Temps fort : ASEAN—Chine : banquet servi et huile sur le feu

Entre Chine et ASEAN (Association des Nations d’Asie du Sud-Est), deux sommets, deux dynamiques se poursuivent, imperturbablement quoiqu’en opposition de phase :

à Nanning, capitale du Guangxi, les dix pays d’Asie du Sud-Est + Chine tenaient les 21-26/10 un Sommet d’investissement et d’affaires, qui annonçait la préparation d’une Banque régionale Sino-Asean pour PME. En marge du sommet, l’expo se concluait sur 1,8MM$ de contrats (+5,6%).

L’Accord de Libre Echange, du 01/01/2010 a ouvert les portes mutuelles et fait de l’Asean, le 3ème partenaire de la RP. Chine avec 267MM$ d’échanges de janvier à septembre (+26%) et 19MM$ de surplus à l’Asean. Parmi les 10, l’ALE sourit le plus aux industrialisés, Thaïlande ou Malaisie (50MM$ d’échange pour cette dernière de janvier à juillet), moins à d’autres, tels Indonésie ou Philippines—mais globalement, personne n’y perd.

Durant le sommet, Jin Qi, n°2 à la Banque centrale prédit pour début 2012 un accord de règlement des transactions en yuan avec les 10, échange en RMB qui concurrencera le billet vert. Déjà, au 1er semestre 2011, les transactions en yuan ont progressé à 147MM$, comptant pour 8,6% du commerce extérieur chinois. La Chine veut ainsi accélérer son passage à la libre convertibilité, d’ici 2015. Elle le fait aussi pour arrimer l’Asean à sa zone d’influence et à son « soft power ».

Ce qui a pour effet de contrebalancer l’autre bruit dans la région, celui des bottes et des moteurs des navires militaires. Du 17 au 28/10, alternant combats terrestres et assauts amphibies, 3000 Marines américains et Philippins tenaient leurs manoeuvres annuelles près de San Antonio aux Philippines, non loin des zones maritimes revendiquées par Manille et Pékin. Vertueusement, les deux états-majors juraient que ces exercices de défense ne visaient aucune menace particulière…

Pendant ce temps, à Bali, les 10 ministres de la Défense de l’Asean siégeaient (22/10) en sommet de sécurité maritime, avec un autre « invité » – le directeur du Pentagone, L. Panetta. Manille proposa la tenue d’une session spéciale pour rédiger un code de conduite maritime en Mer de Chine du Sud, espace maritime revendiqué surtout par la Chine, laquelle se verrait ensuite « proposer » ce texte sans avoir contribué à son élaboration -mise devant le fait accompli. La veille, Panetta avait confirmé aux délégués les plans des USA pour renforcer leur présence dans les Océans Indien et Pacifique, pour faire « bien comprendre à la Chine qu’ [ils] allaient protéger le droit international à la circulation maritime». Il confirmait aussi que le règlement des revendications se ferait selon le Droit de la mer de l’ONU : autant de thèses anathèmes à la Chine, qui répondait dans Global Times, promettant des « bruits de canons » si Vietnam et Philippines continuaient à « profiter de sa position diplomatique modérée ». Il faisait peut-être allusion au fait que Hanoi lance avec New Delhi un projet conjoint d’exploration pétrolière off-shore, en zone revendiquée par Pékin—qui conseillait à l’Inde, par ses media, de se retirer vite de ce «mauvais pas» . Heureusement, ces cris guerriers étaient contrebalancés par des annonces sino-vietnamiennes plus amènes, renforçant leur coopération militaire et réaffirmant la volonté politique de régler ces revendications « par la concertation et les négociations ».

L’Inde d’autre part renforce aussi la coopération avec la Birmanie, hier chasse gardée chinoise (cf vdlC n°34): décidément, ces mers du sud deviennent de plus en plus une pierre d’achoppement, pour les richesses pétrolières qu’elles renferment, comme pour le contrôle des routes maritimes…

 

 

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