Banque : Temps agité sur la mer des finances

Nouvelle qui fait «tilt» le 10/10: Huijin, filiale du fonds d’Etat CIC (China Investment Corporation), rachète 70 millions d’actions des quatre grandes banques chinoises. Goutte d’eau qui change peu la part de l’Etat dans ces «quatre soeurs» – 40% d’ABC (Agricultural Bank of China), 35% d’ICBC (Industrial & Commercial Bank of China), 57% de CCB (China Construction Bank) et 67% de la BdC (Banque de Chine). Mais c’est un message clair de soutien à ses locomotives financières, qui venaient de perdre un tiers en bourse de Shanghai en 10 mois -laquelle avait elle-même chuté de 18% du 01/01 au 04/10.

Ces difficultés reflètent le frein à la croissance, la lutte contre l’inflation qui stagne en septembre à 6,1%. Or ce même mois, Pékin forçait les quatre soeurs à acquérir pour 20 milliards de ¥ de bons d’Etat pour les «punir» d’avoir trop prêté en août. Voici donc l’Etat forcé de naviguer à vue, punissant en septembre pour renflouer en octobre.

Ce soutien ne rappelle-t-il rien ? Le Sommet de l’Union Européenne (23/10) doit, lui aussi, fixer des règles à la recapitalisation des banques, nécessaire pour leur éviter le sort de Dexia, en faillite. Les causes profondes ont aussi d’étranges similitudes. Sur les 2 continents, les banques sont plombées par de mauvais prêts et par l’absence de discipline budgétaire, chez les provinces en Chine, les Etats membres dans l’Union Européenne.

2011 est le théâtre d’une autre crise : celle du crédit. Les PME (80% du PIB) sont contraintes de se tourner vers la banque «grise» (mont-de-piété, mafia), et ferment par millions, faute de pouvoir payer des intérêts usuraires, jusqu’à 100% par an. Le 1er ministre Wen Jiabaoressort sa vieille promesse (jusqu’ici vaine !) de forcer les banques légales à prêter aux PME, pour lutter contre la prolifération de la finance sous le manteau, sans tutelle ni impôts, +50% nationalement en 2011, et occupant 20% du marché de Wenzhou (Zhejiang). L’Etat parle de la casser, mais sans rien pouvoir faire -elle est trop nécessaire.

Autre crise prédite par l’économiste M. Pettis sur CCTV (12/10) : celle des Grandes entreprises d’Etat (GEE), que l’Etat devra probablement renflouer à court terme. Depuis 10 ans, les GEE empruntent à taux bas, probablement négatif après inflation: plus elles empruntent, plus elles gagnent, même sans placer les fonds, ou bien sur des projets politiques, redondants et sans marché. Dès sept. , Fitch avertissait que pour maintenir le même taux de croissance, il fallait investir 185% du PIB en 2011, contre 124% en 2007. Fitch menaçait d’ailleurs de casser la cote chinoise d’emprunt « AAA ».

La question est celle de la dérégulation du taux d’intérêt. Depuis 2010, les banques militent pour changer un système qui cesse de leur bénéficier, et réclament un taux qu’elles fixeraient elles-mêmes selon la loi du marché, leur permettant de réduire les risques.

Aujourd’hui, Wen Jiabao suggère que la phase d’austérité s’achève : les banques devraient bientôt payer moins de dividendes, recevoir la liberté de taux d’intérêt et renforcer leurs réserves en prévision des faillites en province, ainsi que de nouvelles règles de capitalisation, en vigueur au 01/01. Mais pour cela, Pékin doit attendre le G20 de Cannes (3-4/11), vu les incidences de ses décisions sur son propre marché. La date la plus plausible sera décembre, au sommet financier national à Pékin.

Ainsi, la crise a des causes comparables en Chine et en Europe : le remède lui aussi, pourrait offrir des convergences, à savoir en Europe, un carcan communautaire aux budgets des Etats membres, et en Chine, un taux d’intérêt libéré. L’objectif, de part et d’autre, est de boucher les gouffres financiers. En Chine, enfin, n’espérons pas trop, trop vite : ce genre de nouveau départ ne s’impose que sur de longues périodes, à doses homéopathiques !

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