Autres : La demi renaissance du cinéma chinois

Au moment du Chunjie, une profusion d’affiches dans les rues, d’une grande variété -comédies, action, ou dessin animé- vantent les films qui sortent, en concurrence pour le chaland. En même temps la SARFT, tutelle de l’audiovisuel publie un intéressant bilan de l’évolution du marché des salles obscures en 2010.

La bonne nouvelle: les 6200 écrans locaux sont pris d’assaut avec +64% de fréquentation en un an. La ville qui s’ennuie et qui s’enrichit, peut se payer les frissons du 7ème art. En 2010, près d’une salle surgit par jour – mais presque trois en 2011. Or, même ainsi, la Chine n’a qu’un cinéma par 200.000 hts contre 1/9000 aux US. D’où l’afflux des investisseurs, 1100 en 2011 contre 500 en 2009: c’est un marché porteur, qui tanne Bollywood pour le 2d rang mondial, avec 526 longs métrages (+15%).

La concentration gagne. Bona (Pékin), un des 6 groupes privés agréés en 2003 entre au Nasdaq (New York). Wanda (Dalian) s’est doté d’un parc de 50 salles à travers le pays, franchissant en 1er la barre du milliard de yuans en 2010. Fait remarquable, ce retour d’amour pour les salles obscures se produit au royaume du CD pirate, qui ne coûte que 8¥ pièce, contre 40¥ l’entrée en salle : les chinois ont vite appris, et veulent « the real thing » !

La mauvaise nouvelle: de qualité médiocre, les films locaux sont boudés. Au box-office, rien que les 2 monstres sacrés américains de 2010, Avatar et Inception ont trusté 20% des recettes avec 300M$… Aussi des 526 films tournés en 2010 (+15%), seuls 200 ont été projetés, dont 80% n’ont même pas récupéré, en recettes, le coût de la production. Deux titres chinois se battent pour la 1ère place, loin derrière les block busters américains : Bullets de Jiang Wen, et Aftershock de Feng Xiaogang, titrant chacun à ce jour 100M$ -la moitié d’Avatar.

Feng explique ainsi le phénomène: «l’époque n’est pas propice à l’émergence de génies en Chine: la tutelle s’ingère trop». Joue aussi l’autocensure de réalisateurs, surgelés dans leur respect de l’autorité et la morale traditionnelle, que les jeunes rejettent dès qu’ils ont le choix. Le comble a été atteint en 2008 avec la sortie de Kungfu-Panda, production hollywoodienne qui présentait correctement la culture chinoise traditionnelle, laissant les Chinois éblouis. Mortifié, le secteur faisait son autocritique, se demandant pourquoi la Chine ne pouvait assurer ce niveau de qualité, au moins sur ce portrait d’elle-même.

La Chine aurait intérêt à trouver une réponse assez vite, n’ayant plus beaucoup de temps. Condamnée par l’OMC, elle va devoir offrir d’ici mars des échéances pour lever ses obstacles à la libre circulation des biens audiovisuels. Après, il sera temps de chercher à rattraper l’étranger sous l’angle de l’élégance et d’un reflet de la vie réelle. Manifestement la Chine, sous l’angle du 7ème art, comme sous tant d’autres comme la recherche ou l’enseignement, se trouve à un tournant de son existence. Ce qui manque à tous ces domaines de création et ce que les professionnels réclament avec toujours plus d’insistance, étant rien moins que « la liberté au pouvoir » !

 

 

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