Est-ce un stimulus, comme celui qui avait surpris le monde en 2008, avec 600MM$ de crédits jetés en pâture aux groupes publics ? Ou bien une « inflexion » succédant à 18 mois de gestion déflationniste de l’économie ?
À Wuhan (25/05), le 1er ministre Wen Jiabao annonça la couleur en évoquant un « objectif de croissance » cette année, avec un bond au 2nd semestre à 8% voire 8,6%. Mais il mit les points sur les « i » : pas question de réitérer le « banquet gratuit » de 2008, avec les fruits qui suivirent (dette chronique, surcapacité, inflation). Il n’y aura que 315 milliards de $ maximum, la moitié du plan précédent.
En fait, il a déjà commencé. De janvier à avril, la NDRC (National Development and Reform Commission) approuva 868 projets d’infrastructure contre 363 pour tout 2011.
Le seul 21/05, un véritable inventaire à la Prévert était tamponné : 100 projets d’énergies, de rail, de télécoms, deux aciéries au Guangdong et au Guangxi, deux aéroports à Qingyang (Gansu) et Shihezi (Xinjiang). Idem, elle débloquait 66milliards de ¥ pour la construction de logements sociaux en 2012 et 26,5 milliards en primes à l’achat d’appareils à économie d’énergie.
Le 30/05, le Conseil d’Etat listait 7 types d’investissements prioritaires d’ici 2015, en environnement, économie d’énergie, biotechnologie, nouveaux matériaux, voitures électriques… Fait à noter au Guangdong et au Guangxi, la NDRC voit d’ici 2015 la coulée d’acier maigrir de 26,8 millions de t d’ici 2015, ce qui suppose des fermetures d’outils obsolètes ou en surcapacité – c’est-à-dire laisser faire la nature et accepter les faillites quand elles arrivent. Vaste programme que n’approuvent pas forcément provinces et lobbies pratiquant la subvention instinctive.
Des éléments de réforme fiscale sont lancés pour prévenir les effets pervers. Au 01/07, dans Pékin après Shanghai, un programme pilote remplacera la taxe d’affaires par la TVA sur certains secteurs (11% pour les transports, 6% aux services).
L’argent du crédit frais proviendra de la baisse des réserves bancaires (2 à 3 nouvelles coupes prévues en 2012), et du capital privé. Le 26/05, la SASAC (State-Owned Assets Supervision and Administration Commission) émet des lignes directrices mettant capitaux privés et publics à égalité pour le rachat de firmes publiques, et la NDRC ouvre au privé tous les secteurs de l’énergie. La CSRC (China Securities Regulatory Commission) rend les firmes privées éligibles à la bourse, chinoise comme étrangère, et à l’émission d’obligations.
Mais l’étude du plan (de ce qu’on en sait) laisse un goût de pas assez. Parallèlement au rétablissement du crédit, Chen Fulin, de la NDRC, préconisait de remonter le taux d’intérêt au niveau de l’inflation prévisible, pour faire payer aux Grandes entreprises d’Etat le coût réel du crédit, et de restaurer un pied d’égalité avec le privé (jusqu’alors forcé de se financer à taux usuraire). De plus, ces groupes publics sont pour l’instant trop peu taxés, à 15% maximum. Il se dit que le taux pourrait passer à 25%…
Autre souci : l’Etat veut mettre à portée du privé les chasses gardées des marchés publics, mais les textes ne sont pas encore là, ou pas mûrs, ou pas testés. Face à ces projets « mixtes » qui lui sont offerts, l’entrepreneur privé risque fort, pour commencer, de préférer passer son tour. Enfin un autre sérieux aléa à ce plan, est le moment de sa mise en oeuvre. Ceux qui le lancent ne seront pas ceux qui le mèneront à terme. Or, provinces et monopoles sont hostiles au partage de leurs privilèges.
Loin d’être le coup de fouet de décembre 2008, ce Stimulus apparaît donc au mieux comme une bouffée d’oxygène pour tenir l’économie et la stabilité sociale, en attendant Xi Jinping, après le Congrès d’octobre 2012.
Sommaire N° 20