Monde de l'entreprise : Total – Gaz russe avec argent chinois

Total – Gaz russe avec argent chinois

En Sibérie, Yamal est un grand projet gazier, de Novatek à 60% (Russie), Total et CNPC à 20% chacun. Ses réserves (900 milliards de m3) sont premières mondiales, promettant 16,5 millions de tonnes par an. Dès 2018-2019, il permettrait de charger 15 à 20 méthaniers par mois au port de Sabetta, libre de glace 10 à 11 mois par an. Aux mois de gel, la Russie prépare un brise-glace chauffe-eau, réchauffant (au gaz) 13.500 tonnes de banquise par jour, jusqu’à 150cm d’épaisseur. Le GNL ira en Europe et en Asie, via deux ports de transbordement et deux routes vers l’Asie, une (courte) d’été, une (longue) d’hiver (cf carte).

Mais deux embuches viennent compliquer les choses, comme futile tentative de préserver la nature de cet arctique vierge. Œ Le cours mondial des hydrocarbures s’est effondré de moitié en 12 mois, ponctionnant les finances des groupes pétroliers. L’Etat russe a affranchi Yamal de TVA, mais les partenaires peinent à rassembler les 27 milliards de $ nécessaires au chantier.  La Russie est sous sanctions occidentales, suite à son annexion de la Crimée et son soutien aux séparatistes russes d’Ukraine. Sous ce « mur d’argent » inspiré par Washington, Total ne peut plus emprunter en dollars pour ce projet… 

Yamal World Road MapCependant Total maintient sa stratégie russe qui lui a jusqu’alors si bien réussi. Instaurée par son ex-PDG, C. de Margerie (décédé en 2014), elle s’oppose à la « guerre froide » avec Moscou et surtout au blocus, qui profite aux Etats-Unis mais qui se fait aux dépends des pays européens. 

Son PDG, P. Pouyanné, annonce (23/03) un emprunt de « 10 à 15 milliards de $ » en Chine, devant être signé sous « 2 à 3 mois ». Auprès de quelle banque, à quelles conditions ? Mystère. Mais le deal est donné comme accepté par Pékin, qui tient à ses plus de 50% de livraisons prévues de gaz de Yamal, à prix préférentiel, en position de force car premier bailleur de fonds. 

Sur le gâteau, viendront pour la Chine s’ajouter deux voire trois cerises : le prêt à Total permettra de battre en brèche l’embargo occidental ; il battra le dernier record chinois sur un projet corporate occidental (12 milliards de $ à Daimler en 2013) ; et il permettra (peut-être) un libellé du prêt en yuan.

Avez-vous aimé cet article ?
Note des lecteurs:
0/5
15 de Votes
Ecrire un commentaire