Politique : Vers une refonte de la maison Chine?

Cette semaine, un étonnant document fuit des hautes sphères du Parti communiste chinois, semblant présager une refonte de la Maison Chine, sous Xi Jinping : une nouvelle grille des ministères. Si elle se matérialisait, elle lui permettrait d’arracher l’administration à sa paralysie et à ses jeux d’influence qui bloquent tant de réformes de fond – celles de la santé comme celle des écoles, de la recherche, des marchés publics.

À la mode occidentale, il s’agit de fusionner les 27 ministères en 18.
Envisagé dès 2008 sous Hu Jintao, un tel élagage avait été abandonné suite au tir de barrage des lobbies. Le projet vise aussi une montée en compétence et en responsabilité des ministères. Il pose mille énigmes : Xi Jinping a-t-il obtenu le feu vert ? Avec quels soutiens ? Pour quand ? Mais même ainsi, ce projet invite à un regard sur les réformes secrètement négociées depuis des années. En voici les grandes lignes :

• Tzar de l’économie, la NDRC (National Development and Reform Commission) perdrait de ses prérogatives pour se muer en Bureau du Plan de Réforme et Développement, voué à des fonctions de recherche et de formulation macroéconomique.
• Le ministère des Sciences & Technologies serait scindé entre ministère de l’Education & Sciences, et celui de l’Industrie & Technologies de l’information. Le ministère du Sol & Ressources minières éclaterait entre un ministère des Ressources environnementales et un ministère de la Construction. Ce super ministère de l’Environnement dirigerait la nouvelle Administration de l’énergie, chargée de réguler les prix des filières fossiles ou renouvelables.
• Un super ministère des Transports engloberait le vieux, tout-puissant min. des Chemins de fer. Le ministère de l’Eau disparaitrait dans un super ministère de l’Agriculture. Renommé min. de la Santé et de la Population, le min. de la Santé absorberait la Commission du planning familial (6 millions d’agents), sonnant peut-être son glas. Le min. des Ressources Humaines & de la Sécurité Sociale irait aux Affaires civiles, donnant un min. du Travail Social. Seraient aussi refondues en une Commission de la « réunification paisible », les forteresses des affaires ethniques, de HK-Macao-Taïwan, et des affaires religieuses.
Pour accélérer la convertibilité du yuan, la Banque centrale deviendrait indépendante du Conseil d’Etat, comme la Cour suprême, patronne des tribunaux – embryon d’une justice plus crédible. Tutelles des banques, de la bourse et des assurances, CBRC (China Banking Regulatory Commission), CSRC (China Securities Regulatory Commission) et CIRC (China Insurance Regulatory Commission) deviendraient un arbitre unique de la finance, sous le Conseil d’Etat – signe potentiel d’une Chine enfin mure pour des groupes financiers multicartes, surmontant ses décennies de résistance d’origine idéologique. 

À l’inverse, SARFT (State Administration of Radio, Film and Television), GAPP (General Administration of Press and Publication) et Administration des Sports seraient incorporés au ministère de la Culture, et l’Administration des taxes dépendrait directement du ministère des Finances –prémisse à une vaste réforme de la taxation. 

Enfin seuls l’Armée, la police, le Parti et une poignée de ministères tel le ministère des Affaires étrangères échapperaient au grand chambardement. 
Ce projet verra-t-il le jour ? Vu les rumeurs de dissensions qui s’accumulent, on a du mal à y croire. Mais l’existence même du projet, suggère que le futur leader a deviné la racine de l’immobilisme des 10 dernières années, dans une administration non décisionnelle et taillée en tours d’ivoire. Il montre aussi Xi Jinping comme un homme doté de plus de volonté d’agir, d’alliés et de pouvoirs que l’on ne le soupçonne à présent !

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