Le 3 juin, He Jiankun, Président du Comité Consultatif « Changement Climatique », suscita l’étonnement en annonçant que dès 2016, la Chine obligerait ses usines, ses villes et ses campagnes, à limiter leurs émissions de CO2 par un système de quotas. Aujourd’hui, la Chine recrache entre 7 et 9,5 milliards de tonnes de CO2 par an (29% de la planète). En 2030, elle atteindrait un volume de 11 milliards de tonnes, avant d’entamer la redescente. Ceci, à condition qu’elle ait réussi d’ici là, à réduire sa consommation de charbon (remplacé par le gaz, le solaire, l’éolien), et qu’elle ait réussi à s’équiper de 150 à 200 GW de capacité nucléaire.
L’annonce de He Jiankun constituait un tournant, moins sur les dates ou les volumes, que sur la philosophie : dans l’esprit chinois officiel, la « vraie » baisse des émissions de CO2, était l’affaire des pays riches. La Chine elle, pays émergent, pouvait se limiter à un effort de réduction « relative » de ses émissions, qui lui permettait de continuer à émettre toujours plus. Mais par cette annonce, la Chine accepte une méthodologie qui est celle du Protocole de Kyoto, et qui impose une baisse contraignante. Certes, He tempérait les espoirs trop hâtifs en précisant, après coup, qu’il ne s’agissait que de sa recommandation, pas d’une décision de l’Etat chinois. Cependant, en Chine, un fonctionnaire de ce niveau ne convoque pas la presse pour des effets d’annonces « personnelles ».
D’autre part, la date de sa conférence était doublement symbolique :
– le 3 juin, chaque année, est un jour où l’Etat aime détourner l’attention sur des thèmes universels et réconciliateurs tel l’environnement,
– en outre, le haut fonctionnaire s’exprimait au lendemain d’une autre annonce environnementale : Barak Obama promettait pour 2030, une coupe de 30% du CO2 des centrales thermiques des Etats-Unis, leur première source d’électricité.
He confirmait ainsi les bouchées doubles mises par la Chine pour s’équiper en énergies alternatives, maîtriser la filière, et devenir n°1 dans l’infrastructure énergétique renouvelable (et dans l’agriculture à faible irrigation) du monde, y compris des pays pauvres.
Tout ceci nous laisse encore loin du but : le futur système des Nations Unies pour relayer le Protocole de Kyoto, en décembre 2015 à Paris, avec effet à partir de 2020…Pékin devra d’abord confirmer son agenda d’un plan national de crédits carbone pour 2016 ; et que dans la pratique des bourses d’échange, les ventes et achats de reliquats de crédit d’émission fonctionnent, ce qui n’est pas encore le cas. Toutefois, quand on sait que les deux pays qui faisaient jusqu’à ce jour blocage au mécanisme mondial, sont les Etats-Unis et la Chine, on sent passer une effluve d’espoir, et He Jiankun confirme la volonté et la capacité de la Chine d’avancer vite.
Sommaire N° 23