Economie : Stratégie anti-crise : l’appel au privé

Brider les consortiums d’Etat et rétablir la balance du crédit en faveur des PME privées, telle semble l’ultime stratégie du pouvoir, sous l’impulsion du 1er ministre Wen Jiabao,pour briser le ressort de la spirale récessionniste.

Elle fait écho à  l’économiste A. Kroeber qui parie que la Chine gardera d’ici 2020 une croissance de 7%, avec pour atouts encore 300 millions de paysans, candidats à l’exode vers les villes ; son parc d’infrastructures qui peut encore s’accroître (il fait 2,5 fois son PIB contre 3 fois le PIB en Occident) ; et son besoin prévisible de rebâtir 30% de ses logements, sans cuisine ni salle de bain. Pour les combler, il lui faudrait  10 millions de logements neufs par an – elle n’en produit que 7 millions. Il lui reste de la marge ! 

Certes, les signes de stagnation s’accumulent :

En performances financières, huit groupes publics de la banque à l’internet (Banque de Chine, ICBC (Industrial & Commercial Bank of China), Baidu…) ont perdu l’an passé 9% (selon le cabinet Millward Brown). Dans les ports, les stocks de minerais s’accumulent, et la Banque mondiale réduit son pronostic de croissance à 8,2% (ex-8,4%). Ceci reflète la chute de l’export, mais aussi le fait qu’en 2010 (selon le chercheur Wang Xiaolu ), 2% de la population gagnait 35% du PIB des villes, causant, en plus d’un ressentiment, une perte sèche en marché intérieur.

Aussi voit-on en même temps (17-20/05) l’actuel 1er ministre et le futur 1er ministre (Li Keqiang ), au Hubei et au Jiangsu, annoncer dans l’année une expansion rapide du crédit, un programme fort de logements sociaux et d’hôpitaux, 27MM$ de dépenses environnementales et surtout une fiscalité plus équitable.

D’ici mai à juin, l’investissement privé sera ouvert, via des « lignes directrices » nouvelles de la NDRC (National Development and Reform Commission), dans les chasses gardées de la santé, de l’électricité, des hydrocarbures. L’accès privé sera facilité dans le BTP,  l’eau, le courtage boursier et les équipements publics. En énergie, 100 projets sont déjà identifiés. En ferroviaire, le ministère vante (19/05) l’ouverture des marchés publics, avec comme projet-pilote une ligne à Wenzhou (Zhejiang), d’un coût de 7 milliards de ¥ dont 50% confiés au privé. Mais la confiance n’est pas acquise. Ce n’est pas la première fois que l’Etat « privatise » un secteur, pour le reprendre ensuite, dès que celui-ci se montre rentable. D’autre part, sur ce projet, le pouvoir limite le profit pour le privé à 8%, ce qui manque d’attractivité, alors que le rail qui vient de perdre 1,1 milliards de $ (janvier à mars) est à haut risque pour les particuliers.

Dès le 05/04, Wen Jiabao portait une salve contre les quatre grandes banques, leur reprochant implicitement leurs 165 milliards $ de profits trop faciles de 2011. Il  préconisait leur subdivision, notamment en agences de prêts aux PME qui représentent 99% des firmes, 60% du PIB, 70% de l’emploi, 50% des taxes, mais seulement 20% du crédit (selon le prof. Wang Yijiang). 

Toujours pour élargir les sources de crédit, les bourses de Shanghai et Shenzhen ouvraient le 22/05 le droit aux PME, même non cotées, à des obligations privées.

Enfin, cette volonté de rééquilibrage du crédit en faveur du privé fait déjà face à une levée de boucliers des pouvoirs locaux et de leurs forteresses industrielles. Telle la mairie de Weifang  (Shandong), qui renfloue son groupe textile Helon, en garantissant fin avril son échéance obligataire de 63,3 millions $ à la place des actionnaires incapables de le faire. Ce faisant, elle compromet l’avenir et le marché d’une concurrence locale privée, mieux gérée et plus dynamique, mais sans accès au crédit. Tout cela, au nom de la défense d’un ordre idéologique et de privilèges acquis.

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