Jusqu’à la veille du XVIII. Congrès, le turbulent « grand Ouest » fait reparler de lui. Au Tibet, en sept jours, sept Tibétains se sont immolés par le feu (dont six morts). Depuis mars 2011, début de la vague suicidaire, 60 hommes ou femmes, moines ou laïcs, du Tibet ou des provinces voisines, se sont immolés. L’Etat central chinois et le gouvernement tibétain en exil se rejettent la responsabilité. Le Dalai Lama refuse de condamner ces suicides, qu’il « désapprouve, mais comprend ». G. Locke, ambassadeur des USA, qui revient d’un voyage privé au Tibet, a pu visiter plusieurs des sites de ces drames humains, et vient d’« implorer » la Chine de réévaluer sa politique tibétaine pour en finir avec ces « incidents déplorables ».
La Chine pourtant, ne manque pas d’initiatives pour tenter d’enrayer cette série fatale. Elle offre 7700 $ de prime à qui dénoncera anticipativement un de ces suicides, et le quadruple, si la délation permet de démanteler le réseau de soutien. Une autre action est ce bizarre parc à thèmes à 4,7 milliards de $ près de Lhassa, dans le but de relancer le tourisme, les affaires, le PIB : showroom de la culture du toit du monde et de son appartenance immémoriale à la Chine…
Depuis août pourtant, une nouvelle prête à plus d’optimisme. Le Dalai Lama reçoit des signes encourageants de l’entourage de Xi Jinping. Sur son ex-royaume, la Chine serait prête à changer : « si Pékin veut discuter, nous sommes prêts à une coopération à 100%». Souhaitons-lui le succès !
Venant du Xinjiang, le son n’est pas plus rassurant. Le 30/10, le ministère des Affaires étrangères avertit que depuis mai, des Ouighours se battent en Syrie aux côtés de la résistance à B. el-Assad. Entraînés hors du pays par l’ETIM séparatiste, ils seraient financés par « trafic d’armes et de drogue, enlèvements, cambriolages ». Et ils prendraient leurs ordres d’Al Qaeda…
Il faut ajouter que le Xinjiang, sous administration chinoise depuis 60 ans, n’est toujours pas pacifié. En juin, police et « comités de quartier » fouillaient à Hotan, au sud, en porte-à- porte, en quête d’écoles coraniques clandestines réputées « foyer de rébellion ». Le 06/08, un raid contre une d’elles s’était soldé par un incendie aux explosifs, causant quinze blessés. Manifestement, le Xinjiang se radicalise et sa lutte s’étend hors frontière, là où il trouve des alliés !
Ce qui, au passage, permet à la Chine de légitimer ses trois vetos successifs à l’ONU à des condamnations du dictateur syrien : comme la Russie, elle redoute que n’émerge, après la chute d’el-Assad, un « Qalifa», panislamique comme celui qui tente de s’instaurer au Nord-Mali, en soutien de tous les terrorismes musulmans. Aussi la Chine fait un appel inattendu, le 30/10, à plus de coopération internationale contre ces groupuscules menaçant « la paix et la stabilité chinoise, mais aussi d’autres pays ». Les 27-28/10, le gouvernement accueillait l’émissaire de l’ONU, l’Algérien L. Brahimi, pour discuter d’une relance des discussions permettant un départ d’el-Assad dans le calme.
Finalement, les immolations tibétaines et les mercenaires du Xinjiang sont des réactions récentes à une politique chinoise ancienne, durcie depuis 10 ans sous Hu Jintao. Toujours mal vécue par les ethnies minoritaires, la stratégie centralisatrice « jacobine » de l’Etat, voit se durcir la résistance, avec des moyens nouveaux et radicaux, forçant la Chine à aller de l’avant.
Sommaire N° 36