Portrait : Portrait : Xi Jinping, l’apprenti empereur

Derrière son impassible moue souriante, Xi Jinping reste une énigme, tantôt étiqueté « conservateur » ou « réformiste éclairé ». Avant tout, il vient du plus haut cercle du pouvoir, des familles des leaders historiques. Son père, Xi Zhongxun (1913-2002), était des « 8 immortels », compagnons de Deng Xiaoping – une aristocratie très fermée, et à qui tout revient.

C’est derrière les murs du privilégié compound de Zhongnanhai, siège du pouvoir à Pékin, que Xi Jinping, né en 1953, passe les premières années de sa vie, jusqu’à la destitution de son père (1962). Durant la Révolution culturelle, Xi Jinping est envoyé au Shaanxi (1969-1975), à la ferme. C’est alors qu’il adhère au Parti (1974) : par pragmatisme, selon une note de l’ambassade américaine dévoilée par Wikileaks, optant « pour survivre, de devenir plus rouge que rouge ». Puis à la mort de Mao (1976) suivent la réhabilitation, le retour de l’âge d’or : à l’Université Tsinghua (parmi les premiers réadmis à cette pépinière du pouvoir), il décroche un diplôme d’ingénieur chimiste (1979), puis passe assistant de Geng Biao, le ministre de la Défense (1979-1982), travaillant ainsi son guanxi auprès de l’APL .

Il suit alors une carrière politique classique, (1982-1985), à Zhengding (Hebei), puis dans la riche province côtière du Fujian où il finira gouverneur (1999-2002), et fervent soutien des hommes d’affaires, proche de Jiang Zemin, l’homme fort de la région. En 2002, il entre au Comité Central, et occupe le poste de n°1 du Parti au Zhejiang (2002-2007). L’année 2007 est charnière : il passe successivement Secrétaire du Parti à Shanghai, directeur de l’Ecole Centrale du PCC et surtout, passe presque directement au Comité Permanent, l’instance suprême – ascension éclair et inouïe. Dès lors, il est adoubé prochain homme à la tête du Parti et de l’Etat, grillant le dauphin de Hu Jintao, Li Keqiang qui n’obtient que le prix de consolation de futur Premier ministre. Hu parvient encore à faire retarder sa promotion comme n°2 de la CMC – mais seulement jusqu’en 2010. Ce poste une fois engrangé, fait de lui le prochain chef militaire suprême.

Ceux qui l’ont approché le disent « confiant, aimable et affirmé ». Il aime le basket, le cinéma (Jia Zhangke, Steven Spielberg), et admire fort les « States » – il rêve d’une alliance avec Washington, qui lui permettrait de s’imposer à l’avenir contre les vieux conservateurs majoritaires au Comité Permanent.

Sur son tapis rouge vers le poste suprême, une « peau de banane » fut glissée en juin (peut-être depuis la LJC, du camp de Hu) : la publication par Bloomberg des + de 290 millions € de sa fortune familiale alléguée, bâtie « à mesure de son ascension ». Mais la fuite n’est pas mortelle : aucun des actifs n’est « directement relié » à Xi, ni à sa femme Peng Liyuan (star militaire de la chanson), ni à sa fille Xi Mingze (étudiante à Harvard). Au contraire, Xi a notoirement averti ses proches de ne pas s’enrichir en se prévalant de la relation familiale. Un autre souci récent, fut l’affaire Bo Xilai, dont Xi Jinping était forcément proche, venant du même cercle. Mais Xi démentait cet été : « ce n’est pas un allié ».

Son programme futur n’est pas tranché. Mais convenant que les « problèmes accumulés … sont sans précédent », il est dit favorable à une « libéralisation économique plus rapide », et même à une « réforme du système politique ». Mais aura-t-il les moyens d’une telle ambition ? Aujourd’hui, rien ne permet de l’affirmer.

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