Economie : Réforme du crédit : une première, timide salve

En douceur, le pouvoir entreprend de soigner sa finance. Dès le second semestre, le prêt spéculatif était inhibé de manière à limiter la dette des provinces. Dans l’attente des chiffres de décembre 2013, Bloomberg estime l’emprunt national à 8250 milliards de ¥ pour l’année 2013, soit 979 milliards de ¥ de moins (-12%). On peut comprendre le souci de Pékin : la dette de l’Etat qui faisait 128% du PIB en 2008, atteint 218% en 2013, préservant un taux de croissance de 7,6%, et devrait atteindre 271% en 2017, si rien n’est fait. Une fois de plus, l’économiste M. Pettis joue les Cassandre : à long terme, un tel taux de croissance est insoutenable.

<p>Selon une autre source, de janvier à novembre 2013, les compagnies fiduciaires (les trusts, plus forts acteurs du crédit gris) prêtaient 4620 milliards de ¥ de janvier à septembre 2013, dont 70% aux « institutionnels vulnérables » (provinces, promoteurs, industries redondantes – tous fruits du mariage entre une administration inamovible et un crédit débridé sans exigence de rentabilité). En novembre, ces prêts atteignaient 11% de tout le crédit de l’année, avec une hausse annuelle de 50%. Ceci indique bien leur vocation : le refinancement à taux plus élevé, de prêts que les emprunteurs ne parviennent pas à rembourser. 

C’est sur cette toile de fond qu’il faut observer le document n°107, projet de cadre du crédit, encore officieux mais qui circule. Rédaction collégiale de la Banque Centrale de Chine et des tutelles des banques, de l’assurance et de la bourse, il dresse des lignes directrices destinées à être précisées par les tutelles. A travers ce document, l’autorité se déjuge en partie, par rapport à son évaluation de décembre bien plus dure sur les prêteurs de l’ombre. Désormais, le crédit gris est décrit comme « inévitable et bénéfique… au citoyen ordinaire ». 

Ce document distingue les maisons opérant sans licence ni règlements (tel le crédit sur internet), celles licenciées mais mal réglementées, et celles licenciées et mal gérées comme les trusts. Ce sont ces derniers qu’il entend discipliner: les trusts devraient retourner à leur mission première, la gestion d’actifs, et renoncer aux prêts usuraires à risque, en collusion avec les banques. En tout cas, l’administration est claire sur un point : ces prêts, s’ils existent, ne peuvent en aucun cas être garantis mais restent clairement au risque de l’emprunteur. 

En même temps, le Conseil d’Etat annonce la préparation de « 3 à 5 premières banques privées », qui viendront rejoindre la Minsheng comme précurseurs de la banque non-étatique. Parmi les demandeurs, figurent les groupes Suning (1er distributeur national d’électroménager) et Tencent (poids lourd de l’internet social, notamment avec QQ et WeChat). 

Soyons clairs : de prime abord, ce texte a du mal à convaincre. Il est trop souple, trop indirect et évasif, laissant aux tutelles tout loisir de négocier entre elles les modalités d’application, et aux banques et aux trusts, de poursuivre leur fructueuse association. De même, le pouvoir central parle de freiner la croissance de la dette, mais reste muet sur les moyens pour la réduire. A ce jour, il semble encore passif, face aux pressions des banques et de leurs tutelles—comme « timide », face aux pressions des provinces. Au risque de vulnérabilité en cas de forte surchauffe.

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