Architecture - Urbanisme : Daxing, le nouveau tapis volant de Pékin

Daxing, le nouveau tapis volant de Pékin

Cinq ans après le lancement de son Terminal 3, Pékin reçoit le feu vert (22/12) pour son prochain aéroport, Daxing. L’architecte reste à désigner parmi les finalistes Jean-François Vigouroux pour ADPi, Norman Foster et Zaha Hadid

Foster part avec le handicap qu’après cinq ans, le satellite central de son Terminal 3 connait des difficultés d’exploitation. Hadid, elle, avec le panache qui la caractérise, soumet un projet flamboyant mais qui pourrait faire peur. Derrière ces ténors, ADPI a donc une vraie chance… à soutenir par François Hollande lors de sa visite en avril !

Le master-plan (cabinet néerlandais Naco–cf photo) émet l’ impression de démesure. D’un invest initial de 11,25 milliards de $, il déploiera 7 pistes d’envol sur 55 km², et traitera 45 millions de passagers à l’ouverture en 2018, 70 millions à maturité. Il desservira l’alliance Skyteam (China Southern, Air France…), laissant l’autre club mondial Star Alliance se redéployer sur BCIA, l’aéroport actuel. Tout est pensé pour limiter les émissions de CO2 et gagner du temps. Le roulage (taxiway) sera limité, une gare multimodale combinera bus et taxis, un terminal TGV, une liaison fer inter-aéroports, un métro classique et une ligne express en 30min. vers la Gare du Sud). 

Une des 7 pistes sera réservée aux militaires. Mais cette coexistence ne va pas de soi, selon Liu Weimin, professeur à l’Institut de management de l’aviation civile (Pékin). À ce jour, l’APL a priorité absolue sur l’espace aérien, et est peu connue pour sa souplesse dans la négociation. De ce fait, surtout si elle opère sur le même périmètre, rien ne l’empêche de stopper le trafic civil, chaque fois qu’elle en aura besoin (déplacement d’un dignitaire, exercices…). « La loi de 1995, précise Liu, doit être révisée, après 18 ans de bouleversements sociétaux. Il faudrait renforcer les droits de l’aviation civile ». Le vrai problème est donc la congestion des voies aériennes, induit par le monopole de l’armée sur l’espace aérien – problème structurel que la construction d’un aéroport ne le réglera pas. 
Petit signe qui ne trompe pas : ce projet attendait depuis 2008 son feu vert au Conseil d’Etat et à la Commission Militaire Centrale, qui semble donc avoir fait durer les choses !

D’autres doutes sont émis par des observateurs occidentaux. Le lancement immédiat du projet est justifié par l’urgence, suite à la croissance du trafic, ayant atteint 82 millions de passagers en 2012 (+4,2%) : Beijing Capital Airport serait donc saturé. Mais ses terminaux 1 et 2 sont loin de l’être : « ils prennent la poussière », dit cet expert. Pour l’économiste P. Chovanec, ce projet a pour finalité réelle, inavouée, de maintenir la course au PIB, avec peut-être 50.000 emplois directs pour 5 ans, et bien plus d’emplois dérivés. 

Son financement n’est pas non plus garanti, pour un Etat devant concilier dette publique, sauvetage de secteurs en difficulté, taxation modérée et expansion monétaire raisonnable. Vu ainsi, Daxing semble un héritage du gouvernement précédent, inspiré par le modèle de développement « par l’investissement public » (dont le tandem Xi Jinping-Li Keqiang voudrait se distancier), plutôt que par celui basé sur « le marché et l’économie durable ». 

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