Le dialogue avec les USA, qui reste le plus essentiel pour Pékin, n’a pas tardé à reprendre. Après son « élection » du 15/03, Xi Jinping recevait l’appel d’un B. Obama, le félicitant ET lui signalant ses soucis sur le taux de change du yuan et sur le massif hacking chinois contre des centaines de sites américains. Puis arrivait le Secrétaire d’Etat au Trésor J. Lew (18-19/03) (cf photo) suivi de l’appel à Wang Yi, ministre des Affaires étrangères, de J. Kerry (20/03) précédant sa venue en avril, ainsi que celle du Général M. Dempsey, patron de l’état-major américain interarmes. C’est une ruée de négociateurs américains qui débute. Reçu au «top niveau », Lew a rencontré Xi Jinping, Li Keqiang, Lou Jiwei (ministre des Finances) et Zhou Xiaochuan (Gouverneur de la Banque Populaire de Chine).
Lew réclame la « réduction » des barrières au commerce et à l’investissement – il ne va pas jusqu’à espérer leur levée, qui mettrait les géants US de l’internet, de la banque ou de la bourse, sur pied d’égalité avec leurs homologues chinois sur le marché chinois, et supprimerait les nombreux cas de dumping à l’export. Le côté chinois lui, brandit un langage plus militant, offrant de « bâtir l’avenir dans une vision stratégique et de long terme ». On sent une fenêtre d’opportunité chez ces nouveaux gouvernements, ces hauts cadres, dont la démarche vers l’autre est souvent la première dans leur nouveau poste.
Comme la vague porte le surf, la coopération déjà intense des années passées porte cette demande de rapprochement. Par ses achats massifs de bons du Trésor, Pékin est de facto le banquier des USA (d’où la visite de Lew, ancien expert des finances). Les USA en 2012 haussaient de 4,5% leurs IDE en Chine, quand ceux du monde reculaient (–3,7%), et le commerce bilatéral progressait à 485 milliards de $ (+8,5%).
Bien sûr, ces espoirs d’entente sont tempérés de méfian-ce réciproque. La plus forte est militaire : un peu comme la Russie sur sa côte d’Extrême Orient, et pour les mêmes raisons, les USA réarment. Ils équipent la Corée du Sud en missiles « pour se défendre de la Corée du Nord », et S. Locklear, commandant de l’US-Army en Asie Pacifique, discute avec le chef des forces nippones, S. Iwasaki, de réactions groupées en cas d’invasion chinoise des îles Diaoyu-Senkaku.
Une autre action est législative : la 3ème tentative au Congrès pour forcer la Chine, par rétorsion sur ses exports, à laisser son yuan flotter selon la loi du marché. Essai pas forcément légitime, et peu dangereux : deux projets du même type ont échoué en 2011 et 2012, le yuan s’étant apprécié de 16% depuis lors.
Dernier contentieux, le projet américain de Traité de libre échange (TPP) entre 11 pays du Pacifique (dont Philippines et Vietnam) devrait se conclure en 2013, laissant la Chine dehors. Par la voix du vice-représentant au Commerce, D. Marantis, Washington joue l’ambigüité, affirmant que le TPP reste « ouvert à la Chine, mais qu’il lui faudra pour réussir, maintenir de hauts standards de négociation ».
Au final, ce qu’il faut retenir, est l’évidente volonté des partenaires de s’entendre. Vu les moyens déployés, ils ne peuvent que réussir. L’inconnue est jusqu’où ils veulent aller, moyennant quelles concessions réciproques, et en intégrant où non les autres nations, leurs partenaires… Les rênes sont dans les quatre mains de Xi Jinping et d’Obama !
Sommaire N° 11