Alors que les
Etats-Unis dévoilent au monde (19/02) l’existence à Shanghai de l’« unité 61398», cellule de l ’APL (armée) spécialisée dans le hackage de masse (cf photo), le pays fait lumière sur une autre forme d’ espionnage : l’effort surhumain de la classe dirigeante pour s’espionner elle-même. En décembre 2012, l’hebdomadaire Nanfang Zhoumou dressait le portrait de Qi Hong, ex-dératiseur de caméras et micros chez les hauts cadres -regard inquiétant sur une ambiance sulfureuse !Discrètement invité à travers le pays, Qi Hong parvint en 2011 à « débugger » 300 caméras et micros dans les voitures, les bureaux et chambres d’une centaine de hauts cadres (gāo gànbù). Loin d’émaner de la seule CCID (Commission centrale d’inspection de la discipline – la police du Parti), ces outils avaient aussi été « planqués » par des épouses jalouses, amantes et collègues, agissant par intérêt personnel (pour s’assurer la fidélité du mari, de l’amant, ou la place du chef). Détail formidable, Qi Hong remarque que la prolifération de ces écoutes est justifiée par leur rentabilité : invariablement, on trouve un agissement illégal, permettant au possesseur de l’info de faire chanter. Le délogement de l’équipement est souvent suivi de réactions surprenantes, tel l’évanouissement. Puis l’espionné exprime le besoin de se confesser au « dératiseur » en un plaidoyer peu crédible, niant toute faute.
Un tel choc induit un tournant dans la vie. Certains redeviennent honnêtes. D’autres renforcent la sécurité pour empêcher une autre intrusion, ou font infester le bureau de l’attaquant présumé. D’autres flattent leurs chefs, pour tenter de les convaincre de couvrir leur faute. Tous cherchent la source de l’action : si c’est la CCID, ils s’organisent avec les collègues pour tout nier en bloc afin d’« assurer la sécurité et la stabilité des intérêts collectifs ».
Les ronds de cuir ont mis au point deux parades contre micros et caméras : l’accolade prolongée quand on se rencontre, permettant à chacun une discrète fouille de l’autre ; et les palabres au sauna, en tenue d’Adam, avec le cas échéant, un cabas rempli de numéraire, prix de la corruption.
En fait, cette corruption paraît un système obligatoire : pour s’enrichir, le chef doit « mouiller » ses inférieurs. Parfois, Qi Hong vit un cadre piégé par son chef, parce qu’il refusait de jouer ce jeu : quand le subordonné finit par céder et prendre son enveloppe, il fut immédiatement dénoncé -c’était un piège – et partit en prison.
Quelque part, cet espionnage privé peut être considéré comme réminiscence de la Révolution culturelle, où l’on dénonçait ses parents pour sauver sa vie. Joue aussi la sophistication et la baisse de coût de l’électronique. L’absence de loi est la clé de voute, permettant aux chefs de détourner impunément, et à leurs proches de les dénoncer, par un mélange de « justice expéditive » et de goût du lucre, la valeur ayant pris la succession de la morale socialiste.
À Qi Hong, un chef d’unité de travail avait déclaré : « dans ma danwei, c’est ma parole qui fait loi ». Qi en conclut que ces écoutes, face à de tels tyrans, sont une autodéfense. Découragé, le détective a quitté ce métier, ayant détecté, sans vouloir le dire, que par son bas niveau de confiance mutuelle, la haute société chinoise est bien vulnérable à l’avenir !
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Jean
26 février 2013 à 08:39A quand le micro digestible pour la détection des conversations intérieures et qui résistent aux flux d’acides gastriques consécutifs à l’ingestion intempestive de pets de nonne?