Investissements : Rêves de puissance et nouveaux joujous

Trois formidables projets d’infrastructure apparaissent au tournant de 2012 : outils de prestige, de puissance et de confort du peuple, d’une échelle de grandeur prêtant à rêver. 

Métro pékinois : quatre lignes ouvrent au 31/12/2012 : une nouvelle (n°6) et trois prolongées (n°8,9 et 10). 

Ces 70km de rails porteront la capacité de 7,5 millions à 9 millions de passagers/jour. Très subventionné (2¥ par passage), ce réseau pékinois fait désormais 442km et 14 lignes, plutôt tournées vers la banlieue. En 2015, il atteindra 19 lignes et 561km, puis 1000km en 2020.

– La ligne de TGV Pékin-Canton ouvre en fanfare, 2300km en 8h (300km/h) sur ce nouveau tracé via Wuhan, contre 20h à la ligne via Shanghai. 
Dérivé du Shinkansen nippon, le Pékin-Canton offre de brillantes perspectives, dit le ministère. Doté de 400 millions d’usagers potentiels, il acheminera aussi le fret du commerce-internet, dont il divise par 2 le coût d’acheminement. Il libérera sur l’ancienne ligne 20 millions de tonnes de capacité de fret, et mettra 35 villes sur son parcours à portée des marchés de Pékin et de Canton, permettant la naissance de « hubs » et « clusters » de l’intérieur chinois, aux industries émergentes favorisées par leurs salaires plus bas…

Hélas pour d’autres experts, ces perspectives pêchent par excès d’optimisme. À 257¥ (seconde classe.) contre 865¥ au TGV, la plupart des voyageurs resteront fidèles au «vieux» train. De ce fait, très peu de capacité nouvelle de fret verra le jour, prédit Zhao Jian, de l’université Jiaotong (Pékin). Pire, l’explosion promise des hubs est compromise par le retard du «ferroutage» train-camion, du service porte-à-porte de l’usine au supermarché… De leur côté, les compagnies aériennes coupent l’herbe sous le pied du jeune rival, et leurs tarifs, offrant des vols Pékin-Canton à 800¥. Est-ce pour ce TGV le «adieu veau, vache, cochon, couvée» ? En tout cas, il devra batailler des années pour trouver son rôle et atteindre la viabilité.

Beidou (北斗), le GPS chinois est né. 
Appuyé sur 20 satellites (35 en 2020), « Grande ourse » vient d’ouvrir au public, doté d’une couverture étendue de l’Asie à l’Océanie. L’objectif est de générer des services de positionnement à 10m. Près, en concurrence avec le GPS américain, qui détient 95% du marché chinois. D’ici 2020, la Chine espère en avoir récupéré jusqu’à 80%, et générer jusqu’à 80 milliards$ de droits. Un problème est le coût de la carte de réception, très chère. Le coût baissera si les usagers suivent – si les applications sont à la hauteur. 

D’où ce résultat paradoxal, peu courant en Chine : Beidou, projet d’origine militaire, est entièrement ouvert à l’étranger, pour le développement des applications (cf www.beidou.gov.cn). Mais vu l’avance acquise par les fournisseurs de services occidentaux, la jeune concurrence chinoise ne fera pas le poids avant de longues années. 
Ce sont donc deux batailles qui s’ouvrent, à deux niveaux. Celle des réseaux (Beidou contre GPS, le Russe Glonass, l’Européen Galileo, à la traîne), et celle des services (chinois ou étrangers) sur les réseaux : deux batailles que la Chine ne peut gagner, qu’à condition de jouer le jeu de l’ouverture – de la dérégulation et de la fin de la censure. Elle a encore du chemin à faire !

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