Les banques chinoises sont à sec : résultat du resserrement du crédit et des mauvais investissements des provinces depuis 2008 – des centaines d’aéroports, TGV ou fonderies, incapables de rembourser les emprunts. Mais justement, au moment où le risque d’avalanche de mauvais prêts culmine, la baisse par la banque centrale (24/02) du taux de réserves des banques, destinées à éponger ces mêmes faillites, est insolite. C’est pour libérer 63,5 milliards de $ d’argent frais, et relancer le crédit, en recul de 6% en 2011.
De ces 7500 milliards de ¥, les PME n’ont reçu que 19% : ce qui explique leurs sérieuses difficultés de financement.
C’est donc la croissance aveugle que Pékin veut continuer à combattre, le mercantilisme des officiels des régions. Une fuite du prochain discours du 1er ministre Wen Jiabao au Parlement (ANP) le 05 mars prochain dévoile une croissance de « moins de 8% » en 2012, après les 9,2% de 2011 et les 10,4% de 2010. Tous les soucis de cette économie se résument au repli des marchés extérieurs et à la chute de la consommation.
Marchés extérieurs : les tendances sont claires. L’import en janvier a reculé de 15% (pour beaucoup en matières 1ères , et en sous-ensembles et pièces pour montage et réexport), l’export de 0,5%. Ce qui conduit l’Etat à préparer la potion classique à cette maladie : une hausse des primes à l’export, promise (21/02) à Nanchang, par Zhong Shan, vice-ministre du Commerce.
Consommation : l’inflation refait des ravages à 4,5% en janvier, contre 4,1% en décembre.
Comme la rémunération de l’épargne en banque est de 3,5%/an, les petites gens ont perdu cette année 190¥ par 10.000¥. Jusqu’à 2011, les épargnants contournaient le système en prêtant « au gris », à 2 à 4% par mois. Les PME y avaient aussi avantage, s’assurant ainsi un financement souple à court terme. Mais la crise a pris bien des gens par surprise, multipliant les défauts de paiement. L’Etat s’en est mêlé, condamnant à mort 11 prêteurs rien qu’au Zhejiang (dont la célèbre Wu Ying, cf notre petit peuple VdlC n°4). Aussi le marché gris terrorisé se retire, au risque de faillites en chaîne. Comme l’inflation est bien plus forte dans l’alimentaire, la Chine entière change ses habitudes de conso, au détriment du tourisme, des loisirs et de la restauration.
Dernier agent de la crise: l’immobilier. Wen Jiabao veut ramener les prix « à la raison », sans citer de chiffre. Le marché s’attend à une baisse de 20%. En janvier, elle faisait 0,1% à Pékin et Shanghai, 0,6% à Wenzhou. En moyenne nationale, la baisse de 0,2% signifiait pour les propriétaires 140 milliards de ¥ de perte patrimoniale (-1% = 560 millairds de ¥ selon le Bureau national des Statistiques). D’où une autre source de diète pour le commerce et les services.
Ici, une bonne nouvelle : Shanghai prépare le retour du crédit à l’achat d’une seconde maison. Ce qui venait d’être refusé à Wuhu (Anhui) et Foshan (Canton). Signe que l’Etat accepte une goutte de relance limitée.
La raison du retournement est aisée à comprendre. D’après les calculs de J. Antos (Asia Bank), en 41 mois jusqu’en mai 2011, les banques ont doublé leurs prêts pour un encours supérieur au PIB. En 2010, ils faisaient 6500$/habitant, face aux 4400$/habitant du PIB. Mais si l’Etat fait chuter les prix de 50%, causant l’effondrement du marché, maisons et appartements vaudront moins que le reliquat des hypothèques, causant des millions de défauts de paiement. Face à un tel phénomène, capable de tuer les banques, l’Etat n’a pas d’autre choix que de desserrer le lacet !
Sommaire N° 7