Politique : XVIII. Congrès : en surface, le bateau tangue !

Analyser la politique chinoise par les temps qui courent c’est, en citant Voltaire, « peser des œufs de mouche dans des balances en toiles d’araignées », évaluer 100 bruits qui se suivent et se contredisent, fuites authentiques ou écrans de fumée… 

La semaine dernière (cf VdlC n°36), nous relations qu’en 2 mois, quatre lieutenants de Hu Jintao s’étaient vus retirer leur promotion au Comité Permanent, sous prétexte de scandales remués par leurs adversaires. Le dernier en date, Li Yuanchao, était accusé d’avoir falsifié un sondage interne sur la popularité des candidats aux charges suprêmes. Or, à la veille du Congrès, toutes sources le confirment : les expulsés sont de retour, à nouveau « futuribles ». 

Le 07/11, Hu Jintao et Xi Jinping, l’actuel et l’imminent numéro 1, mettent au débat une motion commune qui, si adoptée, pourrait changer l’échiquier et la règle du jeu du système socialiste. Arrêtons-nous un instant : en 2007, Xi était choisi comme n°1 contre la volonté de Hu (qui soutenait Li Keqiang, son dauphin). Xi et Hu sont donc techniquement rivaux, même pour la désignation future du successeur de Xi en 2022 – c’est là tout l’enjeu de la prise de contrôle de la CMC (la Commission Nationale Centrale, l’organe militaire) par Hu, ces dernières semaines.

Or, si Hu et Xi proposent une motion, c’est qu’une alliance s’est nouée : par raison d’Etat et/ou « raison de Parti », pour arracher ce dernier à la spirale dangereuse où l’entraîne son népotisme et son affairisme… Ils proposent que les 2300 délégués élisent le Comité Central avec 40% de candidats de plus que de sièges (soit 300 candidats), et que le Comité élise le Politburo avec 20% en plus (soit 30 candidats). 
Seul le Comité Permanent resterait entièrement coopté. 

Sur le plan pratique, cette ouverture du jeu écarterait du Politburo les candidats à la réputation la plus faible, du genre de ceux qui montent sans se préoccuper de l’opinion. Aussi, cette proposition de démocratie interne permet de mieux comprendre la colère de certains, en voyant tomber les résultats du sondage secret : si vote il y a pour le Politburo, Liu Yun-shan, grand chef de la propagande, risquerait des déconvenues ! 
Sur le plan politique, la motion Hu-Xi permettrait de céder quelque chose à l’opinion, et de redorer le blason : de faire quelque chose de concret pour le « bonheur du peuple », selon le thème de la campagne en cours. 

L’ouverture irait dans les deux sens : 
① les réformateurs les plus engagés comme Wang Yang, de Canton, auraient une chance d’être repêchés.
② des défenseurs de Bo Xilai pourraient s’agréger à l’organe exécutif, quoique adversaires de Hu sur ce point. Ainsi, les ailes du Parti étant représentées, l’appareil gagnerait en sérénité. 

Une nouvelle ouverture « à la Deng » qui pourrait relancer le Parti pour 20 ou 30 ans.
Cela dit, gardons-nous de rêver : ce n’est qu’une motion, et des anciens comme Jiang Zemin ou Li Peng ont toujours loisir de la torpiller par un veto : 慢慢来, « wait and see » !

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