Editorial : Plenum : le pari d’un nouveau départ

Plenum : le pari d’un nouveau départ

Xi JinpingLe 06/11 à l’aube, sept bombes artisanales explosèrent à Taiyuan (Shanxi) devant le siège du Parti. Bilan : 1 mort, 8 blessés. Neuf jours après l’attentat de Tiananmen ( a rticle suivant) et 72h avant le 3ème Plenum du 18ème Congrès du PCC (09-12/11), ces frappes trahissent une forte tension et l’incapacité des forces de l’ordre à neutraliser de telles actions à la source. 

Sous l’angle de la gouvernance de l’Etat, le problème que doit affronter le Plenum, est le mécanisme légué par Deng Xiaoping pour prévenir une dérive dynastique, style Corée du Nord. 

Durant 30 ans, le système a fonctionné – le pays fut dirigé collégialement. Mais il fallut payer le prix fort : à de rares exceptions, nulle grande décision ne fut prise. Faute de consensus, le pouvoir n’a jamais pu remettre en cause une gestion sociale, même si celle-ci est génératrice d’instabilité, comme le suggère l’attentat de Tiananmen, commis par des Ouighours du Xinjiang.

Or, divine surprise, face à toutes ces tendances et lobbies, Xi Jinping (photo) a su s’imposer à une vitesse étonnante, via sa campagne anti-corruption

La semaine passée, 10 équipes de limiers étaient lancées sur diverses cibles : agences (Xinhua), ministères (Commerce), provinces (Canton), compagnies publiques («3 Gorges») – pour débusquer des fraudes et surtout, morceler le glacis de la résistance au changement. Un autre outil est l’action de Xi, d’« éducation des cadres », en de longues réunions, au style froid, vertueux et jacobin. 

A l’agenda du Plenum figure d’abord la réforme foncière.
– Evitant la privatisation totale des terres (elle serait pour 2020), Xi veut offrir au paysan un titre de propriété sur terres constructibles.
– En réforme du crédit, il s’agit de libérer les taux d’intérêts puis la convertibilité du yuan, d’ici 10 ans.
– En réforme bancaire, de permettre l’ouverture de banques privées et le dépôt de bilan des banques – après création d’un fonds de garantie pour les déposants. 
– Provinces et villes auraient 10 ans pour renoncer aux expropriations comme source de revenus. En retour, elles pourraient lever des obligations et recevoir une quote-part de la taxe foncière qui, d’expérimentale deviendra universelle.
NB : la recapitalisation des provinces est légitime et urgente. Avec 2300 milliards $ de dettes, elles supportent 80% des charges pu-bliques en ne recevant que 50% des recettes. 

Parmi plusieurs projets explosifs de réformes, comptent : Œ
1. l’élimination des tampons, choux gras des administrations qui étouffaient l’industrie. Déjà 334 licences abolies en 2013, permettent la création de 25% de nouvelles entreprises.
2. La hausse d’impôts des consortia d’Etat qui, sous prétexte de leur statut « stratégique », protégés par leur tutelle de la SASAC, ne reversent que 5 à 10% de leurs profits au trésor public. Ž
3.Terrible outil discriminatoire des paysans, le hukou (permis de résidence) disparaîtra. 
4. La sécurité sociale sera fusionnée – quittant sa province, le migrant gardera ses droits cotisés.
5. Le quota d’un enfant par couple serait aboli. ‘
6. 36 millions de logements sociaux seront bâtis d’ici 2020, avec leurs hôpitaux, écoles, maisons du 3ème âge… ’
7. La réforme juridique fleurira (comme test) dans les nouvelles zones franches. Si Xi Jinping a gain de cause, ces zones seront placées sous juridiction internationale, avec tribunaux indépendants. 

Quoique sorties des sphères du pouvoir, ces mesures semblent improbables, à contre-courant de la tradition : nombre de témoins avertissent de désillusions inévitables. 

Nonobstant depuis l’été, de petits pas suggèrent que le pays s’y prépare. Par dizaines, d’ex-gardes rouges viennent soulager leur conscience et demandent publiquement pardon à ceux qu’ils torturaient 40 ans plus tôt –parfois, ils l’obtiennent. 

De même Jung Chang, l’auteure des « Cygnes sauvages » (dénonciation de la révolution culturelle) publie un ouvrage qui fait grand bruit, réhabilitant Cixi (1836-1908), qualifiée depuis un siècle de « dragon en jupon et d’être diabolique », l’impératrice douairière est décrite ici comme intelligente et nationaliste, précurseur de Deng, championne du libéralisme et de la collaboration avec l’Occident. Autant de signes d’une Chine qui affronte les démons du passé, prête à tourner la page pour aller de l’avant. 

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