Les 4-5/09, l’étape pékinoise d’Hillary Rodham Clinton, sa dernière en qualité d’émissaire des USA, était le pivot d’un voyage de 11 jours à travers six pays pour préparer un sommet d’Asie Orientale à Phnom Penh, en novembre.
Le président B. Obama devrait aider la région à parler en front uni à la Chine, sur la question du partage de la mer de Chine du Sud et de ses îles. Il devrait aussi faire adopter à tous un Code de conduite contre les conflits maritimes. Sur la zone, cinq nations riveraines ont des revendications locales, la Chine prétendant à l’intégralité de la zone. L’initiative s’inscrit dans le retour des USA en zone Pacifique depuis 2010, suite à leur désengagement d’ici 2014 sur les fronts irakien-afghan. Faut-il le dire ? Cette offensive diplomatique ambitieuse doit aussi servir au candidat Obama à remporter ses élections du 4 novembre.
Aux offres de coopération de Clinton, la réponse de la Chine a été double, ambigüe voire contradictoire :
[1] C’est aux nations « directement concernées » de régler leurs problèmes avec elle (les USA devraient se retirer), mais
[2] Pékin aurait aussi assuré la Secrétaire d’Etat d’être prête à «travailler avec ses voisins pour résoudre la dispute pacifiquement». Invariable depuis 10 ans, la position de la RP Chine est que la mer de Chine lui « appartient historiquement », et que chaque riverain devrait venir « négocier » à Pékin sa revendication, sous droit chinois. Tandis qu’ASEAN (Association des Nations d’Asie du Sud-Est ) et Washington attendent une négociation multilatérale, dans le cadre de la Convention de l’ONU du droit de la mer (dont Pékin n’est pas signataire).
La même ambigüité fut constatée au niveau de l’accueil de l’envoyée spéciale.
Hillary Clinton fut reçue par les plus hauts personnages : son homologue Yang Jiechi, le Président Hu, le 1er ministre Wen, le vice 1er Li Keqiang… Sauf Xi Jinping ! Le futur Président déclara forfait, sous prétexte officieux d’un lumbago le forçant à annuler ses rendez-vous du jour, dont celui avec le 1er ministre singapourien. Cependant, contredisant ce tapis rouge digne d’un chef d’Etat, la presse critiqua H. Clinton par un tir d’articles acerbes, avant même son arrivée, fort inhabituel dans un pays plus connu pour ménager la face des hôtes, même adversaires.
Pour mémoire, signalons que le « dialogue » (ou plutôt le double monologue) n’a permis nul progrès sur les autres dossiers abordés, Syrie, Corée du Nord, Soudan, où les deux pays s’opposent matériellement et idéologiquement.
Cette ambiance trouble de rivalité et d’attraction réciproque est en fait partagée par les deux gouvernements, tous deux en phase de renouvellement et donc momentanément sourds à toute concession. Tous deux mènent surtout une lutte de longue haleine pour l’influence sur la région.
Mais justement, revenons sur le forfait de Xi Jinping au rendez-vous avec Hillary R. Clinton. En février 2012, le futur président chinois avait fait aux Etats-Unis un voyage à succès, où il avait offert à Barak Obama de porter les relations à un niveau jamais atteint, moyennant des concessions mutuelles.
A six semaines de son accession au pouvoir, son lumbago pourrait être une manœuvre, pour contourner deux risques. En rencontrant l’émissaire américain, il eût été obligé, soit de manier le langage intransigeant du pouvoir actuel (et de bien mal poursuivre la relation), soit de se voir critiqué pour s’en être distancié. Tandis qu’en restant au repos, il préservait l’avenir proche (son intronisation comme n°1), et le moyen terme, c’est-à-dire la relance de la Chine, des USA (voire du monde) par l’alliance sans précédent qu’il ambitionne !
Sommaire N° 28