Un temps protégée de la crise mondiale par sa non-convertibilité, la Chine commence à tousser, face à l’effondrement de son export. Du coup, à quoi bon investir ? Les banques qui prêtaient 920milliards de ¥ en juin, n’ont plus fourni en juillet que 540 milliards de ¥ (-40%!).
Leurs « mauvais prêts » remontent (à + de 2%, dans le Zhejiang), sous les dettes « triangulaires » entre fournisseurs, transformateurs et commerçants. Aciéries, automobile, électroménager, partout c’est l’explosion des stocks. Juillet-août, l’Agence internationale de l’énergie prévoyait une baisse de la consommation de pétrole de 33%.Et pour le 9ème mois de suite, les patrons commandaient moins de fournitures, avec un indice de 47,8 en août contre 49,3 en juillet (50 étant l’indice d’une croissance étale). Le 26/08, la bourse retombait à son niveau de 2010. Pour la première fois dans son histoire chinoise, un groupe français majeur voyait son chiffre entrer en récession. Sans mystère, la croissance du 2nd trimestre était à 7,6% – à 0,1% du chiffre fatidique équivalent en Chine à une récession.
Certes, ces difficultés ont été en partie « choisies » par le pouvoir : à laisser monter en neige l’immobilier et l’automobile, il risquait l’éclatement d’une bulle, tout en enfumant ses villes et en dépensant des sommes faramineuses en pétrole (importé à 50%, et lourdement subventionné). Aussi depuis 2011, ces secteurs se voient assujettir un frein sévère. Suite à quoi le 29/08, Zhang Ping, à la tête de la NDRC, prétendait voir la « stabilisation » de la crise chinoise, grâce à la cure forcée de ces secteurs, et à un nouveau train de grands travaux annoncé, tels ces 372 milliards de $ de crédits d’ici 2015 aux projets « bas carbone », dont 155milliards de $ aux coupes des dépenses énergétiques. L’essentiel ira à l’industrie, où l’Etat vise une économie de 300 millions de t de charbon/an. Le nombre d’aciéries devrait se réduire de 25% – surtout par concentration.
Côté logement, dans 44 villes les prix repartent à la hausse : l’Etat laisse faire, pour sauver de la faillite ces groupes de génie civil qui « pèsent » 15% du PIB, et pour renflouer les provinces à sec– de janvier à juillet, leurs ventes de terrains (40% de leurs ressources) avaient baissé de 27,1%.
La semaine passée, Wen Jiabao promet en urgence de redonner force aux exportations. Ce qui se traduira, à court terme, par une accélération des paiements des restitutions à l’export et un renforcement des crédits disponibles à l’assurance-export, accompagnés d’une promesse de réduction des enquêtes et des taxes sur les entreprises.
Mais s’arracher au marasme, le pouvoir, plus ambitieux, prépare depuis des années 3 ateliers géants afin de changer de modèle de croissance : il s’agit de déréguler le crédit (laisser les banques publiques, privées et étrangères commercer librement en yuan convertible), le foncier (reconnaître le droit inaliénable d’usage du sol), la taxation (pour offrir en impôts à l’administration les ressources qu’elle aura perdue en saisies), et assurer la redistribution plus équitable du PIB aux citoyens.
En définitive, c’est à ces tâches (plutôt qu’à des réformes purement politiques) que devrait s’atteler le Comité Permanent, rajeuni et décisionnel, de Xi Jinping, et sur elles qu’il devra être jugé.
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Jean Sévery
7 septembre 2012 à 04:30Une avalanche de chiffres recouvrant le corps pantelant de l’économie chinoise dont l’enveloppe politique crève sous la pression des gaz de décomposition issus du duel sanglant que se livrent les factions qui se déchirent le pouvoir. En attendant, les asticots et les observateurs étrangers se frottent les mains avant de passer à table et de dépecer le corps du délit. Un régal pour les lecteurs, cher Eric.