou compte déjà 1 million d’âmes, et faute d’un bon plan de transports, on va droit à des embouteillages inextricables ». Quant aux ronds-de-cuir, ils traînent des pieds à s’y installer, d’autant que sur place, les prix au m² explosent (à Lucheng, +5000¥ en un mois). Une problématique de refus des provinces de se voir dominer par la capitale—qui n’est pas spécifique à la Chine.
Sommaire N° 27-28 (XX)