Le 20/08, le procès-éclair de
Gu Kailai s’est conclu à Pékin : reconnue coupable du meurtre en novembre 2011 du Britannique N. Heywood, l’épouse de Bo Xilai est condamnée à mort avec sursis.Sans éclaircir aucune des questions sur les circonstances, le verdict en pose même de nouvelles, relevées par le réseau social Weibo. Avec son physique si différent, la femme au box des accusés était-ce bien Gu ? D’autres calculent que la peine réelle infligée (la perpétuité) pourrait en fait se limiter à 9 ans, en faisant jouer la remise de peine « médicale »… D’ailleurs, où se trouve Gu Kailai ? En prison ? En résidence surveillée ? Top secret !
Ce qui est clair, est que l’affaire a été jugée au pénal, expurgée de sa racine politique. Jamais le nom de Bo Xilai n’a été cité. Ni les tractations qui planaient alors entre lui et les différentes mouvances (« club de Shanghai », « clan des petits princes »), que le scandale a interrompu, tout comme sa carrière.
On sait déjà que ce choix judiciaire, adopté aux plus hautes instances du Parti et de l’armée, visait à enrayer tant que se pouvait la perte d’image du régime, et à éviter la déchirure entre diverses fractions. Car Bo Xilai est issu de la nomenklatura (fils de Bo Yibo, un des 8 « immortels », compagnons de Deng Xiaoping). Et dans ce tout petit groupe de familles qui tiennent le pays, une seule règle tacite compte : « vous respectez nos enfants, nous respectons les vôtres ».
Quelles suites peut-on attendre dans la gestion de ce scandale ? Quelles sanctions pour Wang Lijun (ex-bras droit de Bo), l’homme par qui le scandale arriva en février – quand il fuit au consulat américain de Chengdu ? Et pour Bo, sous le coup d’une instruction pour « sérieuses violations à la discipline » ?
D’autres fautes ont déjà été relevées contre Bo, comme cette condamnation à deux ans de camp contre un de ses détracteurs, que la Cour Suprême cassa cet été (une procédure rarissime en justice chinoise).
Bo est aussi soupçonné d’avoir brisé des entrepreneurs (sous prétexte de « mafia ») et confisqué leurs fortunes pour financer ses projets géants d’infrastructures : bravant la police secrète, certains se rendent à Pékin pour approcher la presse étrangère, se plaignant d’expropriations et de sévices de la part du tandem, aujourd’hui séparé et ennemi, Bo Xilai et Wang Lijun !
Vendredi 31/08, grande surprise, à l’issue des 5 jours de meeting du bureau du Parlement (ANP), contre toute attente, Bo Xilai n’y est pas destitué de son mandat d’édile, « du fait » (explique un port- parole) « que nul ne l’a demandé ». Ce qui a pour effet, entre autres, de maintenir le leader hors des griffes de la justice. Cela signifie aussi que le soutien à Bo, au plus haut lieu, reste suffisant pour geler la situation. Pour longtemps ?
Sans doute pas. Hu Jintao attend l’imminent Plenum du Comité Central, avant le XVIII. Congrès, pour briser les dernières défenses de l’ex-« roi » de Chongqing : impossible de procéder à la nomination d’un nouveau pouvoir et à l’approbation d’un programme de réformes, avant d’avoir préalablement nettoyé de façon crédible les écuries d’Augias.
Quelque soit le résultat de cette issue, dans ce jeu d’ombres, on peut prédire une baisse de crédibilité irréparable à court terme, pour l’image du Parti, endommagée par cette sanglante saga de familles de leaders au-dessus des lois.
Sommaire N° 27