Sport : La Chine, fan du Mondial de Football – par procuration !

Le vendredi 13 juin, malgré l’heure très matinale (4h), 18.99 millions de Chinois (selon CSM Media Research) suivirent à la télévision l’inauguration et le match d’ouverture (Brésil-Croatie : 3-1) de la « Copa do Mundo » de football, à l’Arena Corinthians de Saõ Paolo au Brésil

Cette année encore, le «11» chinois ne figurait pas parmi les 32 équipes en lice, et la Chine se languit de figurer parmi cette élite mondiale du ballon rond. Or, depuis 30 ans, tous les efforts de l’Etat (y compris l’appel à des entraîneurs étrangers) ont échoué à assurer la qualification, sauf en 2002 où l’équipe nationale disparaissait sans gloire dès le 1er tour. En juin 2014, sur 207 pays, la Chine se classe à la 103ème place. Pourtant, l’amour du football est là, indiscutable, comme en témoigne Christian Karembeu, ambassadeur de la Fifa et champion du Monde ‘98, lors de son passage en mai à Pékin, observant stupéfait ces milliers de fans survoltés, venus saluer le Trophée que la Fifa faisait voyager à travers 90 pays. 

Être quand même de la partie—par procuration

Le Brésil, au niveau de vie élevé, se situe à plus de 20h de vol de la Chine, avec escale, et les supporters capables de dépenser minimum 50.000¥ pour leur voyage (jusqu’à 775.000¥, selon le package), sont bien moins nombreux que lors du Mondial 2010, en Afrique du Sud. Comme pour adoucir l’amertume, le 8 juin, Dilma Roussef, Présidente du Brésil, souhaitait la bienvenue « à la Chine entière » via le Quotidien du Peuple.

Dans ces conditions, avec stoïcisme, les fans chinois du ballon rond vont assister à la Coupe par procuration : en portant des maillots et écharpes aux couleurs des équipes nationales(achetés sur internet), et en suivant les matches dans les bars, entre minuit et 6h du matin. 

Mais comment concilier cela avec le travail ? Rares ont la chance d’avoir un patron compréhensif, comme celui d’UCWeb, de Canton, qui offre 3 jours d’absence, et tous les vendredi, un barbecue doublé d’un open bar et d’un écran géant. Sur internet cependant, pour 100 à 300 ¥, on peut trouver des faux certificats de congés maladie avec tampon rouge et toutes les apparences de légalité. Les hôpitaux soi-disant émetteurs offrent aux patrons la vérification, pourvu qu’ils se déplacent. 

Le nombre de téléspectateurs est ahurissant : en 2010 déjà, la Chine était n°1 mondial avec une moyenne de 17,5 millions par match. Pour cette Coupe du Monde, la CCTV a dépêché 100 reporters et cameramen, pour ses 4 chaînes qui diffuseront les matchs.

Pour suivre les retransmissions, scores et commentaires de journalistes sportifs, sur internet et les réseaux sociaux, les experts prévoient, d’ici la finale du 13 juillet au Stade Maracana de Rio, une participation record à 530 millions d’internautes. Tencent, seul, (« WeChat ») envoie 50 journalistes, et tout média confondu, pas moins de 500 envoyés spéciaux chinois seront sur place. 

Metro Pekin Ligne 4 Mondial PortugalTémoin de ce désir de participer, quoiqu’à distance, le métro de Pékin avait rebaptisé chaque station de sa ligne 4 du nom d’une équipe nationale (cf photo)… A la dernière minute, le plan a été abandonné par crainte de confusion des voyageurs ! 

Comment financer tout cela ? 

Une partie de ces frais sera évidemment supportée par la publicité. Tmall, portail de galeries marchandes en ligne, a déboursé 23 millions de $ pour sponsoriser le classement, et Nike, 46 millions de $, pour être cité par la CCTV. Les industriels engrangent les recettes des fournitures du Mondial, en gadgets made in China : la perruque de nylon multicolore, la « caxirola », tambour-casserole dont 2 millions ont été exportés, les drapeaux nationaux dont 400.00 ont été imprimés, les poupées « Faleco » (le tatou mascotte de la Copa).  Yingli a équipé en panneaux solaires les stades de Pernambouc (Recife) et de Maracana (Rio), et est le seul groupe Chinois sponsor officiel. 

La Chine de l’ombre sera aussi hyperactive, gérant sur internet les paris clandestins, réputés atteindre des milliards de dollars à travers le monde.
D’ailleurs, un animal-oracle avait été désigné : copiant Paul le poulpe allemand (qui prédisait souvent avec succès les résultats en 2010 et qui finit à la casserole), trois bébés pandas devaient prédire chaque issue de match en broutant dans tel ou tel bac leur ration de bambou. Le projet a été abandonné à la dernière minute—pas question de ternir l’image de cet animal sacré, ni d’inciter les paris clandestins !

Le foot, invention chinoise ? 

La ville de Zibo (Shandong) prétend, musée du foot à l’appui, être le lieu où naquit le ballon rond dans l’Antiquité, au Royaume de Qi, avant Jésus-Christ. Sous le nom de « cuju », le football aurait ensuite essaimé sur le reste de la planète via l’Egypte antique, la Grèce, puis la Gaule, avant d’échouer en Angleterre. Bizarrement, cette prétention douteuse est soutenue par Sepp Blatter, le Président de la Fifa, un homme « très populaire dans le Shandong » (assure Mme Zhu Shuju, vice-directrice du musée), déclenchant ainsi la vive protestation des Britanniques, très à cheval sur leur paternité de ce sport mondial. Ebenezer Cobb Morley qui, en 1863 à Barnes (Angleterre), avait édicté les règles du sport sur gazon, s’en retourne dans sa tombe !

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