Sur le front diplomatique, on assiste à une déferlante de visites et d’initiatives, signes de l’énergie déployée depuis toujours par ce pays pour (re)prendre sa place dans l’ordre mondial :
– Avec le Japon, la situation n’en finit pas de s’envenimer, à propos de l’archipel des Diaoyu-Senkaku.
Pékin multiplie les incursions en périphérie – bombardiers et garde-côtes des deux pays se croisent en grondant. Sh. Abe, le premier ministre nippon, autorise ses forces à abattre tout drone chinois dans son espace aérien. Les deux camps se taxent d’« arrogance », d’« irresponsabilité », et la presse chinoise appelle même à la guerre : « assez discuté »!
Un vieux témoin, S. Rittenberg pense que Xi Jinping cherche à acculer Tokyo à admettre l’existence d’un problème sur l’archipel, ce qu’il dénie. Le climat délétère pousse le laitier nippon Meiji à sortir du marché chinois du lait maternisé – au moment où tous les étrangers renforcent leur production, face à une forte demande.
Dans cette spirale infernale, des hommes gardent tête froide: en marge du Beijing Tokyo Forum (26/10, Pékin), l’ex-1er ministre Y. Fukuda et le ministre des Affaires étrangères Wang Yi discutent courtoisement des heures durant, sur la meilleure stratégie collective pour remettre la relation sur ses rails…
– Avec la Russie, après 10 ans, les pays ont pu enfin « toper-là ! » sur le contrat pétrolier du siècle. cf photo Xi Jinping et Medvedev, le 23/10 à Pékin. Chaque année d’ici 2023, Rosneft livrera 10 millions de tonnes de brut à la CNPC, pour un coût global de 85 milliards de $. Gazprom livrera 38 milliards de m3, puis 60 milliards de m3/an, selon une formule tarifaire convenue.
Ce deal était si difficile, car alléguant l’énormité de son marché, Pékin voulait une ristourne, et Moscou craignait de casser son prix imposé à l’Europe. L’accord fut trouvé, car la Chine a besoin criant de gaz, et Rosneft, de cash pour payer le rachat (55 milliards de $) de TNK-BP, la JV sibérienne de BP. Par ce contrat, et d’autres, la Chine va dépasser d’ici 2020 les USA comme 1er importateur, frôlant le quadruplement à 9,2 millions de barils/jour sur 2005. Avec la Russie, un grand chemin a été parcouru depuis les 30 ans de guerre froide entre ces deux géants, qui s’achevaient en mai 1989.
– Face aux Philippines aussi, c’est l’embellie.
En septembre, Manille accusait la Chine d’avoir coulé des fondations en béton sur l’atoll de Scarborough, non loin de son île de Palawan. Mais le 24/10, toute honte bue, B.Aquino, le Président philippin avoue son erreur : ces blocs étaient en fait de vieilles structures, sans danger.
Déjà en 2011, les Philippines reprochaient à l’APL de préparer un chantier sur un autre îlot qu’elles revendiquent dans les Spratleys (l’Amy Douglas Bank). Autre signe de réchauffement, Philex Petroleum (Philippines/UK) négocie avec CNOOC pour une exploration conjointe dans le Reed Bank, autre zone en litige.
Ici aussi donc, progrès, par rapport à septembre où Aquino annulait son voyage à Nanning (Guangxi) pour la Foire China ASEAN, quoique son pays en fut l’invité d’honneur : c’était suite à la demande par Pékin qu’il retire sa plainte devant une cour d’arbitrage de l’ONU sur le litige en mer de Chine du sud (avec revendications de 5 pays). .Ces concessions d’Aquino peuvent répondre au changement d’attitude perceptible à Pékin, qui tente d’infléchir sa ligne dure, et de positiver ses relations avec ses voisins pour prévenir la constitution d’un glacis de défense sous la houlette américaine.
– Jamais deux sans trois : l’Inde elle aussi, est tout sourire, après l’accord de défense signé à Pékin par les premiers ministres Li Keqiang et Mannohan Singh (23/10) pour prévenir tout conflit dans les Himalayas à l’avenir.
Sommaire N° 34-35